Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi transmise au Sénat le 3 décembre 2009 constitue une nouvelle et consistante étape du toilettage de notre corpus législatif.
En raison de la diversité des domaines abordés, votre commission des lois, mes chers collègues, a décidé de déléguer aux commissions saisies pour avis l’examen des dispositions relevant de leur seule compétence. En conséquence, votre commission des lois a adopté leurs amendements et suivi leurs avis sur les autres amendements aux parties relevant de leur périmètre.
Pour sa part, elle a examiné en propre les 141 articles entrant dans son domaine de compétence.
Le texte transmis par les députés constitue un vaste chantier, dont certaines composantes appellent un examen approfondi dans un autre cadre.
Du « haut » de mon troisième rapport sur ces initiatives parlementaires, un constat s’impose à moi : la simplification s’avère un processus de plus en plus complexe. Force est de constater le développement inflationniste du contenu de ces propositions de loi successives : 30 articles pour la première d’entre elles, la loi du 20 décembre 2007 ; 206 pour le texte aujourd’hui soumis au Sénat.
Il ne s’agit pas, pour votre commission, de s’opposer à la conduite de ce chantier législatif indispensable à l’accessibilité et à la sécurité juridique de notre droit. Mais elle veut souligner les difficultés croissantes de l’exercice : le Parlement est amené à examiner des dispositions nombreuses, très diverses et d’inégale valeur. En effet, certaines d’entre elles s’inscrivent effectivement dans l’objet d’une loi de simplification et donc procèdent à des abrogations de textes tombés en désuétude ou inutiles, à des rectifications rédactionnelles, à des coordinations, à la simplification ou à la clarification de certaines procédures. En revanche, de nombreuses autres dispositions du texte présentent de véritables innovations ; sans préjuger leur bien-fondé, elles dépassent manifestement l’objet de la proposition de loi.
Ce rituel législatif est aujourd’hui devenu le véhicule commode pour porter, notamment, les amendements des différents ministères.
À cet égard, on peut s’interroger sur l’objet même de ce texte, entendu tant par son intitulé que par le périmètre de ses dispositions initiales : cette proposition de loi a-t-elle un objet identifié, au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel ? N’est-elle pas devenue, sous son intitulé de simplification, un assemblage disparate de « cavaliers législatifs » en déshérence ? Son absence de frontières – à l’aune de ses enrichissements à l’Assemblée nationale – et son caractère éminemment disparate pourraient être interprétés comme une altération des objectifs de valeur constitutionnelle de clarté et de sincérité du débat parlementaire, et d’accessibilité de la loi.
C’est ainsi que le législateur se trouve confronté à un texte touffu, hétéroclite, qui renferme de multiples sujets dont certains produisent des conséquences lourdes pour notre ordonnancement juridique.
Pour votre rapporteur, il faudra à l’avenir revenir à l’esprit qui a animé à l’origine cet utile mouvement de toilettage du droit pour s’en tenir aux seules rectifications, coordinations, suppressions et simplifications qui y concourent.
Par un mouvement inverse, tenant à son calendrier d’examen, la proposition de loi a été partiellement démantelée. C’est le cas de l’article 3 bis, destiné à conforter le rôle de « guichet unique » joué par les centres de formalités des entreprises ; il a été introduit dans la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services. L’article 111 concernant le montant de l’amende encourue pour recherche illicite d’identification génétique figure également dans le projet LOPPSI.
Si elle comprend les motivations pratiques, votre commission ne peut que déplorer la présence dans la proposition de loi de dispositions insérées simultanément dans d’autres textes…