Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 13 décembre 2010 à 14h30
Simplification et amélioration de la qualité du droit — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

… M. Saugey estime qu’il faudra « à l’avenir revenir sur l’esprit qui a animé à l’origine cet utile mouvement de toilettage du droit ». Mais pourquoi ne pas conjuguer cette nécessité au présent, en rejetant ce projet et en tentant dès à présent de suivre une autre voie ? Ce constat, monsieur le rapporteur, nous l’avons déjà fait à six reprises ! Comprenez donc que nous ayons quelques difficultés à croire aujourd’hui ceux qui prétendent que nous ferons mieux à l’avenir.

Certains des sujets abordés dans ce texte exigent des discussions approfondies et spécifiques. Nous n’avons eu de cesse, sur certaines travées de cet hémicycle, d’affirmer notre volonté de reconquérir la maîtrise publique des services publics et des entreprises nationales. Cela passe évidemment par le rejet en bloc des dispositions et du projet de société que porte la directive Bolkestein. Ces sujets méritent débat. Mais voilà qu’au détour de cette proposition de loi, qui entend « simplifier le droit », on transpose à bon nombre de domaines et de professions cette directive, que nous considérons pour notre part comme scélérate.

Encore une fois, le Gouvernement, pressé par le temps, use de tous les procédés, aussi anti-démocratiques soient-ils, pour faire passer des dispositions partout et n’importe quand.

Les États membres de l’Union disposaient de trois ans à compter de la publication de la directive, c’est-à-dire jusqu’au 28 décembre 2009, pour assurer sa transposition. Le processus de transposition de la directive, qui est toujours en cours, constitue une étape déterminante dans la sanctuarisation de plusieurs services par rapport aux règles de la concurrence et du marché intérieur.

Outre le retard qu’ont pris les travaux, et le manque patent de moyens de la cellule interministérielle qui en est chargée, ce qui n’est guère étonnant, la méthode de transposition choisie a été très largement critiquée, y compris parmi les membres de la majorité. Le rapport d’information parlementaire sur la transposition de la « directive services », présenté par le sénateur Jean Bizet, levait toute ambiguïté quant à la possibilité pour la représentation nationale de débattre des nombreux enjeux de sa transposition quelques mois avant son entrée en vigueur.

Il affirmait que « le gouvernement français a abandonné l’objectif […] de déposer un projet de loi-cadre pour transposer la directive ». On savait déjà que la transposition se ferait via une multitude de projets de loi sectoriels, et c’est en effet ce qui se passe.

Le rapport nous indiquait aussi qu’il n’y aurait « pas de recours aux ordonnances, en principe », tout en prenant la sage précaution de mentionner qu’« il faut toutefois rester vigilant en la matière ». C’est le cas de le dire, mais pourrons-nous l’être ? Nous sommes aujourd’hui en droit de douter de vos « principes » au regard de la façon dont la France est gouvernée et la démocratie malmenée.

Dans ce contexte, il ne semble pas acceptable que les importants enjeux de la transposition soient débattus, par défaut, dans le cadre d’une proposition de loi de simplification du droit, censée, qui plus est, n’apporter de modifications qu’à droit constant !

Tout comme il paraît aussi quelque peu étrange qu’une proposition de loi ratifie une ordonnance prise par le Gouvernement.

Quant aux autorisations de légiférer par voie d’ordonnance pour transposer des directives, contenues à l’article 151, considérez-vous qu’elles constituent une simplification du droit ? Encore une fois, nous regrettons que l’on procède de la sorte.

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