Intervention de Christophe-André Frassa

Réunion du 4 juillet 2011 à 14h30
Ventes volontaires de meubles aux enchères publiques — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, cher Jean-Jacques Hyest, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme d’une série de débats sur la proposition de loi de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Cette proposition de loi, déposée par nos collègues Philippe Marini et Yann Gaillard, que je salue, a un double objectif.

D’une part, il s’agit de transposer au secteur des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques les dispositions de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les opérateurs de ce type d’activité entrent en effet pleinement dans le champ de cette directive transversale, dont les États membres devaient assurer la déclinaison dans leur droit interne avant le 28 décembre 2009.

D’autre part, il s’agit d’approfondir la libéralisation du secteur des ventes volontaires aux enchères publiques, de manière à offrir aux opérateurs capables de rivaliser avec les grandes sociétés de vente internationales les moyens juridiques de les concurrencer réellement.

Cette proposition de loi a également pour ambition de tirer les conséquences de six années d’application de la loi du 10 juillet 2000.

Cette loi, portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, a cherché à modifier le statut des commissaires-priseurs et a limité leur monopole aux ventes judiciaires. Elle a également offert aux sociétés de ventes volontaires la possibilité de se développer à l’international.

Il est important de souligner que l’obligation de transposer la directive du 12 décembre 2006 donne à la France l’occasion de franchir une nouvelle étape, alors que les opérateurs nationaux des ventes volontaires sont confrontés à une forte concurrence.

Les sénateurs ont fait le choix de retenir non pas une transposition a minima de la directive, mais plutôt une transposition assortie d’améliorations propres au droit interne, en considérant qu’il fallait saisir l’occasion offerte par l’impératif de transposition pour moderniser, effectivement et durablement, le secteur des ventes volontaires aux enchères publiques.

Après avoir été discutées dans chacune des deux chambres, plusieurs mesures faisaient toujours l’objet de désaccords. Je voudrais revenir sur quelques-uns des points dont la commission mixte paritaire a longuement débattu et qui ont été désamorcés, ce dont je me réjouis.

Le premier point porte sur les opérateurs autorisés à organiser des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Aux sociétés de ventes volontaires, à statut de société commerciale mais à objet civil, l’Assemblée nationale avait ajouté les notaires et les huissiers de justice. Le plafond d’activité pour les huissiers n’a pas été retenu en commission mixte paritaire. Notre souhait est cependant que cette activité n’excède pas un gros tiers du chiffre d’affaires de l’office.

Le deuxième point est relatif au statut et aux missions du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Celui-ci, créé par la loi du 10 juillet 2000, a vu le jour pour réguler le secteur des enchères publiques, en lieu et place de la chambre nationale des commissaires-priseurs.

Il a été décidé d’attribuer expressément à ce conseil le statut d’établissement d’utilité publique doté de la personnalité morale. Le Conseil des ventes volontaires sera donc une personne morale de droit privé, et non une autorité publique ou administrative indépendante.

Il a également été prévu que ce conseil élabore, après avis des organisations professionnelles représentatives des opérateurs, un recueil des obligations déontologiques des opérateurs de ventes volontaires aux enchères publiques, soumis à l’approbation du garde des sceaux. Notre assemblée a souhaité que ce recueil soit rendu public, ce qui constitue indéniablement un gage de transparence.

En outre, pour donner une certaine force à cet instrument de soft law, le Conseil des ventes volontaires a été investi de la prérogative d’émettre des avis sur toutes pratiques professionnelles qui lui paraîtraient contraires aux règles posées dans ce code.

Enfin, il nous est apparu opportun de conférer à ce conseil la faculté de formuler des propositions de modifications législatives et réglementaires au sujet de l’activité des ventes aux enchères publiques, mais nous avons souhaité cantonner cette capacité de proposition de modifications législatives au seul secteur des ventes volontaires aux enchères publiques.

Le troisième point important concerne la composition, la durée du mandat des membres et les modalités de renouvellement du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Le texte précise les modalités de financement de cette institution ainsi que celles qui sont relatives à la certification et au contrôle de ses comptes. La commission mixte paritaire a permis un accord sur la durée du mandat des membres du conseil, fixée à quatre ans. Ce mandat restera renouvelable une seule fois.

Par ailleurs, afin de renforcer l’indépendance des membres du Conseil des ventes volontaires, il a été prévu qu’il ne pourra être mis fin à leurs fonctions qu’en cas de démission ou d’empêchement.

Enfin, le texte du Sénat excluait initialement tout professionnel en exercice au sein du conseil, mais la représentation des professionnels a finalement été étendue aux personnes exerçant toujours l’activité d’opérateur de ventes volontaires aux enchères publiques.

Cependant, les autorités ministérielles de nomination conserveront toute latitude pour désigner un opérateur encore en exercice ou un opérateur ayant cessé son activité, de sorte que la présence de professionnels encore en activité devrait rester marginale.

Le quatrième point a trait au régime procédural qui s’applique devant le Conseil des ventes volontaires en matière disciplinaire. Comme vous le savez, la proposition de loi le modifie substantiellement de manière à rendre le déroulement des instances plus équitable et impartial.

L’essentiel des innovations porte, d’une part, sur l’instauration de règles de déport explicites pour les membres du conseil appelés à statuer sur un dossier disciplinaire à l’égard duquel leur impartialité ne serait pas totale – c'est-à-dire principalement les personnalités ayant exercé des activités de ventes volontaires et qualifiées à raison de leur expertise en la matière – et, d’autre part, sur l’information du président du Conseil des ventes volontaires sur les intérêts directs ou indirects détenus, les fonctions exercées et les mandats détenus au sein d’une personne morale par chacun des membres de cette autorité de régulation.

Les sanctions applicables aux opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques obéissent, quant à elles, à une gradation en fonction de la gravité des faits reprochés. Le texte se borne à prévoir une seule sanction complémentaire par rapport au droit existant, consistant en la publicité des décisions du Conseil des ventes volontaires.

Notre assemblée s’est attachée à prendre en compte la nouvelle désignation des opérateurs de ventes volontaires, à supprimer les pouvoirs disciplinaires du conseil à l’égard des experts agréés dont l’agrément est abrogé et à introduire le contradictoire dans la procédure de suspension provisoire.

Afin de mieux articuler les régimes de l’action disciplinaire et de l’action pénale, il est prévu que, « si l’opérateur [de ventes volontaires] est l’auteur de faits ayant donné lieu à une condamnation pénale, l’action [disciplinaire] se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive ». Autrement dit, en contrepartie du report du point de départ du délai de prescription en matière disciplinaire à l’issue de l’action pénale, la durée de ce délai a été abaissée de trois à deux ans.

Le cinquième point porte sur les compétences en matière de ventes aux enchères de marchandises après liquidation judiciaire.

Sur ce point très discuté, c’est la version du Sénat qui a été retenue en commission mixte paritaire, à savoir la suppression de la limitation à un caractère accessoire de l’activité de ventes judiciaires de biens meubles au détail ou par lots des notaires et des huissiers de justice.

La commission mixte paritaire a également repris la décision du Sénat de supprimer la limitation des ventes judiciaires en gros par les courtiers de marchandises assermentés dans leur spécialité. La Chancellerie y a cependant apporté certains aménagements notables.

Le sixième point concerne les activités complémentaires des commissaires-priseurs judiciaires.

Afin d’éviter d’ouvrir ce que M. le garde des sceaux a appelé ici même, le 26 avril dernier, une « brèche dangereuse », la commission mixte paritaire n’a pas retenu le caractère « complémentaire » donné aux activités de transport de meubles, de presse, d’édition et de diffusion de catalogues que les sociétés commerciales pourront accomplir, permettant aux commissaires-priseurs judiciaires d’exercer une activité de ventes volontaires aux enchères publiques.

Enfin, le septième point a trait à la réforme du statut des courtiers de marchandises assermentés afin de l’actualiser et de l’adapter à la directive Services.

Les principales novations concernent respectivement le statut et le périmètre d’intervention des courtiers assermentés, l’organisation de la profession et la discipline de ses membres. Nous nous satisfaisons qu’ait été retenue une rédaction équilibrée, tenant compte de la spécificité de ces professionnels.

Je tiens à cet instant à saluer, pour la grande qualité de leur travail, M. Jean-Jacques Hyest, ainsi que le rapporteur de la proposition de loi Marie-Hélène Des Esgaulx.

Incontestablement, la proposition de loi a connu des évolutions qui permettent d’aller plus loin dans la rénovation du régime des ventes volontaires. Conscient par ailleurs que la Commission européenne se montre très attentive au calendrier de son examen parlementaire et à son contenu, le groupe de l’UMP votera avec conviction en faveur de ce texte, porteur d’une réforme approfondie et nécessaire.

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