Nous ne retirerons pas cet amendement, même si nous considérons qu'il s'agit d'un amendement d'appel.
Tout à l'heure, M. Repentin a fait état du rapport d'information du Sénat sur la sécurité d'approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver, rapport consensuel puisqu'il a été adopté à la quasi-unanimité. Celui-ci insistait, en substance, sur le fait que l'énergie, ne pouvant être considérée comme une marchandise comme une autre, les conséquences de la libéralisation sur la sécurité d'approvisionnement énergétique risquaient d'être considérables.
Madame la présidente, je défendrai conjointement les amendements n° 74 et 94. Quant à l'amendement n° 96, j'annonce par avance que je le retire.
Madame la ministre, la facture énergétique des Français, qui constitue une dépense difficilement compressible, a des répercussions importantes sur leur pouvoir d'achat. En effet, selon une étude de l'INSEE, la part du budget des ménages consacrée aux frais de logement et d'énergie est aujourd'hui de 16, 5 %, et atteint même 23 % pour les ménages les plus modestes.
Or la libéralisation totale du secteur de l'énergie expose les ménages, et notamment les plus modestes d'entre eux, aux risques d'une augmentation importante de leur facture d'électricité et de gaz.
La mission d'information du Sénat a constaté que, dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, la libéralisation avait entraîné de très fortes hausses de la facture énergétique pour les ménages.
Les gouvernements précédents de MM. Raffarin et de Villepin ont refusé qu'un bilan national de l'ouverture du marché de l'énergie aux entreprises soit réalisé. Ils ont engagé avec zèle l'ouverture des marchés pour les consommateurs domestiques, allant ainsi au-delà des prescriptions communautaires. Et pour cause ! La situation de bon nombre d'entreprises qui avaient fait jouer leur éligibilité était catastrophique, d'où la mise en place du fameux TARTAM, le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché.
En effet, les tarifs sur le marché libre ont connu une hausse exponentielle depuis la libéralisation du secteur énergétique, et ce alors que les tarifs réglementés sont restés relativement stables. Ainsi, dans les cinq dernières années, les tarifs régulés ont augmenté de 10 %, tandis que les tarifs dits « libres » ont subi une hausse de plus de 75 %.
En ce qui concerne les industries électro-intensives, l'augmentation de leur facture énergétique, à laquelle elles sont particulièrement sensibles, a atteint 117 % entre 2002 et 2007 !
La pression exercée par les actionnaires ainsi que par les marchés financiers a conduit les entreprises du secteur énergétique non seulement à réduire leurs coûts en termes de personnels et de maintenance, mais également à augmenter leurs marges, afin d'offrir des dividendes confortables aux actionnaires. Cet impératif de la rentabilité maximale pousse les entreprises à vouloir toujours plus, en s'agrandissant pour accroître encore et encore leurs marges.
Tout cela aboutit finalement à des concentrations accrues d'entreprises et, pour finir, au remplacement de monopoles publics par des monopoles privés tournés vers la satisfaction non pas de l'intérêt général, mais d'intérêts particuliers.