Le Parlement est le lieu du vote de la loi, le lieu où se décident les grandes orientations de notre pays. C'est la raison pour laquelle il lui faudra débattre d'une grande loi d'orientation et de programme.
Deuxièmement, je veux souligner que notre action ne peut être isolée, car elle n'aurait pas de sens si elle n'était pas relayée sur le plan européen et international.
Nous avons, de ce point de vue, Nathalie Kosciusko-Morizet, Dominique Bussereau et moi-même, ainsi que l'ensemble du Gouvernement, une chance formidable. Nous sommes en effet à un moment de bascule, de rupture, avec la future présidence française de l'Union européenne, avec la conférence de Bali, avec l'après-Kyoto.
Nous vivons une période extraordinaire où les puissances publiques du monde sont interpellées sur ces sujets de grandes orientations et de gouvernances locales ou internationales.
Enfin, troisièmement, pour passer à l'action, il faut de la méthode, de l'organisation, de la ténacité. Il ne faut pas entretenir des conflits artificiels que la société française, elle-même, considère comme déjà dépassés. C'est une question de responsabilité et, au fond, de bon sens !
Le développement économique et la protection de l'environnement ne s'opposent pas. On sait au contraire que les économies qui auront agi le plus tôt seront plus compétitives que les autres.
La révision de nos critères de programmation des infrastructures ne signifie pas l'interruption de l'effort d'équipement de notre pays.
Le 24 septembre dernier, lors de la conférence sur les changements climatiques qui se tenait à New York, le Président de la République a rappelé qu'il fallait éviter de franchir le point de non-retour. Ce point de non-retour, en matière climatique, a été évalué à deux degrés en 2050 : si la température mondiale augmente en moyenne de deux degrés à cette échéance, nous serons incapables de revenir en arrière.
Il faut que nous prenions conscience de notre entrée dans un monde nouveau, le monde de la rareté : rareté d'un climat tempéré, rareté de l'eau, des capacités agricoles permettant de nourrir neuf milliards d'êtres humains et non plus six milliards et demi, rareté de l'oxygène, des ressources fossiles...
Quel que soit le débat, qu'il porte sur la vitesse, le pétrole, le charbon ou le gaz, nous consommons en tout état de cause plus que ne le permettent les capacités de renouvellement des écosystèmes. On peut discuter de la date et de l'heure, mais notre modèle est essentiellement fondé sur ce constat.
Nous avons donc l'obligation absolue d'anticiper, sans aucun catastrophisme, afin de disposer d'une économie plus sobre en besoins énergétiques. Le simple bon sens le commande.
Penser que le prix du baril de pétrole Brent sera de 80 dollars dans dix ans est évidemment absurde puisque l'on sera dans une phase descendante, quoi qu'il arrive. Pour des raisons humaines, stratégiques, géostratégiques, politiques ou militaires, il nous appartient d'organiser la mutation de la société française. Les 62 millions de Français que nous sommes ont les capacités de le faire, tous ensemble, dans la joie et la bonne humeur. Il nous est tout à fait possible de diviser par quatre nos besoins énergétiques.
Voilà ce dont il s'agit en réalité dans ce Grenelle. C'est pourquoi il était important que toutes les parties prenantes y participent. Nous avons pris le risque d'une certaine innovation démocratique et celui d'être critiqués tant sur la procédure, les méthodes que les délais, en sachant que tout ne sera jamais parfait.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous aurons à bousculer quelques habitudes. Nous ferons preuve de fermeté sans nous laisser intoxiquer par les surenchères. Nous voulons être clairs, méthodiques, déterminés et responsables.
À Rio, Achim Steiner, directeur du programme des Nations unies pour l'environnement, dont personne ne conteste l'envergure ni le sens des responsabilités, a officiellement déclaré, après une présentation de notre Grenelle de l'environnement - les autres pays s'intéressent effectivement à ce que nous faisons -, devant soixante pays, que la France, avec le Grenelle, faisait office de laboratoire aux yeux du monde. « Souhaitons-lui bonne chance », a-t-il ajouté.
En effet, très franchement, vu d'un peu plus loin, si un pays tel que la France, qui dispose de tant de ressources naturelles, qui bénéficie d'un climat tempéré, qui a des rivières, des océans, des mers, des forêts, des intelligences, des capacités technologiques, qui a inventé le Conservatoire national des arts et métiers, qui jouit d'autant de richesses, ne peut pas prouver au monde que la croissance durable est possible, il y a du souci à se faire ! Mais comme je suis convaincu que, tous ensemble, nous y parviendrons, nous serons de nouveau, aux yeux du monde, une référence.