Deuxièmement, il faut amorcer le découplage entre création de richesses et consommation d'énergies et de ressources naturelles non renouvelables, sans pour autant aboutir à la désindustrialisation de notre économie.
Les premières séries de mesures proposées portent sur l'amélioration et la diffusion d'indicateurs de développement durable, une meilleure information écologique sur les produits et les services ou encore la promotion d'une publicité responsable. Comme le président de la commission des affaires économiques, M. Jean-Paul Emorine, j'émettrais une réserve quant à la mise en place d'un observatoire des impacts sur l'environnement et la santé, si cette création ne s'accompagnait pas d'une rationalisation drastique des organismes existant déjà dans ce domaine.
Une autre série de mesures intéressantes concerne la recherche et le développement des technologies favorables à l'environnement, ainsi que la sensibilisation et la formation à l'écologie et au développement durable. Je remarque d'ailleurs que, de façon unanime, quels que soient les thèmes dont ils avaient la charge, tous les groupes de travail insistent sur les efforts à consacrer en matière de recherche fondamentale et appliquée, de formation initiale et continue et d'actions de sensibilisation et d'éducation. Il y a là un énorme chantier.
S'agissant des outils économiques proposés en faveur de l'environnement, la mise en place d'une « contribution climat-énergie », sous la forme d'une taxe intérieure sur les émissions de carbone pour les secteurs non couverts par le marché européen de quotas de CO2, suscite encore de nombreuses questions qu'il faudra impérativement résoudre s'agissant, notamment, de l'assiette de la taxe, de son ajustement aux frontières et de son impact macroéconomique et sectoriel sur la compétitivité, l'emploi et le pouvoir d'achat.
Le groupe de travail n° 1 s'est consacré à la lutte contre le changement climatique et à la maîtrise de la demande d'énergie, en réaffirmant nos engagements souscrits à l'horizon 2050, et dès 2020 pour le programme des « 3x20 » fixé par le Conseil européen. Il a formalisé des propositions ambitieuses en matière de bâtiment, d'urbanisme et de transports, secteurs fortement émetteurs de CO2. Cela suppose la mobilisation de tous les acteurs et un panel de mesures le plus large possible.
On ne peut que souscrire à l'ensemble des propositions faites tant pour la rénovation des bâtiments existants que pour la construction. Mais, au-delà de la question, au demeurant essentielle, du financement des rénovations ou des surcoûts liés aux réglementations plus sévères, encore faudrait-il qu'existe une offre effectivement disponible en matériaux adaptés, en techniques de construction, en personnels qualifiés et formés à ces nouveaux enjeux. Il conviendra, par conséquent, de fixer des objectifs réalistes et réalisables.
S'agissant du secteur des transports, l'objectif affiché est de ramener, en 2020, le niveau des émissions de CO2 à leur niveau de 1990. Les questions se focalisent sur le rééquilibrage entre le transport routier de marchandises, le fret ferroviaire et les voies fluviales. Il faut bien entendu prendre garde à l'impact économique global et sectoriel des mesures envisagées, mais les modes de transport substitutifs à la route doivent être encouragés dans une démarche cohérente d'aménagement du territoire.
Enfin, sans pouvoir être exhaustif, j'évoquerai les propositions concernant les émissions moyennes de CO2 des véhicules automobiles et l'intégration du transport aérien dans le marché européen des quotas de CO2. Sur ces propositions comme sur celles qui sont avancées en matière de fiscalité écologique, il est indispensable que le débat soit porté au niveau communautaire. La présidence française de l'Union européenne de 2008 doit donc être soigneusement préparée dans cette perspective.
Enfin, je souhaite vous faire part de quelques suggestions de mon collègue Jean Bizet, membre du groupe n° 1 du Grenelle de l'environnement.
Selon lui, deux remarques s'imposent. D'une part, toute initiative doit être désormais prise en conformité avec la Charte de l'environnement, notamment son article 5, qui codifie le principe de précaution et devrait rassurer tout un chacun. D'autre part, il faut affiner le chiffrage financier de toute mesure et la situer dans le temps.
Cela étant, le Grenelle de l'environnement ne se terminera pas une fois sa dernière réunion achevée. Plusieurs des décisions qui seront arrêtées à la fin du mois d'octobre auront des implications législatives. Dans cette perspective, tous les sujets abordés sur lesquels un consensus existe pourraient faire l'objet d'une grande loi-cadre. Les points moins consensuels exigeront une décision politique forte.
À ce titre, je souhaiterais faire un bref commentaire sur trois sujets fondamentaux.
En matière de transports, un rééquilibrage en faveur du rail est indispensable pour le fret. Il doit être accompagné de la définition d'un grand sillon de transports ferroviaires et fluviaux.
Sur l'énergie, il faut rappeler que c'est grâce à l'énergie nucléaire que nous sommes un des plus faibles émetteurs européens de gaz à effet de serre, voire le plus faible, et que nous sommes capables de fournir de l'électricité à nos partenaires européens.
Quant aux biotechnologies, il faut distinguer le secteur du médicament, où les biotechnologies sont largement utilisées, de la chimie verte et de l'alimentaire. Dans ce dernier domaine, nous devons admettre la faible acceptation de la société. Par conséquent, il convient d'approfondir davantage la recherche pour nous prémunir de risques éventuels et faire oeuvre pédagogique. Mais nous devons aussi reconnaître que des passerelles existent pour l'ensemble des biotechnologies et que les enjeux de propriété intellectuelle sont réels, avec de fortes implications économiques.
Sur ce sujet précis, monsieur le ministre, pourquoi ne pas reprendre le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés adopté le 23 mars 2006 par le Sénat ? Il transpose la directive 2001/18/CE du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et pourrait être élargi et complété par voie d'amendements devant l'Assemblée nationale.
Monsieur le ministre d'État, madame le secrétaire d'État, il nous reste désormais à transformer l'essai. La première phase du « Grenelle de l'environnement » a suscité beaucoup d'espoirs, d'attentes et de mobilisation : les programmes d'actions à mettre en place ne doivent pas les décevoir. Dans cette perspective, les maîtres mots qui devront guider notre action sont, me semble-t-il, sobriété, innovation, information, responsabilité et pragmatisme.