Intervention de Philippe Paul

Réunion du 1er mars 2011 à 14h45
Conventions internationales instituant des partenariats de défense — Adoption de quatre projets de loi

Photo de Philippe PaulPhilippe Paul, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen par le Sénat des accords de partenariat de défense avec le Togo, le Cameroun, le Gabon et la République centrafricaine constitue un jalon symbolique important dans l’évolution de notre politique à l’égard du continent africain.

Il marque la concrétisation d’un engagement pris par le Président de la République voilà tout juste trois ans dans son discours du Cap devant le Parlement sud-africain : il s’agit de procéder, avec tous les États africains concernés, à un réexamen des accords de défense existants, afin de les adapter « aux réalités du temps présent » et de donner à nos relations de défense et de sécurité avec ces pays un cadre renouvelé et transparent.

Bien qu’il n’existe pas de définition juridiquement établie de la notion d’accord de défense, on désigne généralement sous ce terme un accord intergouvernemental prévoyant l’aide ou l’assistance militaire d’un pays auprès d’un autre en cas de menace ou d’agression.

À la suite des indépendances, la France avait conclu de tels accords avec une quinzaine de pays africains, leur apportant ainsi une garantie de sécurité à un moment où leurs forces armées restaient à construire et où ils n’étaient pas encore en mesure d’assurer leur propre défense.

Au fil du temps, un certain nombre de ces accords ont été remplacés par des accords de coopération classiques. Mais d’autres sont restés en vigueur ou ont été mis à jour sans que soit remis en cause le principe d’assistance en cas d’agression.

Depuis longtemps déjà, la question du maintien de ces accords était posée.

Il s’agit tout d’abord d’instruments très anciens, pour la plupart élaborés lors des indépendances. Ils n’ont donc pas pris en compte l’évolution du contexte politique de ces cinquante dernières années. À titre d’exemple, nos accords avec le Gabon ou la République centrafricaine se réfèrent encore au cadre constitutionnel de la Communauté, qui est devenu caduc dès 1961.

Ensuite, ces accords comportent des clauses d’assistance, y compris parfois en cas de troubles intérieurs. Or ces clauses n’ont plus de portée pratique dans les faits. La France estime depuis longtemps que leur mise en œuvre ne peut avoir de caractère automatique et que le règlement des crises doit s’appuyer sur un mandat des Nations unies et l’implication des organisations régionales.

Enfin, le cadre de nos relations avec les pays concernés manquait de transparence, puisque certaines clauses ou certains accords particuliers n’avaient pas été publiés ni soumis à l’approbation parlementaire.

En résumé, les accords de défense qui continuaient à nous lier à huit pays d’Afrique paraissaient en fort décalage avec les orientations de notre politique de sécurité sur le continent, comme avec la réalité de notre coopération.

Ces orientations ont été rappelées par le Président de la République au Cap, en février 2008. Elles se situent dans la continuité des priorités fixées durant les années quatre-vingt-dix et s’articulent autour de trois idées force : aider le continent à bâtir son propre dispositif de sécurité collective, à travers l’Union africaine et les organisations sous-régionales ; faire de l’Union européenne un partenaire majeur de l’Afrique en matière de paix et de sécurité ; privilégier le recours au cadre multilatéral, sous l’égide de l’ONU ; et limiter nos engagements militaires bilatéraux tout en réduisant la présence permanente des forces militaires françaises en Afrique.

La constitution d’une force africaine et de brigades sous-régionales, le concept de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix RECAMP, désormais européanisé sous l’appellation EURORECAMP, ou encore la stratégie conjointe Union européenne-Afrique adoptée à Lisbonne en décembre 2007, sont la traduction la plus visible de cette nouvelle donne dans laquelle s’inscrit pleinement notre coopération militaire.

Pour cet ensemble de raisons, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées estime qu’il était souhaitable de rénover profondément notre dispositif d’accords bilatéraux. C’est le sens de la démarche engagée il y a trois ans sous l’impulsion du Président de la République.

Les quatre accords sur lesquels nous devons nous prononcer aujourd’hui instituent un partenariat de défense avec le Togo, le Cameroun, le Gabon et la République centrafricaine.

Le changement de terminologie, avec l’introduction de la notion de partenariat, illustre l’évolution de nos relations avec les pays africains dans le domaine de la défense. Il s’agit de consacrer le passage – déjà pleinement réalisé dans les faits – de la logique de substitution qui prévalait au moment des indépendances à une logique d’appui aux capacités propres des pays africains et aux architectures de sécurité collective qui se mettent progressivement en place à l’échelle régionale et sous-régionale.

Ces quatre accords présentent un contenu très proche, puisqu’ils s’inspirent d’un modèle d’accord type qui a été proposé à nos partenaires.

Conclus pour une durée de cinq ans, renouvelables par tacite reconduction, ils abrogent et remplacent tous les accords antérieurs, y compris ceux qui n’auraient pas été publiés. Ils constitueront donc le cadre juridique unique pour l’ensemble de nos relations de défense avec les pays concernés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion