Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 7 juin 2006 à 21h30
Immigration et intégration — Article 2

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga :

Approuvant les propos que vient de tenir ma collègue Alima Boumediene-Thiery, je dirai simplement que l'institution d'un visa de long séjour inverse, dans la plupart des cas, la règle actuellement en vigueur en matière d'entrée en France pour un grand nombre de demandeurs : en général, la demande porte sur un court séjour et, dans des cas particuliers, sur un long séjour.

C'est ainsi que, dans un consulat comme celui de Tunis, que je connais bien, 75 000 visas de court séjour ont été délivrés l'année dernière contre quelques centaines de visas de long séjour ; autrement dit, il s'agit là d'un phénomène vraiment exceptionnel.

Les visas de long séjour ne concernaient que les étudiants, qui faisaient l'objet d'une procédure particulière, ainsi que les regroupements familiaux dans le cadre de l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations, lesquels donnaient lieu à une autre procédure particulière.

La difficulté devant laquelle nous nous trouvons, nous législateur, réside dans le fait que nous ne savons pas ce que sont exactement ces nouveaux visas de long séjour ni comment ils vont être mis en oeuvre. Quelle sera la procédure suivie ? En quoi consistera le dossier à constituer ? Comment les choses vont-elles se passer ?

Si l'on interroge les fonctionnaires concernés, tous répondent qu'ils ne peuvent rien en dire, car tout dépendra des décrets d'application. Par conséquent, nous sommes là dans le flou le plus total.

Je voudrais insister sur le fait que l'obligation de retourner dans son pays d'origine pour demander un visa de long séjour nous ramène à la situation créée par les lois Pasqua et Debré, dont nous savons combien elles ont créé de difficultés insurmontables pour des personnes vivant en France ou en Europe et qui devaient retourner dans des pays où elles étaient en danger ; je pense ici, en particulier, aux femmes des pays musulmans qui épousent des non-musulmans et qui, de ce fait, sont en danger quand elles retournent dans leur pays d'origine. Il ne s'agit donc pas là d'un fait mineur.

Il est un autre point sur lequel je voudrais vous interroger, monsieur le ministre.

Aujourd'hui, pour les conjoints de Français, le visa de court séjour est gratuit, ou plus exactement c'est l'examen du dossier qui est gratuit. En effet, les demandeurs de visas acquittent une certaine somme lors du dépôt de la demande d'un visa, qu'ils obtiennent ou non par la suite. Dès lors, ce qu'ils paient, c'est non pas un droit de visa, mais un droit d'examen de leur dossier. D'ailleurs, soit dit en passant, cela rapporte beaucoup d'argent à la France : les consulats qui délivrent de nombreux visas sont une belle source de recettes pour le budget de l'État.

Je souhaiterais donc savoir si le coût du visa de long séjour qui est actuellement fixé à 99 euros va augmenter dans les mêmes proportions que celui du visa de court séjour, lequel va passer de 35 à 60 euros. Dans l'affirmative, je crains que ce visa de long séjour ne soit hors de portée pour beaucoup de gens.

Je tiens aussi à insister sur la longueur de l'instruction d'un visa de long séjour. En effet, alors que le visa de court séjour est examiné dans les vingt-quatre ou quarante-huit heures, le visa de long séjour suppose le dépôt du dossier au consulat, son instruction, sa transmission au ministère des affaires étrangères et à la sous-direction de la circulation des étrangers, installée à Nantes, laquelle doit ensuite rédiger une fiche de synthèse, la transmettre au ministère de l'intérieur, avant que la réponse soit donnée au consulat. Or, si l'on tient compte des délais propres à la valise diplomatique, cela peut nécessiter au moins deux mois.

Imaginons une personne qui, après son mariage en France, rentre dans son pays d'origine pour solliciter un visa de long séjour. Si celui-ci est refusé et fait l'objet d'une nouvelle demande, voire d'un recours, cela peut durer deux ou trois ans ! Je connais personnellement des situations qui traînent en longueur depuis des années à cause de difficultés liées au mariage et qui, de fait, empêchent la vie commune. On dit alors aux intéressés que leur mariage ne peut être considéré comme valide puisqu'il n'y a pas de vie commune ! C'est tout simplement oublier que l'un des membres du couple est à l'étranger et l'autre en France !

Il est un autre point sur lequel je voudrais vous interroger, monsieur le ministre.

La validité maximale du visa de long séjour est actuellement de six mois. Dès lors, j'aimerais savoir si le visa de long séjour, pour toutes les catégories de personnes qui vont dorénavant devoir l'obtenir, sera toujours valable pendant six mois, car, dans ce cas, sa durée de validité ne correspondra pas à la durée de validité de la carte temporaire de séjour qui, elle, est d'un an.

Il faudrait savoir : cette durée sera-t-elle de six mois ou d'un an ? Le visa de long séjour remplacera-t-il ou non la carte temporaire ?

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