Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 8 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Défense

Michèle Alliot-Marie, ministre :

À l'évidence, réagir quand le terrorisme est sur notre territoire, c'est presque déjà trop tard. Il faut intervenir le plus en amont possible s'il l'on veut prévenir les actions terroristes.

De la même façon, les crises multiples, qu'elles interviennent dans les Balkans ou en Afghanistan, ont des conséquences directes sur notre territoire. À l'occasion et sur les lieux de ces crises, se développent des trafics de toutes sortes - trafics d'armes, de drogue, de personnes - qui se retrouvent forcément chez nous et alimentent le grand banditisme. Ces retombées ont donc des conséquences très directes sur nos conditions de vie.

J'entends parfois dire que notre présence en Afrique serait inutile, voire contre-productive. Mais il faut être conscient que l'embrasement de l'Afrique, par des crises multiples, entraînerait une déstabilisation, au premier chef, de l'Europe et, d'une façon générale, du monde.

L'Afrique possède en effet un certain nombre de sources d'énergie, y compris pétrolières, qui entrent dans l'équilibre général du monde. Surtout, en cas de crise dans les pays du Golfe, il est évident que, pour compenser les chutes brutales de production du pétrole, nous aurions besoin de diversifier nos sources d'approvisionnement.

Et n'oublions pas que, si l'Afrique s'embrase, des millions de personnes fuiront des zones de combat où elles risquent d'être massacrées, entraînant la désertification des régions productrices d'aliments où elles vivent aujourd'hui. Elles iront vers le premier continent qui leur paraîtra un continent de paix et où elles pourront trouver des conditions de vie plus propices, c'est-à-dire directement vers l'Europe.

Alors que nous avons du mal à traiter aujourd'hui le problème de l'immigration clandestine, qui ne concerne que quelques dizaines de milliers de personnes, nous serions obligés de faire face à l'afflux de millions de personnes.

Tel est aussi l'enjeu qui justifie notre présence sur un certain nombre de théâtres d'opérations extérieures et qui explique que nous ne pouvons pas dissocier nos actions de sécurité intérieure de nos actions extérieures.

En avons-nous les moyens, ainsi que M. Del Picchia en a fait la remarque ?

Oui, aujourd'hui, la France est à la fois capable d'assurer les différentes opérations extérieures dans lesquelles elle se trouve impliquée et de conduire des opérations de niveau international. Elle l'a largement montré au cours de ces dernières années, soit seule dans un certain nombre de cas, soit dans le cadre de l'action de l'Union européenne, en particulier lors de l'opération très difficile en République démocratique du Congo. Elle l'a montré également, plus récemment, par le biais du commandement de la Force internationale d'assistance à la sécurité, la FIAS, en Afghanistan ou de la KFOR au Kosovo. Nous avons effectivement cette capacité, que nous devons entretenir.

Monsieur Boulaud, je sais bien qu'il n'est pas possible de régler le problème du terrorisme uniquement par la voie militaire, même si cette voie est aujourd'hui notre meilleure protection. Il doit être aussi réglé par la voie diplomatique, à travers des actions de développement, mais nous ne pouvons pas écarter l'action militaire.

Sur la façon directe de lutter contre le terrorisme, je partage votre point de vue : on ne peut pas utiliser tous les moyens. Ce serait, effectivement, la meilleure façon de fédérer contre nous, et contre ceux qui luttent contre le terrorisme, d'autres personnes. C'est l'une des raisons, en dehors des raisons éthiques, qui justifient notre condamnation de la torture. Le recours à une telle méthode disqualifierait, en quelque sorte, les valeurs au nom desquelles nous combattons le terrorisme.

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