Intervention de Nelly Olin

Réunion du 20 décembre 2006 à 15h00
Eau et milieux aquatiques — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixte paritaire

Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, cette loi attendue par tous depuis près de dix ans est soumise à votre vote aujourd'hui.

Le sujet étant particulièrement important, il ne s'agit surtout pas d'une loi idéologique. L'eau est en effet un thème bien trop sensible pour qu'une catégorie, quelle qu'elle soit, puisse être laissée au bord de la route.

Il nous fallait donc, avec pragmatisme, chercher les équilibres acceptables par tous et qui font avant tout avancer l'intérêt général. Telle a été l'ambition du Gouvernement, mon ambition, l'ambition des deux assemblées parlementaires, et cette loi répond parfaitement à cette ambition.

Permettez-moi de vous dire ma satisfaction s'agissant du texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Je tiens à féliciter les rapporteurs de leur immense travail.

En tout premier lieu, ma fierté est de voir inscrire le droit à l'eau dans le droit français.

J'entends bien que, pour certains, nous aurions pu et dû aller plus loin dans la voie d'une approche sociale de l'accès à l'eau. Cependant, je crois m'être exprimée très longuement sur ce point au cours des séances : de nombreux dispositifs ont été mis en place par le Gouvernement à cet égard.

Mais, dans le même temps, tous ou presque sont d'accord pour estimer que l'eau gratuite, dans n'importe quelle condition, serait une chose relativement mauvaise. Là encore, un équilibre devait être trouvé. Aussi, le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui comporte de vraies avancées sociales.

Il s'agit, d'abord, de l'interdiction des cautions et des garanties ; de ce point de vue, le volet social a été largement pris en compte.

Il s'agit, ensuite, du remboursement sous trois ans des cautions et des garanties qui ont été perçues, ce qui ne s'était jamais fait précédemment.

Il s'agit, enfin, du plafonnement de la part fixe, sauf dans les communes touristiques où ce plafonnement créerait des iniquités entre les habitants permanents et les saisonniers.

Ces mesures complètent le dispositif qui existe déjà dans la loi portant engagement national pour le logement.

Par votre vote, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez donner aux pouvoirs publics les moyens et les outils pour atteindre les objectifs du bon état écologique des eaux fixés par la directive cadre sur l'eau.

Ce n'est un secret pour personne : pour répondre aux problématiques nouvelles apparues depuis la loi de 1964, les agences de l'eau en étaient arrivées à intervenir à l'extrême limite de ce que leur autorisait la loi, et leurs redevances pouvaient poser des problèmes de constitutionnalité.

Grâce à cette loi, les agences vont pouvoir intervenir sur tous les sujets qui permettent d'atteindre un bon état des eaux et démarrer leur neuvième programme sur des bases solides.

Vous allez également leur accorder la possibilité de dépenser jusqu'à 14 milliards d'euros en six ans. Ce plafond laisse des marges d'adaptation par rapport aux programmes qui ont été votés par les différentes agences pour un montant de 11, 6 milliards d'euros.

Vous mettrez en place un nouveau système de redevances des agences sur une base qui me semble équilibrée.

Vous fournirez également au ministère dont j'ai la charge, au travers du fonds « Barnier », les moyens d'une relance de la politique de prévention des inondations, qui se traduira, d'ici au 15 février prochain, par la signature de cinq plans « grands fleuves » et d'une quinzaine de nouveaux plans d'actions pour la prévention des inondations.

Les outils dont cette loi nous dotera nous permettront d'avoir une efficacité accrue dans au moins trois domaines.

Premièrement, l'entretien des milieux aquatiques sera facilité par des simplifications administratives et, surtout, par l'instauration de plans de gestion pluriannuels à l'échelle de bassins versants.

Deuxièmement, la gestion de la rareté de l'eau sera améliorée grâce à l'instauration de règlements du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, le SAGE, opposables au tiers, à la mise en place de mesures de gestion collective des prélèvements d'irrigation ou à l'incitation fiscale à la récupération de l'eau de pluie.

Troisièmement, la maîtrise des pollutions diffuses sera recherchée, notamment au travers du contrôle des pulvérisateurs de pesticides ou de la mise en oeuvre de plans de lutte contre les pollutions diffuses dans les aires d'alimentation des captages en eau potable, sans parler de l'effet incitatif de la nouvelle redevance sur les phytosanitaires au taux différencié selon la dangerosité du produit.

Le texte prévoit également la mise en place par les agences de l'eau d'une action de solidarité à l'égard des communes rurales, action qui ira bien au-delà du milliard d'euros en six ans apporté par le Fond national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE. Je rappelle que le FNDAE, qui était à l'origine abondé à hauteur de 150 millions de francs, était au final largement épuisé.

Le projet de loi conforte également l'action des services d'assistance technique à l'exploitation des stations d'épuration, les SATESE, dans un cadre conforme à la réglementation européenne. Vous le savez, de nombreux enjeux en termes de qualité des eaux et de disponibilité pour tous d'une eau de qualité se jouent en milieu rural.

Dans le même esprit, le texte crée les conditions pour que le fonctionnement des SPANC devienne plus efficace.

La compétence des communes en matière d'eau potable est affirmée, tout en préservant les organisations différentes qui existent aujourd'hui par endroits.

La transparence des services publics dans le domaine de l'eau est améliorée.

Les délégations de service public sont mieux encadrées, notamment en ce qui concerne les provisions pour travaux.

La création d'une taxe pour la collecte des eaux pluviales donnera aux collectivités qui le désireront la possibilité de créer une ressource appropriée pour le financement des réseaux d'évacuation des eaux pluviales, tout en incitant les propriétaires à mettre en place des mesures de rétention de ces eaux à la source.

La filière d'épandage des boues de stations d'épuration, qui est dans de nombreux cas la meilleure du point de vue économique et écologique, est confortée avec la création d'un fonds de garantie.

Par ailleurs, le texte donne aux pêcheurs, qu'ils soient amateurs ou professionnels, une organisation nationale à la mesure du rôle important qu'ils jouent dans la préservation des milieux aquatiques.

Il crée une nouvelle définition des eaux closes, qui permettra de mettre un terme à un conflit vieux de vingt ans entre les fédérations de pêche et les propriétaires d'étangs.

L'adaptation au changement climatique sera inscrite au coeur des objectifs de la politique nationale de l'eau. Est-il besoin de rappeler le défi que ce changement climatique représente pour nous tous, et peut être encore plus pour l'agriculture ?

Les politiques que j'ai lancées pour préparer cette adaptation, notamment le plan de gestion de la rareté de l'eau et la relance de la politique de prévention des inondations, s'en trouvent justifiées et confortées.

Ce texte fait explicitement de la politique de l'eau une politique de développement durable, au sens plein du terme. Avec le droit à l'eau, il ajoute un pilier social aux piliers économique et environnemental reconnus depuis longtemps.

De plus, il conforte la cohérence de la politique environnementale de la France autour des deux enjeux majeurs que sont le changement climatique et la lutte contre la perte de biodiversité, qui est pleinement intégrée dans l'objectif de bon état écologique de l'eau.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, il me faut souligner la qualité du travail mené par les deux assemblées et par la commission mixte paritaire. Je tiens en particulier à rendre hommage aux deux rapporteurs, MM. Bruno Sido et André Flajolet. Cette qualité de travail est notamment due à l'ambiance souvent consensuelle qui a régné durant vos travaux afin de rechercher la meilleure solution. Cela ne masque pas l'existence de points de désaccord avec l'opposition, mais des avancées ont été obtenues.

Le texte qui vous est soumis aujourd'hui fait honneur aux politiques et au travail parlementaire. Si, comme je le souhaite, vous l'adoptez, il s'agira d'une loi importante pour nous et pour les générations à venir.

Pour des raisons de coordination, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous proposerai un amendement à l'article 23 qui vise à supprimer une disposition déjà incluse en des termes similaires dans la loi de finances pour 2007. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de votre contribution. Grâce à vous, nous avons pu, dans la sérénité, aboutir à un texte équilibré.

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