Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, l'acte II de la décentralisation a permis aux collectivités locales de prendre une place déterminante dans le développement de nos territoires.
Naturellement, les personnels qui collaborent à l'exécution des politiques de développement local ont suivi ce mouvement. Nous avons beaucoup de chance de les compter parmi nous. Ils sont non pas de simples exécutants, mais véritablement des collaborateurs essentiels ; je pense aux petites communes rurales, où ils assistent les élus avec beaucoup de dévouement et de générosité.
C'est tout l'intérêt du projet de loi relatif à la fonction publique territoriale qui nous est soumis aujourd'hui.
Ne l'oublions pas, en France, les collectivités locales jouent un rôle économique et social majeur du fait de l'accroissement de leurs compétences.
Après vingt ans de décentralisation, la fonction publique territoriale a fait ses preuves en fournissant aux collectivités locales des personnels qualifiés, capables de relever les nombreux défis issus de cette construction décentralisée, notamment de la mise en place de l'intercommunalité. Ce mouvement s'est accompagné, à juste titre, de véritables garanties pour l'ensemble de ces personnels.
Bien évidemment, à l'heure où le deuxième pilier de la décentralisation se met en place, il est important de moderniser la fonction publique territoriale afin de la rendre la plus attractive possible et mieux armée face aux changements à venir.
Le moment est également venu de clarifier le rôle des institutions qui la régissent, notamment le Centre national de la fonction publique territoriale et les centres de gestion de la fonction publique territoriale.
Par votre engagement, monsieur le ministre, vous permettez une meilleure lisibilité des actions de chacune de ces institutions en donnant, à l'une, une mission de formation accrue et, à l'autre, une véritable mission de gestion des emplois publics, depuis l'organisation des concours jusqu'au départ à la retraite des agents. Je tiens à vous en remercier. Il en résulte également une plus grande clarification au service de nos élus.
Vous le savez comme moi, la vie est une formation permanente, toujours inachevée et, là aussi, le projet de loi prévoit une évolution essentielle. Le dispositif portant sur la formation tout au long de la vie et sur le droit individuel à la formation est indiscutablement une avancée positive.
De la même manière, la reconnaissance de l'expérience professionnelle et la validation des acquis de l'expérience apportent des réponses concrètes aux besoins des agents territoriaux, réponses déterminantes pour l'évolution de leur carrière.
L'équilibre que vous nous présentez, monsieur le ministre, est à préserver, car il est conforme aux attentes des personnels. Je suis convaincu que votre présence en tant qu'élu local au conseil régional d'auvergne n'y est pas étrangère.
Bien évidemment, cela n'empêche pas le Sénat de relayer la voix des collectivités locales, afin d'exprimer son point de vue et d'apporter les indispensables améliorations techniques ; je n'en citerai que quelques-unes.
Tout d'abord, s'agissant des transferts financiers entre le Centre national de la fonction publique territoriale et les centres de gestion, il paraîtrait sage qu'une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes soit appelée à donner son avis pour que ces transferts s'effectuent dans la plus grande transparence. C'est tout le sens de l'amendement que je présenterai sur l'article 13.
Ensuite, pour ce qui est des missions optionnelles, il serait bon de clarifier le cadre d'intervention des centres de gestion. Dans mon département, la Haute-Loire, les missions optionnelles sont très variées et rendent de très nombreux services aux collectivités, notamment aux plus petites d'entre elles.
Ces multiples services sont très appréciés des élus. C'est la raison pour laquelle il convient d'apporter une certaine souplesse à ce niveau, tout en garantissant une véritable sécurité, afin que les collectivités puissent bénéficier facilement des expertises dont elles ont besoin. Tel est le sens de l'amendement que j'ai déposé sur l'article 15 quater.
Monsieur le ministre, la mutualisation des autorisations spéciales d'absence pour origine syndicale dans les collectivités de moins de cinquante agents, prévue à l'article 25 du projet de loi, est une bonne mesure. Malheureusement, elle n'est pas financée, ce qui risque de poser de réelles difficultés dans des centres de gestion de petite taille, comme dans les départements ruraux.
À titre d'exemple, pour la Haute-Loire, cette seule mesure engendrera une dépense nouvelle de 30 000 à 40 000 euros par an, soit près de 10 % du produit des cotisations obligatoires versées par les collectivités affiliées.
Afin de limiter ce risque, l'Assemblée nationale a mis en place, à juste titre, un plafonnement des remboursements dus à ce titre par les centres de gestion. Supprimer ce plafonnement mettrait incontestablement à mal l'équilibre financier, parfois fragile, de certains de ces centres ; je pense bien entendu à ceux qui se trouvent dans les territoires ruraux.
Par ailleurs, les mesures concernant les conseils de discipline ne me paraissent vraiment pas judicieuses, car elles mettront les élus en première ligne. La présidence de ces conseils par un élu provoquera inévitablement une augmentation du nombre des recours. Un élu ne se fait jamais élire pour présider les conseils de discipline. Ce n'est pas sa mission !
Bien souvent, les dossiers présentés sont difficiles. La participation d'un professionnel du droit est donc toujours appréciable. Elle constitue une garantie non négligeable à la fois d'impartialité et de plus grande neutralité. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement sur ce sujet sur l'article 28 bis A.
En outre, le fait de faire passer toute exclusion temporaire de fonction devant le conseil de discipline engendrera une lourdeur administrative superflue, notamment pour des exclusions temporaires de fonction de trois jours.
Ces mesures, qui visent à calquer le régime disciplinaire de la fonction publique territoriale sur celui de la fonction publique de l'État, ne constitueront pas un progrès pour nos collectivités.
Parmi les 36 780 communes, certaines sont petites, voire très petites. Elles ne peuvent offrir l'ensemble des services dont les maires et les conseillers municipaux ont besoin. Dépourvues de logistique administrative, elles sont, plus que n'importe quelle autre collectivité, confrontées à de nombreux problèmes.
Ainsi les maires sont-ils soumis à une contrainte administrative excessive, source pour eux non seulement de découragement, mais aussi de renoncement. Il est important, comme vous l'avez fait avec cette initiative exemplaire, monsieur le ministre, de donner à nos collectivités plus de souplesse et une meilleure lisibilité.
Le bon sens et le pragmatisme doivent l'emporter, afin de conférer à notre système de gestion des ressources humaines la souplesse dont il a besoin. En effet, de nombreuses petites communes ne peuvent assurer une carrière complète à leurs agents. Il faut dès à présent faciliter les passerelles entre les métiers et les différentes collectivités, pour donner tout son sens au service de l'intérêt général.
Élus locaux et agents territoriaux, nous travaillons tous main dans la main pour atteindre ce si bel objectif au service du développement de nos territoires. Comme l'a si bien traduit le poète Gérard de Nerval : « L'expérience de chacun est le trésor de tous. »
J'ajouterai enfin que nous apprécions tous le réalisme qu'apportent à notre débat l'expérience et les grandes compétences de notre rapporteur, Mme Jacqueline Gourault.