Intervention de Brice Hortefeux

Réunion du 8 décembre 2005 à 21h45
Loi de finances pour 2006 — Administration générale et territoriale de l'état

Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales :

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter, au nom de Nicolas Sarkozy, les crédits que le ministère de l'intérieur consacrera en 2006 à l'administration générale et territoriale de l'État.

Je voudrais tout d'abord remercier les rapporteurs, Henri de Raincourt et José Balarello, pour le travail remarquable qu'ils ont effectué et pour leurs observations si pertinentes, dont je compte bien que nous tirerons ensemble le plus grand profit.

MM. Balarello et Cambon ont rappelé que l'administration territoriale savait se moderniser. Les téléprocédures sont aujourd'hui le quotidien des préfectures et, comme vous, monsieur Cambon, nous souhaitons que leur usage se développe davantage.

Comme vous l'indiquez, l'application ACTES, qui permet la transmission par la voie électronique des actes des collectivités locales, va améliorer le fonctionnement du contrôle de légalité dans les préfectures.

Je tiens à dire à Mme Mathon que, si les téléprocédures se développent, elles permettent également de dégager du temps pour mieux accueillir ceux qui ne peuvent pas ou ne savent pas bien les utiliser.

En outre, grâce au nouveau système d'immatriculation des véhicules, près de 60 % des 23 millions d'opérations touchant à l'immatriculation seront bientôt dématérialisées. Cela signifie très concrètement, monsieur Sueur, que nous nous avançons.

La modernisation s'applique aussi aux documents d'identité, monsieur Yung. Quelles que soient les polémiques, nous sommes convaincus que, d'ici à une décennie, tous ces documents seront sécurisés par des moyens biométriques. C'est là une nécessité impérieuse, particulièrement face aux risques de fraude et aux coûts - pas seulement financiers, d'ailleurs - que cette fraude engendre.

C'est aussi une exigence de sécurité que nous devons aux Français.

Déjà, le visa biométrique est en cours de mise en oeuvre dans les consulats et au sein de la police aux frontières, nous l'avons évoqué mardi devant la Haute Assemblée lors de l'examen des crédits de la mission « Sécurité ».

Notre objectif est qu'il en soit de même dans les plus brefs délais pour les passeports électroniques. Toutefois, comme vous le savez, la procédure destinée à attribuer le marché de personnalisation des passeports électroniques a été provisoirement suspendue par le juge administratif. Le Gouvernement explore cependant toutes les voies permettant de reprendre cette procédure et d'aboutir très rapidement à la production de ces passeports.

Je tiens à vous apporter des précisions sur ce dossier, qui provoque une vive inquiétude parmi les salariés de l'Imprimerie nationale et la population du douaisis.

Tout d'abord, ce projet résulte d'obligations internationales, notamment de la décision américaine d'exiger à compter du 26 octobre 2005 que les passeports produits après cette date soient sécurisés, l'absence de sécurisation se traduisant par l'obligation d'obtenir un visa, y compris pour les passagers en transit.

Le ministère de l'intérieur a donc organisé, dans le respect du code des marchés publics, une consultation en vue de la production de tels passeports. Dans le cadre de cette consultation, l'Imprimerie nationale n'a pas été retenue par le comité d'experts chargé d'analyser les offres.

Pour autant, le plan de charge de l'entreprise n'est pas compromis, puisque celle-ci conserve, exactement comme aujourd'hui, la production des livrets vierges de ces passeports. Or leur nombre va augmenter mécaniquement avec le nombre de renouvellements, et le chiffre d'affaires associé augmentera également, puisque les documents vierges seront plus complexes, et que leur coût sera donc plus élevé. Il n'y a donc aucune menace, ni sur l'activité ni sur le chiffres d'affaires.

Le passeport électronique constitue la première étape d'une modernisation plus globale des titres d'identité.

Des éléments de biométrie seront, à terme, introduits dans la carte nationale d'identité, selon des modalités juridiques et financières qui doivent être précisées. Il est encore trop tôt, monsieur Yung, pour développer ces différents points. Mais, comme nous l'avons fait par le passé, ces modalités, notamment techniques, seront publiquement et longuement débattues.

Le prix du futur contrat dépendra du schéma qui sera retenu ; nous n'avons donc prévu à ce stade que des études.

La modernisation de l'État passe aussi, vous l'avez noté, monsieur Balarello, par le développement du vote électronique, en espérant que ce moyen constitue une réponse à l'abstention.

Après l'expérience de vote par Internet menée en 2003 pour le Conseil supérieur des Français de l'étranger, deux nouvelles expérimentations ont été conduites, d'abord pour les élections aux chambres de commerce, puis pour certains conseils d'université.

Un appel d'offres a également été lancé pour la fourniture en 2006 d'un système de vote par Internet applicable à l'élection de l'Assemblée des Français de l'étranger dans la zone Europe-Asie-Levant.

La prochaine étape concerne l'extension du vote électronique à des élections politiques. Pour cela, nous sommes en train de nous assurer de l'inviolabilité des réseaux et du respect du caractère personnel du vote, qui est évidemment indispensable.

Monsieur de Raincourt, madame Mathon, vous avez évoqué la question du transfert de l'ordonnancement des dépenses vers les juridictions judiciaires. Je vais donc vous livrer sur ce point quelques réflexions qui me tiennent à coeur.

Premièrement, comme vous l'avez indiqué, le transfert des dépenses des tribunaux n'allégera que de manière très marginale la charge de travail des préfectures, puisqu'elles auront aussi à gérer toutes les dépenses d'autres ministères dont la gestion leur a été confiée. Elles ne peuvent donc pas rendre d'emplois à ce titre, et ce transfert sera en réalité facteur de surcoûts et non d'économies. Je le déplore, mais je constate qu'il s'est fait à la demande du ministère de la justice, qui n'avait alors demandé aucun transfert d'emplois.

Vous proposez, monsieur de Raincourt, une mission de contrôle budgétaire sur les moyens de fonctionnement dans les préfectures et les sous-préfectures. C'est une démarche intéressante, et vous pouvez compter sur notre entier soutien.

Je signale toutefois que, pour 2006, le ministre d'État a fait le choix, comme les années précédentes, de reconduire les crédits de fonctionnement des préfectures. En effet, le principe de la LOLF - et de la globalisation des préfectures avant elle - est de laisser aux préfets une autonomie dans la gestion de leurs crédits, notamment entre le fonctionnement et l'investissement. Les finances publiques s'en sont jusque ici plutôt bien portées, mais nous étudierons avec intérêt les propositions que vous serez amenées à formuler.

S'agissant des indicateurs de performance, que MM. les rapporteurs ont étudiés avec beaucoup d'attention, je souhaite faire quelques observations.

Tout d'abord, je veux rappeler que les préfectures ont été les précurseurs d'une gestion construite selon les principes qui se généralisent aujourd'hui dans le cadre de la LOLF.

Il faut donc songer à rendre un hommage appuyé à la capacité d'adaptation des personnels des préfectures, qui n'ont pas craint d'ouvrir la voie et qui ont vu leurs efforts récompensés.

Les marges de manoeuvre significatives qui ont été dégagées ont pu être attribuées à la reconnaissance des mérites des agents, mais aussi à l'amélioration de l'outil de travail et de l'accueil du public.

J'associe à cet hommage les membres du corps préfectoral, que vous avez eu raison, monsieur Cambon, de saluer. Eux aussi ont su évoluer pour mieux servir les Français, tout en conservant les qualités d'efficacité, de disponibilité et d'initiative que chacun s'accorde à leur reconnaître.

À cet égard, les sous-préfectures, madame Mathon, sont l'indispensable échelon de proximité de l'État, et elles ne sont aucunement menacées.

Quant à l'indépendance des préfets - ou plus exactement de l'un d'entre eux -, rien ne vous autorise, monsieur Sueur, à la mettre en doute. Vous nous faites là un mauvais procès d'intention, et je suis curieux de connaître les mesures que vous aviez vous-même prises, lorsque vous étiez membre du Gouvernement, vis-à-vis du préfet du département dans lequel vous exerciez des responsabilités électives. Je serais très intéressé de connaître le fruit de vos réflexions et de vos méditations à ce sujet !

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