Si rien n'est fait, nombre de Calédoniens auront le sentiment que les accords passés sont remis en cause et que l'État n'a respecté ni sa signature ni l'engagement qu'il a pris en 1999 de conduire cette réforme jusqu'à son terme. Ce serait mettre en péril l'équilibre qui a permis à la Nouvelle-Calédonie de retrouver une paix civile, qui reste néanmoins encore fragile.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'invite chacun d'entre vous à peser les conséquences de son vote et à ne pas négliger les leçons du passé. Ce qui a été accompli en Nouvelle-Calédonie depuis vingt ans est grand ; ce qui reste à faire est plus grand encore.
Les institutions issues de l'accord de Nouméa sont à l'évidence le fruit d'un compromis. Il faut les faire vivre, en s'attachant à lever les ambiguïtés qui sont la source de problèmes et de tensions. Ce projet de loi constitutionnelle contribuera largement, par son adoption, à faire disparaître la dernière équivoque qui subsiste dans l'application des accords de Nouméa.
J'entends les objections et je conçois les réticences de certains. Je leur affirme qu'ils sortiront grandis de s'être élevés au-delà de considérations particulières pour embrasser l'intérêt général.
L'avenir de la Nouvelle-Calédonie dépend à nouveau de notre faculté à nous réunir pour que les plaies se referment et pour que cette collectivité territoriale poursuive le chemin qui est le sien dans le cadre de la République.
La Haute Assemblée a toujours exprimé une sensibilité particulière pour l'outre-mer de la République. L'avenir de la Nouvelle-Calédonie est une question que le Sénat a toujours su aborder avec hauteur de vue et mise en perspective.
Je connais l'attachement du plus grand nombre d'entre vous à ce que l'avenir de la Nouvelle-Calédonie s'accomplisse dans la République, et d'abord celui de Simon Loueckhote, qui est un ami. Qu'il me soit permis à cette tribune de rappeler que j'étais moi-même le benjamin de l'Assemblée nationale lorsque Simon Loueckhote était celui du Sénat ; nous nous connaissons et nous nous parlons depuis longtemps. Je connais sa conviction et je la respecte, car elle est estimable.
La raison supérieure du respect de la parole donnée est l'un des éléments qui créent les conditions d'un destin apaisé en Nouvelle-Calédonie. Celui-ci sera défini et décidé par les Calédoniens, et par eux seuls ; il pourra se poursuivre, le moment venu, au sein de la République. Mesdames, messieurs les sénateurs, rien de ce que vous déciderez aujourd'hui ne s'oppose à cet équilibre entre le maintien du consensus et le choix des Calédoniens à construire leur propre avenir.
Le Chef de l'État s'était engagé à ce que cette question soit traitée avant la fin de ce quinquennat. Le Gouvernement tient aujourd'hui, devant vous, cet engagement solennel.
C'est notre devoir, et c'est ma responsabilité en tant que ministre de l'outre-mer.
C'est donc avec beaucoup de conviction et une grande espérance pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie que je vous invite à adopter conforme ce projet de loi constitutionnelle.