Monsieur le ministre, l'exposé des motifs de votre projet de loi indique que l'article 1er est « un article technique, aménageant la structure du CESEDA ». Cet article tend à créer deux sections au sein du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'une étant relative aux titres de séjour et l'autre aux conditions d'intégration dans la société française.
Certes, cet article se présente comme un simple aménagement technique, mais il est beaucoup plus à mon sens : il est le symbole de votre conception de l'immigration et, plus largement, de votre conception utilitariste de l'homme.
Vous avez choisi de durcir considérablement les critères d'obtention des titres de séjour en les subordonnant à l'obtention d'un visa long séjour. Pourtant, vous savez que nos consulats sont déjà submergés et qu'ils ne seront pas en mesure de délivrer ces visas. Comme votre gouvernement le fait depuis quatre ans avec les salariés, vous avez aussi décidé de précariser systématiquement les étrangers, en mettant fin aux délivrances de plein droit de titres de séjour et en prévoyant la possibilité pour l'administration de retirer un titre de séjour si les critères ne sont plus remplis.
Il est inacceptable que vous mettiez ainsi les étrangers à l'index. Mais il est également insupportable que vous opériez une discrimination entre les immigrés : seuls les étrangers venus pour travailler vous intéressent et, parmi eux, vous désignez une catégorie de privilégiés, ceux qui pourront obtenir la carte de séjour « compétences et talents ».
Cette mesure est significative de ce qu'est l'homme pour vous et votre majorité, c'est-à-dire une ressource économique comme une autre. Elle est aussi le symbole de vos choix : vous préférez piller les compétences et les talents des pays pauvres, plutôt que développer ceux des Français et des étrangers qui se trouvent sur notre territoire.
Votre traitement de la question de l'immigration ne me semble pas digne. D'un côté, vous continuez à stigmatiser l'étranger et à en faire le bouc émissaire des problèmes de notre société. De l'autre, vous prétendez doter la France de ce que vous nommez une politique d'immigration choisie, qui consiste en fait à subordonner les droits de l'étranger à sa rentabilité économique et à poursuivre le pillage des ressources humaines des pays en voie de développement.
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste demande la suppression de cet article.