Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 16 novembre 2007 à 10h00
Financement de la sécurité sociale pour 2008 — Article 42

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre :

Monsieur le président, il n'est pas inutile, à ce point de notre débat, de revenir aux fondamentaux. Cela me permettra de répondre à Mme Le Texier, à M. Fischer et d'expliquer la philosophie de ce très important article 42, relatif au passage à 100 % de la T2A. Ces explications me dispenseront d'expliciter les avis, favorables ou défavorables, que j'émettrai sur les autres amendements.

L'article 42 a deux objets consubstantiellement liés : le passage à la tarification à l'activité à 100 % et le maintien et la précision du cadre de la convergence tarifaire intersectorielle.

La convergence tarifaire intersectorielle implique à terme une identité des tarifs « dans la limite des écarts justifiés par des différences dans la nature des charges couvertes par ces tarifs ». Cette convergence doit s'effectuer vers les tarifs des cliniques privées, ainsi que le précise le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

La baisse des tarifs est un exercice qui peut paraître aisé, un simple arrêté suffit et fait apparaître une réduction de la dépense d'assurance maladie. Cependant, ce n'est pas si simple. Il faut parvenir à réduire progressivement les coûts hospitaliers et ajuster les tarifs en conséquence. Sinon, nous serons confrontés à une dégradation de la situation financière des établissements de santé.

La maîtrise des coûts des établissements du secteur public implique différents moyens d'action. Il s'agit d'abord de l'organisation territoriale. Le processus de réexamen de l'offre de soins doit se poursuivre avant tout - et c'est la politique que je défends -, pour des raisons de qualité des soins et de sécurité sanitaire.

La commission sur les missions de l'hôpital, présidée par M. Gérard Larcher - et ce n'est pas pour rien que cette mission a été confiée à un sénateur - doit, d'ici à la fin du mois, achever de dresser un état des lieux de la situation actuelle de l'hôpital. Après une période de large concertation, des propositions seront faites au Gouvernement au printemps prochain. J'en attends une contribution essentielle pour le recentrage de l'hôpital sur ses missions essentielles.

La mise en place des agences régionales de santé, les ARS, amplifiera et renforcera le dispositif de pilotage sur le plan régional. Le Gouvernement reviendra au cours de l'année 2008 devant la représentation nationale pour traiter ce sujet qui est actuellement dans une phase de concertation.

Comme vous pouvez le constater, les chantiers de réorganisation sont nombreux et structurels.

La maîtrise des coûts à l'hôpital passe en premier lieu par le retour à l'équilibre des établissements en situation de déficit. M. le rapporteur a déposé un amendement très constructif concernant les contrats de retour à l'équilibre financier des établissements du secteur public en articulant mieux plan de redressement et contractualisation avec les agences régionales de l'hospitalisation, les ARH. Il ne faut pas que les hôpitaux soient mis dans une situation où les déficits récurrents sont toujours, in fine, compensés, sans véritable plan de retour à l'équilibre. Cette pratique peu convenable fait pourtant l'objet d'un certain nombre de démarches, parfois d'origine parlementaire. Inutile de vous dire qu'elle est contraire à ma vision de la responsabilité.

La mise en place de la tarification à 100 % accélérera la restructuration hospitalière. La totalité des ressources finançant les activités de médecine, de chirurgie et d'obstétrique, dites MCO, seront proportionnelles à l'activité réelle des établissements. Cela impliquera des efforts d'adaptation pour un certain nombre d'établissements. C'est la raison pour laquelle, M. le rapporteur l'a rappelé, un mécanisme de transition est prévu à travers les coefficients de transition.

Il convient également de s'interroger sur le cadre de gestion de l'hôpital, tant en termes de gouvernance, de règles comptables que de ressources humaines. J'attends là encore les propositions de la commission présidée par M. Gérard Larcher sur les missions de l'hôpital.

L'article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 sur les groupements de coopération sanitaire, les CGS, par le renforcement du cadre des coopérations entre établissements, contribuera à une amélioration de leur efficience.

Nous avons examiné, cette nuit, l'article 40 et les moyens du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP, qui assure actuellement le financement de la Mission nationale d'appui à l'investissement hospitalier, la MAINH, et de la Mission nationale d'expertise et d'audit hospitalier, la MEAH.

Je vous annonce mon intention de clarifier dès 2008 leur situation administrative et comptable, et vous avez constaté que je vous ai proposé des dispositions en ce sens.

Le plan Hôpital 2012, avec un programme de 10 milliards d'euros d'investissements hospitaliers, dont 5 milliards financés par l'assurance maladie et 2 milliards par des prêts de la Caisse des dépôts et consignations à des taux préférentiels, est animé par la volonté de recherche d'efficience afin que ces moyens financiers contribuent efficacement à l'amélioration de l'organisation de l'offre de soins.

En ce qui concerne la mise en oeuvre de la convergence tarifaire intersectorielle, je voudrais évoquer quelques points.

Il s'agit là d'un processus qui est difficile, bien sûr, parce qu'il met en évidence ce qui fait la richesse, mais également la diversité et la complexité de notre offre de soins hospitalière.

La difficulté de l'exercice tient à ce que les établissements de santé sont, en termes d'activité, de statut, d'obligations et de santé financières, dans des situations différentes et que cette diversité n'oppose pas seulement les secteurs public et privé, mais vaut également au sein de chaque secteur : même le secteur public n'est pas homogène.

Les tarifs que nous comparons, ceux du secteur public et ceux du secteur privé, se caractérisent par un écart apparent important. Comment, dans ces conditions, parvenir à ce que, pour une prestation donnée, les prix payés, à savoir le tarif pour l'hospitalisation et, le cas échéant, la rémunération du professionnel de santé, soient les mêmes ? D'ailleurs, le prix à retenir est-il celui qui est à la charge de l'assurance maladie ou bien celui qui est à la charge de l'assurance maladie et du patient, ou de sa mutuelle complémentaire ? J'évoque ce point devant vous parce qu'au-delà de l'identification du prix se pose la question de l'accès de tous aux soins.

Je voudrais également souligner que l'écart est très variable d'un tarif à l'autre. Les tarifs des deux secteurs sont différents parce qu'ils reposent sur des logiques historiques différentes, que je ne vous ferai pas l'injure de rappeler.

Compte tenu de cette complexité, des travaux ont été engagés dans deux domaines. D'une part, une étude nationale de coûts, avec une méthodologie commune aux établissements publics et privés, est en cours de réalisation sur les coûts de 2007 d'un échantillon d'une centaine d'établissements ; ses résultats seront disponibles en 2008. D'autre part, des études complémentaires doivent porter sur les principaux paramètres de coût des établissements, en premier lieu sur les charges de personnel.

Sans vouloir préjuger le résultat de ces travaux, j'ai pour ambition que nous parvenions à ajuster le modèle de financement actuel en identifiant au sein des tarifs ce qui relève d'obligations spécifiques, telles les obligations de permanence.

Deux options sont concevables : soit on fixe des éléments tarifaires correspondant à ces spécificités, et n'y seront éligibles que les établissements, publics ou privés, assumant celles-ci ; soit on assure un financement sous forme de dotation au titre des missions d'intérêt général, les fameuses MIG.

À l'inverse, il faudra se demander si certaines activités n'auraient pas vocation à être durablement financées par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et si l'outil tarifaire ne serait pas davantage adapté. Je vous rendrai compte à l'automne prochain des évolutions prévues.

Dès 2008, les nouvelles prestations qui seront créées le seront à tarifs identiques.

Vous le constatez, la tâche à accomplir est de grande ampleur. Elle nécessitera la mobilisation de tous : de mes services, des ARH avec le concours de l'assurance maladie, des dirigeants et des personnels médicaux et non médicaux des établissements. J'entends également que les fédérations représentatives des établissements de santé soient associées aux travaux.

J'indiquerai pour conclure que, bien évidemment, ces réformes se font non pas contre, mais pour les acteurs du système de soins.

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