Je donnerai d'abord l'avis de la commission sur les trois amendements identiques n° 92 rectifié bis, 97 rectifié bis et 230 rectifié bis, qui tendent à supprimer l'article 46.
Les auteurs de ces amendements donnent plusieurs motifs pour justifier leur demande de suppression du dispositif. Pour ma part, sans préconiser une telle suppression, j'avais émis, dans mon rapport, une double réserve sur cet article.
Ma première réserve avait trait au fait que les actions de prévention et l'information sur la contraception doivent être renforcées. Il semble en effet incompréhensible que l'on puisse pratiquer aujourd'hui encore autant d'avortements alors que des méthodes contraceptives existent. Pourquoi en sommes-nous encore là ? Il n'est pas acceptable que, depuis le vote de la loi Veil, le nombre annuel d'avortements soit resté stable, autour de 220 000.
Ma seconde réserve portait sur les études postérieures à l'autorisation de mise sur le marché des médicaments. Elles doivent être engagées en vue d'améliorer les connaissances sur les effets secondaires des IVG par voie médicamenteuse.
Le dispositif présenté vise à améliorer l'accès à cette technique d'avortement, qui reste moins invasive et moins traumatisante que la méthode chirurgicale.
Les centres de planning familial sont en effet identifiés par les femmes, notamment les plus vulnérables d'entre elles et les mineures, comme des lieux de prescription de moyens contraceptifs, de dépistage et de traitement des maladies sexuellement transmissibles.
Ils sont également chargés, comme l'a rappelé tout à l'heure Mme la ministre en répondant aux intervenants sur l'article, d'orienter les femmes qui souhaitent avorter vers un établissement de santé ou un médecin libéral conventionné autorisé à pratiquer les IVG.
J'indique, à la suite de Mme la ministre, que plusieurs garanties sont prévues : l'acte ne pourra être effectué que par un médecin et dans les six premières semaines de la grossesse.
À cet égard, je souligne que les médecins des centres de planification familiale et d'éducation familiale pratiquent déjà le plus souvent des IVG, à titre libéral ou dans un établissement de santé, comme l'a dit M. Sido. Les médecins pourront toujours invoquer la clause de conscience pour refuser de pratiquer l'IVG.
Enfin, les centres précités qui souhaiteront prescrire des IVG par voie médicamenteuse devront, comme les médecins libéraux, passer une convention avec un établissement de santé.
S'agissant du financement de cette mesure, je rappelle que les départements ne seront pas mis à contribution. Mme le ministre l'a expliqué tout à l'heure avec moult détails.
Toutefois, il me semble légitime que certains d'entre nos collègues puissent s'interroger sur le bien-fondé d'élargir l'accès à l'IVG par voie médicamenteuse dans le cadre des centres de planning familial. Se pose notamment la question du suivi des femmes après l'avortement. À cet égard, Mme le ministre a rappelé les cinq rendez-vous qui sont prévus, dont deux concernent le suivi.
Bruno Sido, parmi d'autres, a posé la question de la responsabilité juridique éventuelle, pénale comme civile, du président du conseil général en cas de difficultés. Sur ce point, il serait bien, madame le ministre, que vous éclairiez notre collègue afin d'apaiser éventuellement ses inquiétudes.
Mes chers collègues, vous comprendrez donc que, après avoir pris connaissance des explications complémentaires que Mme la ministre nous apportera, la commission des affaires sociales s'en remette à la sagesse de notre assemblée.
Je souhaiterais que nous évitions, dans la mesure du possible, de déplacer la discussion sur les questions de principe. Tenons-nous en à l'objet de l'article puisque l'IVG médicamenteuse est pratiquée, je le rappelle, depuis les années 1980, même si on peut le regretter et désapprouver cette technique.
Mais ce n'est pas en supprimant l'avortement par voie médicamenteuse dans les centres de planning familial que l'on réglera pour autant le problème de fond. Ce débat est peut-être une opportunité pour certains de rappeler quelles sont leurs convictions sur le sujet de l'IVG, mais il ne doit en aucun cas servir à remettre en cause ce droit.
Comme Mme la ministre l'a rappelé, le centre de planning familial me paraît présenter des garanties supérieures, sur le plan médical comme en termes de suivi des patientes, à celles qu'offre la pratique actuelle par un médecin libéral, même si ce dernier a signé une convention avec un établissement de santé.
En revanche, sur les problèmes juridiques, je souhaite que Mme la ministre apporte les éclaircissements nécessaires avant que nous ne nous prononcions, mes chers collègues.
Les amendements n° 133 et 353, quant à eux, visent à étendre aux centres de santé municipaux et mutualistes l'autorisation de pratiquer les IVG médicamenteuses.
La commission des affaires sociales n'est pas opposée au principe de cette extension dès lors que le Sénat choisit de maintenir le dispositif de l'article 46. Toutefois, dans la mesure où les médecins des centres de planning familial pourront prescrire des IVG, l'objectif de faciliter l'accès des femmes les plus vulnérables à cette technique sera déjà atteint. En effet, ces centres, qui sont implantés le plus souvent dans les quartiers dans lesquels l'accès aux soins n'est pas toujours aisé, reçoivent les femmes en situation difficile.
Avant de terminer, il me reste à vous dire, mes chers collègues, que c'est l'avis de la commission des affaires sociales que je viens d'exprimer, en tant que rapporteur, et non mon opinion personnelle sur le sujet.