Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du 16 novembre 2007 à 15h15
Financement de la sécurité sociale pour 2008 — Article 46

Photo de Jean-Luc MélenchonJean-Luc Mélenchon :

Pourtant, nous acceptons tous de le prendre.

Des arguments d'ordre financier ont également été avancés, auxquels il a été répondu. En fait, nous avons bien compris que c'était le moyen de ne pas entamer le débat de fond, qui a tout son intérêt, toute sa légitimité, toute sa noblesse, et que le Sénat s'est toujours honoré de mener.

Les termes de ce débat ont été posés de manière très claire par Bernard Seillier. Je profite de cette occasion pour lui dire combien je respecte la ferveur et la constance de son engagement philosophique, parce qu'il fait écho en quelque sorte, quoiqu'en sens opposé, à cette même passion qui m'anime. Je m'empresse de dire que ces arguments sont respectables, parce qu'ils sont ceux de M. Seillier, que nous connaissons et qui a pris la précaution de condamner dans son intervention les excès auxquels certains se livrent. Faut-il rappeler les violences commises par certains comités pro-vie, qui, j'espère, seront punies ?

Pour ma part, je n'entends pas biaiser devant les arguments de M. Seillier ou de Mme Hermange, qui, à la fin de son intervention, a elle aussi fait référence à des principes ; à défaut de quoi, le propos serait déséquilibré.

Voyez-vous, mes chers collègues, vous ne trouverez pas un seul partisan de l'avortement sur ces travées. Nous ne sommes pas des partisans de l'avortement et nous ne l'avons jamais été. Nous sommes partisans du droit à l'avortement, ce qui est très différent. Le droit à l'avortement, c'est poser comme fondement la liberté et l'objectif de la liberté, car, dans la génération, les rôles ne sont pas répartis de la même manière. Autant les hommes peuvent se soustraire aux conséquences de leurs actes, autant les femmes ne le peuvent pas. La frontière de la liberté, c'est celle qui nous permet de repousser celle du déterminisme. Là où recule la détermination et où progresse le libre choix de la personne, avancent la liberté et l'identité humaine elle-même. Nous sommes des êtres humains pour autant que nous sommes des êtres libres par rapport aux déterminations qui nous accablent ou nous jugulent.

C'est pourquoi ce n'est pas une question secondaire que celle qui consiste à dire que, dans une matière où il est évident que la détermination joue à plein, nous créons la liberté et nous cherchons tous les moyens qui sont à notre disposition pour permettre à chacun d'y accéder.

Madame Payet, nous ne sommes pas d'ardents militants de l'avortement, nous sommes d'ardents partisans de la liberté et de la dignité de la personne. Ce n'est pas pareil !

Pourquoi cette liberté s'applique-t-elle particulièrement au cas que nous évoquons ? Il faut dire les choses comme elles sont : la génération est une aptitude et non un destin. De cette aptitude, il faut pouvoir décider librement. Voilà pourquoi nous sommes si sourcilleux. Peut-être le sommes-nous trop aux yeux de certains d'entre vous, mais vous non plus n'avez pas manqué une occasion de relancer le débat. Après tout, nous ne devrions pas avoir cette discussion à partir de l'examen d'un point aussi technique, aussi mineur que cette nouvelle possibilité d'accès à l'IVG.

Si vous êtes vigilants, nous le sommes également. Nous le sommes parce que nous observons dans le monde entier le développement d'un mouvement qui n'utilise pas les voies courtoises, parlementaires et démocratiques auxquelles vous-mêmes avez recours pour nous convaincre, mais qui emprunte des voies beaucoup plus musclées. Dans nombre de pays, ce n'est pas par la raison qu'on convainc les femmes de ne pas avorter, c'est par la contrainte de la loi et la menace du châtiment, et ce sont elles qui sont toujours visées.

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