Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'heure où la France fait son retour en Europe, je suis heureuse de venir présenter devant vous un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans les domaines économique et financier.
Ce texte nous permettra non seulement de transposer plusieurs directives dont les délais arrivent à échéance, mais également de nous mettre en conformité avec le droit européen, en tirant les conséquences dans notre droit interne de règlements déjà en vigueur.
La meilleure preuve de notre attachement à l'Europe et au droit européen, c'est tout simplement de respecter ses règles. On ne peut pas, d'un côté, faire de grands discours sur la construction européenne et, de l'autre, prendre de mauvaises habitudes. Si nous voulons que nos concitoyens respectent l'État français comme un État de droit, celui-ci se doit de montrer l'exemple. Voilà pourquoi nous avons déclaré l'urgence sur ce texte.
L'Europe offre à la France de formidables opportunités de développement économique.
Notre projet de loi porte sur des domaines aussi divers que les assurances, la finance ou les télécommunications. On y retrouve cependant les grandes lignes du projet européen : plus de garanties pour les individus, plus de mobilité pour les personnes et une meilleure régulation pour les marchés. C'est à travers ce triple prisme que j'aimerais vous présenter ce texte.
Plus de garanties pour les individus, ce doit être une évidence pour des sociétés aussi prospères, aussi libres, en un mot aussi civilisées, que les nôtres. Qu'est-ce que l'Europe, sinon la patrie des individus ?
On consomme aujourd'hui, on épargne pour demain et on s'assure pour après-demain. Nous allons renforcer sur ces trois plans les garanties déjà existantes.
L'article 10 du projet de loi, en adaptant le code de la consommation aux exigences du règlement communautaire 2006/2004/CE, va permettre aux services de l'État d'agir davantage dans l'intérêt des consommateurs, en mettant en oeuvre leurs pouvoirs d'injonction et d'action en cessation devant la juridiction civile, quand bien même aucune sanction pénale n'est prévue par la loi.
La France, première destination touristique au monde, aura les moyens de coopérer pleinement avec les autres États membres de l'Union européenne pour faire cesser les pratiques illicites, notamment en matière de publicité mensongère, de forme et de reconduction des contrats, de garantie des produits, et de clauses abusives.
Je vais vous donner un exemple. Des consommateurs français ont acheté des meubles sur Internet à un antiquaire anglais, qui a encaissé l'argent mais n'a pas délivré la marchandise. Désormais, ces consommateurs pourront s'adresser directement à la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, qui se mettra alors en relation avec son homologue britannique. La réciproque est bien sûr vraie, par exemple pour des touristes de l'Union européenne qui seraient victimes d'une escroquerie en France.
Plus largement, l'article 10 donne davantage de moyens à la DGCCRF pour remplir ses missions. Dans le domaine de l'immobilier, si sensible pour beaucoup de nos concitoyens, ce sont les professionnels eux-mêmes qui ont demandé un renforcement des procédures de contrôle, afin d'assainir leur réputation qui est, selon eux, quelquefois entachée. Les agents de la DGCCRF pourront demander, à tout moment, la carte professionnelle des agents immobiliers, et vérifier que les propriétaires leur ont bien octroyé un mandat en bonne et due forme pour chaque bien mis en vente.
Ce qu'on ne consomme pas aujourd'hui, on pense bien souvent à le mettre de côté pour demain. Voilà pourquoi l'article 6 vise à supprimer toute base légale à la non-rémunération des dépôts. Certes, un arrêté du 8 mars 2005 a déjà tiré les conséquences de la jurisprudence communautaire qui a prohibé le principe de la non-rémunération des comptes courants. Mais la Commission européenne a confirmé dans un avis récent que la France ne doit pas se contenter de cet arrêté mais doit aller plus loin en inscrivant dans la loi le principe selon lequel la rémunération des comptes courants ne peut être interdite.
Désormais, le droit rejoindra la pratique. Les banques pourront proposer à leurs clients de rémunérer leurs comptes courants conformément aux nouvelles dispositions législatives.
Chacun et chacune d'entre nous consacre une partie de ses revenus à s'assurer contre les risques à venir. En transposant l'article 5 de la directive 2004/113/CE, dite « directive homme-femme », l'article 9 de ce projet de loi rappelle ainsi le principe de non-discrimination en fonction du sexe dans le domaine des assurances.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne vous détaillerai pas les différences existant irrémédiablement entre les hommes et les femmes, que la loi ne saurait abolir. Elles justifient en tout cas d'inscrire dans notre droit la possibilité qu'ont les assureurs de proposer des contrats distincts aux représentants des deux sexes. C'est une pratique tarifaire courante dans notre pays, que partagent d'autres États membres de l'Union, comme l'Allemagne ou le Royaume-Uni. Bien entendu, il n'est pas question d'en faire une obligation : les assureurs restent libres de leur choix en ce domaine, et peuvent décider de n'exercer aucune discrimination.
Les différenciations objectives entre les deux sexes s'appuient sur des critères statistiques. Par exemple, si la prime d'assurance décès peut être moins chère pour les femmes, c'est parce que, statistiquement, elles vivent plus longtemps que les hommes. Autre exemple : si la prime d'assurance automobile peut être plus élevée pour les hommes, c'est parce que les accidents qui les concernent sont en moyenne plus graves que ceux des femmes.
Vous le constatez, il y a des injustices de nature dont il est juste que les assureurs puissent tenir compte.