Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 11 octobre 2007 à 15h00
Droit communautaire dans les domaines économique et financier — Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

Christine Lagarde, ministre :

Plus de mobilité pour les personnes, c'est sans doute pour nos concitoyens la traduction la plus évidente du projet européen. Elle implique de pouvoir se déplacer sans inconvénients, travailler à l'étranger dans de bonnes conditions et bien sûr, communiquer à des prix raisonnables d'un pays à l'autre.

Se déplacer, ce n'est pas seulement franchir des frontières. C'est aussi pouvoir bénéficier des mêmes services sur l'ensemble du territoire européen. Voilà pourquoi l'article 1er de notre projet de loi achève la transposition de la directive 2005/14/CE relative à l'assurance des véhicules automobiles. Un assureur ne pourra plus désormais résilier un contrat de responsabilité civile automobile ou modifier la prime correspondante au motif que le véhicule séjourne, pendant la durée du contrat, dans un autre État membre.

Travailler à l'étranger, c'est possible depuis longtemps. Les diplômes et l'expérience professionnelle sont reconnus partout en Europe.

Mais à l'heure actuelle, ce ne sont pas moins de quinze directives différentes qui assurent la reconnaissance des qualifications professionnelles.

L'article 5 du projet de loi habilite donc le Gouvernement à transposer la directive 2005/36/CE, qui harmonise et simplifie tous les textes précédents. Grâce à quelques aménagements mineurs, ce sont plus de cent professions, couvrant tous les secteurs d'activité, qui relèveront désormais de la même base juridique et pourront être reconnues dans n'importe quel pays membre. Aussi la circulation des personnes qualifiées en Europe deviendra-t-elle à la fois plus simple pour les citoyens et plus sûre pour les États.

La nouvelle directive a également l'intérêt d'organiser la libre prestation de services à l'échelon européen.

Pour téléphoner d'un pays européen à l'autre sans se ruiner, le règlement (CE) 717/2007 du 27 juin dernier impose déjà aux opérateurs de téléphonie mobile des plafonds tarifaires. Mais ce règlement ne s'applique pas au sein d'un même pays, alors que plusieurs milliers de kilomètres peuvent séparer les territoires ultramarins de la métropole, faisant considérablement augmenter les factures de téléphone portable. Par exemple, un Roumain en vacances en Martinique paye aujourd'hui ses appels vers Paris moins cher qu'un commerçant nantais venu pour affaires !

Afin de remédier à cette situation pour le moins paradoxale, les articles 3 et 4 du projet de loi étendent la portée des plafonds tarifaires à l'itinérance entre la métropole et l'outre-mer.

Une meilleure régulation pour les marchés, c'est peut-être la tâche la plus urgente des gouvernements européens. Je tire deux grandes leçons de la crise financière - ou des turbulences financières, selon la formulation que l'on souhaite employer - de cet été, qui vous sembleront au premier abord contradictoires.

Première leçon, notre place financière a montré ses atouts, en résistant mieux que d'autres. Les efforts de sécurité et de stabilité que nous avons menés se sont révélés payants. Ce qui prouve que la régulation n'entrave pas le bon fonctionnement du marché, mais que, au contraire, sur des marchés aussi sophistiqués que les marchés financiers, elle peut s'avérer extrêmement favorable.

Seconde leçon, les turbulences n'ont épargné personne. Aucune réglementation, aucun barrage, aucune frontière ne met aujourd'hui un pays à l'abri, d'autant qu'elles se propagent rapidement, en particulier par la voie des nouvelles technologies.

Ce paradoxe apparent entre la capacité de résistance qui découle d'une bonne régulation et la potentielle diffusion internationale de la crise s'évanouit si l'on considère que la régulation est par nature transnationale. Pour être bien protégé, il faut s'ouvrir à ces mécanismes de régulation. Pour tirer son épingle du jeu, il faut jouer à plusieurs.

Notre politique de régulation doit donc reposer sur trois piliers : l'intégration des marchés, la transparence des transactions et la compétitivité de la Place, en particulier de celle de Paris. Intégration, parce que la régulation est plus efficace sur un marché non cloisonné. Transparence, parce que la régulation doit pouvoir s'appuyer sur des informations connues de tous. Compétitivité, parce qu'une régulation intelligente et conférant un niveau suffisant de sécurité intéressera les investisseurs et les opérateurs internationaux.

Le projet de loi qui vous est soumis répond parfaitement à cette triple logique.

Plus d'intégration, d'abord : l'article 7 de notre projet de loi vient ratifier quatre ordonnances de transposition, dont celle qui concerne les marchés d'instruments financiers, mieux connue sous la dénomination MIF, et celle qui porte sur les règles prudentielles applicables au secteur bancaire, dénommée « Bâle II ».

La directive MIF améliore l'intégration des marchés européens en supprimant la possibilité pour les États membres d'édicter un principe de centralisation des ordres sur les marchés réglementés. La concurrence entre les différentes bourses européennes sera donc accrue pour permettre une meilleure négociabilité des actions ; et qui dit concurrence dit évidemment, et nous la souhaitons, réduction des frais de transaction pour les investisseurs.

La place de Paris, notamment grâce à la fusion entre NYSE et Euronext, se situe en bonne position. Nous devons y prendre garde. D'autres places européennes veillent ; nous ne sommes pas seuls.

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