Loin de se concentrer sur la finalité principale du projet, la prévention et la répression du terrorisme, cet article 6 tend à instaurer des mesures qui relèvent d'une autre finalité, à savoir la lutte contre l'immigration irrégulière.
Le Gouvernement ne manquera pas d'invoquer de nouveau la nécessité de retranscrire dans notre droit interne la directive 2004/82/CE du Conseil du 29 avril 2004 concernant l'obligation pour les transporteurs de communiquer les données relatives aux passagers en provenance des pays étrangers à l'Union européenne et le fait que cette directive permette aux États membres de faire usage des données transmises par les transporteurs à d'autres fins que la lutte contre l'immigration clandestine.
Cependant, force est de constater que le dispositif mis en place va bien au-delà de la stricte transposition de la directive précitée.
Surtout, cette transposition n'a pas sa place dans un projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme. L'objet principal de la directive est en effet la lutte contre l'immigration dite clandestine et non la lutte contre le terrorisme. S'il convient d'éviter toute surenchère en matière sécuritaire, il est également souhaitable de ne pas créer d'amalgame entre ces deux sujets.
Nous nous trouvons ici face à une disposition qui relève beaucoup plus de la police des étrangers, et on sait les effets déplorables que ne manque jamais d'avoir sur l'opinion la présentation de telles dispositions au Parlement.
Il serait bon que le Sénat, qui s'est souvent honoré, à travers les différents groupes qui le composent, dans la défense des droits de l'homme, pose un jour le problème d'une vraie politique de l'immigration. Sur toutes les travées de cette assemblée, il y a des gens qui pensent que la police des étrangers telle qu'elle se pratique depuis fort longtemps - bien avant 2001 - ne tient pas lieu de politique de l'immigration. C'est un des sujets centraux pour l'avenir de notre pays et il me semble qu'il faudrait l'aborder autrement que dans un esprit purement sécuritaire.