Je suis un peu las d'entendre sans arrêt que nous sommes du côté des terroristes sous prétexte que nous rappelons des vérités ou que nous contestons le bien fondé ou l'opportunité de telle ou telle mesure.
Pour ma part, je me permets de rappeler à la Haute Assemblée que je fus, en 1982, le premier ministre de la justice, parmi tous ceux de l'Union européenne, à demander l'institution d'un tribunal pénal international pour les terroristes internationaux. Je fus alors brocardé par tous mes collègues car, à l'époque, il ne faisait pas bon parler de ces choses. Il a fallu attendre vingt ans pour voir naître les juridictions pénales internationales !
La nature criminelle et dangereuse du terrorisme n'est pas discutable. Mais je ne cesserai jamais de dire combien il est nécessaire et indissociable pour nos démocraties à la fois de mener avec fermeté et efficacité la lutte contre le terrorisme et de veiller à la sauvegarde des libertés, faute de quoi, croyez-moi, les terroristes auront atteint leur but. (
S'agissant de vos derniers propos, monsieur le garde des sceaux, je vous réponds que nous sommes tous favorables à la centralisation. Vous avez salué, et vous avez eu raison, l'activité, le zèle et la compétence des magistrats de la section antiterroriste. Mais nous sommes là non plus au stade de l'instruction ou du jugement, mais de l'exécution de la peine.
Or, au stade de l'exécution, les terroristes sont répartis, pour des raisons de sécurité, dans un certain nombre d'établissements pénitentiaires.
Puisque nous en sommes là au niveau de l'application des peines, les personnes qui sont alors les mieux placées pour suivre ces détenus et pour apprécier ces situations sont, me semble-t-il, non pas les juges qui étudient les dossiers ou s'interrogent sur les faits mais bien plutôt les juges de l'application des peines §qui peuvent d'ailleurs consulter les magistrats de la section antiterroriste.
Vous avez choisi de faire le contraire, monsieur le garde des sceaux, et c'est votre droit. Mais ne nous dites pas que nous sommes systématiquement opposés à tout ce que vous proposez. Ce n'est pas exact !
J'ajoute - et ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre -que, lorsqu'une possible libération est envisagée, on prend en compte des éléments liés à la réinsertion et à l'évolution futures - c'est le facteur humain - d'un homme ayant abandonné les convictions qui étaient les siennes au moment où il a commencé à commettre des actions détestables à tous égards. Voilà ce qui est en question !