L'article 10 ter a été ajouté par l'Assemblée nationale, qui a cru bon de durcir encore davantage le régime de la garde à vue.
En matière de terrorisme, le régime de la garde à vue est, depuis 1986, dérogatoire au droit commun, puisque celle-ci peut être prolongée de quarante-huit heures. L'avocat, quant à lui, ne peut intervenir qu'au bout de la soixante-douzième heure, ce qui, vous en conviendrez, est un délai déjà relativement long.
Le nouvel article 10 ter se situe donc dans la logique de surenchère pénale que nous connaissons bien, puisque nous la subissons depuis près de trois ans.
Nous venons d'achever l'examen de l'article 9, qui aggrave les peines d'emprisonnement. La garde à vue pourrait ainsi durer, si l'article 10 ter était adopté, jusqu'à six jours d'affilée. L'avocat, quant à lui, ne pourrait intervenir qu'au bout de la quatre-vingt-seizième heure.
Pourquoi, dans ces conditions, ne pas interdire totalement la présence de l'avocat, ou même priver des droits de la défense une personne soupçonnée de terrorisme ? Ce n'est pas pour rien que j'ai cité tout à l'heure le cas des prisonniers de Guantanamo.
Nous savons parfaitement que le fait de réduire le droit à la présence d'un avocat au cours de la garde à vue permet d'exercer toutes sortes de pressions sur la personne gardée à vue.
Par ailleurs, les raisons pouvant justifier une telle prolongation de la garde à vue sont particulièrement vagues, et donc dangereuses pour les libertés individuelles. En effet, un risque sérieux de l'imminence d'une action terroriste en France ou à l'étranger, ou bien les nécessités de la coopération internationale, si celles-ci le requièrent impérativement, suffiraient à justifier qu'une personne soit gardée à vue pendant six jours.
Le fait que le ministre de l'intérieur indique que la menace terroriste est « réelle et accrue » sans pour autant produire d'éléments concrets suffirait-il à prolonger la garde à vue ? Le fait d'activer et de maintenir le plan Vigipirate au niveau rouge constituerait-il également une raison suffisante pour prolonger une telle mesure ?
Vous devez tout de même convenir que le risque d'action terroriste à l'étranger est quasi permanent ! Cela pourrait-il néanmoins justifier une prolongation de la garde à vue ?
Nous savons très bien que les régimes dérogatoires censés s'appliquer dans un nombre de cas restreints - en l'occurrence le terrorisme - finissent bien souvent par s'appliquer à un ensemble de plus en plus vaste d'infractions. Nous l'avons vu encore récemment avec la loi Perben II concernant la criminalité organisée. Il y a fort à parier que cette disposition s'étende à l'avenir à d'autres catégories d'infractions et que les régimes d'exception deviennent la règle.
Enfin, il conviendrait de nous faire la démonstration du fait que la prolongation de la garde à vue constitue vraiment une mesure de prévention du terrorisme.
J'indique dès à présent que le groupe CRC demande un vote par scrutin public sur cet amendement.