Intervention de Jean-Marc Pastor

Réunion du 5 février 2008 à 16h00
Organismes génétiquement modifiés — Discussion d'un projet de loi

Photo de Jean-Marc PastorJean-Marc Pastor :

Que faut-il en penser ? Sans doute le plus grand bien, mais où sont les limites de la science ? Cet exemple illustre à la fois le bénéfice éventuel de telles pratiques pour la société et les dangers qu'elles recèlent.

Comment le texte que vous nous proposez aborde-t-il ces sujets ? Je ne l'ai pas vu. Pose-t-il des jalons, des barrières ? Donne-t-il une ligne de conduite au Haut conseil ?

Il nous appartient de prévoir et de prévenir les risques, avant que la question ne se pose un jour de manière irrémédiable.

Vous nous parlez d'OGM, oui ! Avec des déplacements de gènes sur le chromosome, d'accord ! Mais la fonction ? Elle est entre les mains de qui ? Pourquoi et comment ?

Il est urgent de préciser que l'appropriation de la fonction ne peut être que publique ou, du moins, sous contrôle public, de manière à bien maîtriser ce que pourrait être une commande de la société vis-à-vis des OGM, et non pas être à la remorque d'opérateurs qui n'auraient d'autre but que leur propre profit.

Quand un semencier de ma région modifie, grâce à un gène de luzerne, une fétuque connue non seulement pour sa résistance à la sécheresse, mais aussi pour sa végétation très ligneuse, créant ainsi une nouvelle sorte de fétuque résistante à la sécheresse, mais moins ligneuse et dotée des propriétés alimentaires propres à la luzerne, c'est-à-dire riche en azote, donc plus appétante, il s'agit peut-être d'un début de réponse face aux enjeux du développement durable, car la société peut trouver des bénéfices dans ce type de pratiques culturales. Mais comment, jusqu'où, dans quel milieu et dans quel type d'environnement, pourront-elles être accueillies, ou non ? Je veux poser la question en ces termes.

En tout cas, la fonction peut être différente avec le transfert d'un gène d'une plante à une autre ou le déplacement d'un gène sur un même chromosome ou encore le transfert d'un gène d'un animal sur un autre animal, voire d'un animal sur un végétal.

Dans tous les cas, mes chers collègues, ce sont des OGM. Mais y a-t-il une réponse unique pour chacun d'entre eux ? Ou bien ne faut-il pas légiférer dès maintenant pour préciser clairement ces fonctions, leurs limites, les blocages et les interdits à ne pas dépasser ? Sinon, ce sera sans limite et nous n'aurons fait qu'effleurer une véritable question de société.

Quels seront le rôle et le pouvoir du Haut conseil à cet égard ? C'est à la loi de le préciser, et ce n'est pas la seule application de la directive européenne qui nous permettra d'apporter une réponse à ces questions. Nous devons aller plus loin !

Nous vous proposerons, monsieur le ministre d'État, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, quelques amendements d'« alerte ». Il vous appartiendra de profiter de ce temps fort du débat pour nous apporter toutes les précisions nécessaires.

D'autres questions se posent à nous.

Rien n'apparaît de façon explicite dans le texte sur la gestion des quantités colossales de céréales, d'oléagineux, de soja OGM importés pour fabriquer des tourteaux destinés à l'alimentation du bétail. Comment gère-t-on le stockage et le transport, ainsi que tous les risques de contamination diffuse ? La seule réponse de l'OMC ne suffit pas à éclairer notre société sur cette question.

Comment légiférer pour réglementer une culture d'OGM dans un département, alors que ce même département sera traversé par des camions transportant du soja OGM qui ne sera soumis, lui, à aucune législation, à aucune contrainte ? Comment allons-nous expliquer une telle situation à nos concitoyens ? Si nous voulons être crédibles, il nous faudra bien mettre tout cela sur la table : c'est ce que nous vous proposons.

Vous évoquez une garantie, mais il faut aller plus loin, avec la création d'un fonds financé par toute la filière.

Vous parlez de transparence et d'information, mais il faut, là encore, aller plus loin, en prévoyant une participation plus importante des citoyens, dans le cadre de commissions locales d'information et de suivi, ou CLIS.

La notion de responsabilité doit concerner non pas uniquement l'agriculteur, mais s'adresser à toute la filière.

Ce texte n'aborde, en fait, qu'une partie de la problématique des OGM.

Je me répète, car c'est important, la première étape reste toujours la recherche, qu'il faut soutenir sous toutes ses formes.

L'identification de fonctions destinées au domaine médical devrait pouvoir donner lieu, de la part des pouvoirs publics, à des réponses différentes de celles qui interviennent lors de la découverte de fonctions dont le but serait autre. C'est dans cette voie que nous souhaiterions accompagner le Gouvernement, celle du progrès maîtrisé, et nous proposerons d'amender le texte en ce sens. Nous suivrons souvent le rapporteur lorsqu'il présentera des amendements rédactionnels, mais, au final, si le texte devait rester en l'état, nous ne le voterions pas pour les raisons que j'ai évoquées.

Le Gouvernement me répondra sans doute que la directive n'aborde pas ces thèmes. Mais il nous appartient aussi de transmettre à l'Europe notre lecture de ce sujet, afin qu'elle prenne en compte nos problématiques.

Mes chers collègues, nous sommes prêts au débat. Selon nous, trop de questions sont à ce jour en suspens, trop de manques apparaissent sur un sujet aussi vaste.

Notre position reste cependant très claire.

Premièrement, on ne parle que des recherches en milieu confiné, voire exceptionnellement et dans des conditions précises, en plein champ.

Deuxièmement, la mise en place de commissions locales d'information et de suivi par projet est nécessaire.

Troisièmement, le maire doit disposer de toutes les informations concernant les OGM cultivés sur sa commune.

Quatrièmement, une définition du triptyque organisme-gène-fonction est nécessaire. Elle doit comporter des degrés différents, ce classement devant entraîner des mesures différentes en termes de besoins et d'encadrement.

Ces garde-fous, qui ont pour base le principe de précaution, la transparence et l'éthique, sont susceptibles d'ouvrir la voie au progrès scientifique, parce que ce dernier serait maîtrisé par l'homme et par la puissance publique. Si ces garde-fous que nous proposons d'introduire faisaient l'objet d'avancées de votre part, mes chers collègues, alors nous aurions fait ensemble un grand pas pour la science et pour l'humanité.

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