L'affirmation du droit de produire et de consommer sans recourir aux OGM est l'une des avancées obtenues lors du Grenelle de l'environnement. Que faut-il entendre par un tel droit ? La liberté de produire et de consommer sans recourir aux OGM suppose la possibilité de faire un tel choix, et donc le maintien des activités préexistantes aux OGM, au premier rang desquelles l'agriculture sans OGM.
L'agriculture sans OGM doit être protégée des risques de contamination. La première ne menaçant pas la seconde, la dissémination d'OGM n'étant pas d'utilité publique, cette protection est donc plus que légitime. Dès lors, le droit à produire et à consommer sans OGM ne peut pas s'apparenter à un droit à ne pas être pollué.
Or, le projet de loi prévoit des dispositions que l'on pourrait qualifier de « grenellement » incompatibles dans la mesure où elles tendent à contester ce droit à ne pas être pollué. En effet, certaines dispositions du texte font implicitement du seuil communautaire d'étiquetage à 0, 9 % un seuil de contamination génétique acceptable. Ainsi, un agriculteur fabriquant des produits de qualité relevant d'une indication géographique protégée, d'une appellation d'origine contrôlée, ou provenant d'une filière biologique ne peut prétendre à un dédommagement qu'à la condition que la contamination de sa production ait dépassé le seuil de 0, 9 %.
Or, ce raisonnement n'a pas de fondement juridique ou scientifique. La réglementation communautaire n'impose en rien aux agriculteurs un degré tolérable, de l'ordre de 0, 9 %, de contamination génétique routinière et structurelle de leurs produits par des OGM. Ce seuil d'étiquetage ne peut être érigé en seuil d'intervention réglementaire pour la coexistence des deux types de cultures. Sinon, cela reviendrait à instituer, de fait, un véritable droit à polluer contraire à la Charte de l'environnement intégrée à notre Constitution, aux conclusions du Grenelle de l'environnement, et surtout au droit à ne pas être pollué que constitue le droit à produire et à consommer sans OGM. Le seul moyen de garantir ce droit passe par la réaffirmation de l'existence reconnue de filières économiques sans OGM au seuil de détection scientifique.