Devant notre commission, monsieur le secrétaire d'État, vous avez utilisé l'expression « pause dynamique » pour qualifier l'évolution de l'aide française au développement. Après cinq années de progression, cette aide se stabilise en effet cette année, pour la première fois depuis longtemps.
L'objectif d'y consacrer 0, 7 % de notre richesse nationale reste cependant notre horizon, le Président de la République s'y est engagé, et cet engagement sera tenu. Mais, dans l'immédiat, cette « pause dynamique » nous oblige à faire des choix pour respecter notre impératif d'efficacité.
Nous devons d'abord faire un choix d'organisation : depuis 1998, notre dispositif d'aide est sans cesse revu, toujours dans l'attente d'une réforme ultérieure. Nous devons le stabiliser, conforter les personnels qui le servent et donner une vision claire à tous.
Nous devons ensuite faire un choix géographique : la France ne peut pas tout faire partout. L'urgence est en Afrique et les attentes à l'égard de notre pays sont en Afrique francophone. Concentrons donc nos moyens ; choisissons les secteurs où nous sommes les plus efficaces et les plus demandés.
Il faut enfin effectuer des choix stratégiques, s'agissant des instruments à mettre en oeuvre pour obtenir les résultats attendus.
Ne l'oublions pas, nos contributions multilatérales ne doivent pas répondre à une simple logique de dépense. Ne cédons pas à la facilité de faire des chèques, mais demandons-nous ce que nous attendons exactement de telle ou telle institution. Quelle est celle qui sera la plus positive, la plus réaliste, la plus performante ?
À cet égard, il n'est pas certain que notre contribution au FED, le Fonds européen de développement, soit suffisante : elle pourrait atteindre plus de 860 millions d'euros si la Commission européenne n'accède pas à la demande de lissage sur plusieurs années que les gouvernements allemand et français ont formulée devant la véritable envolée des contributions. Je souhaiterais que vous nous indiquiez, monsieur le secrétaire d'État, quel accueil a été réservé par la Commission européenne à cette demande.
Dans le même esprit, il serait à tout le moins paradoxal d'augmenter nos contributions volontaires avant l'aboutissement des réformes du système de développement des Nations unies et d'affranchir, dans cette période de difficultés budgétaires pour la France, les organisations multilatérales de la rigueur à laquelle nous soumettons nos propres instruments.
Tout effort supplémentaire devrait s'effectuer au sein même de l'enveloppe multilatérale actuelle, sous peine de mettre en péril nos instruments bilatéraux.
En effet, la préservation des instruments de l'aide-projet ne s'effectue, comme dans le budget de 2007, qu'au prix d'une sollicitation de la totalité du résultat de l'Agence française de développement, l'AFD. Notre budget peine à dégager de l'argent « frais » pour l'aide bilatérale, et ce sont les intérêts des prêts de l'Agence qui financent les subventions.
Je ne suis pas hostile à cette forme de recyclage de l'argent du développement, au contraire, et je ne peux qu'apprécier une fois de plus la parfaite gestion de l'AFD et la qualité de cette direction. Mais justement, pour cette raison, je vous invite à la vigilance pour tout ce que nous demandons actuellement à l'Agence, en nous fondant sur son bilan et en ayant l'impression que ses possibilités sont inépuisables.
L'Agence doit pouvoir prendre des risques, ce qu'elle s'apprête à faire en intervenant de nouveau sur prêts dans le cadre d'une ambitieuse stratégie pour l'Afrique. Mais n'oublions pas que le rôle de l'AFD sera non seulement précieux, mais également indispensable dans le développement de l'union des pays riverains de la Méditerranée, union que la France s'efforce de promouvoir. Nous devons conserver ce point en mémoire et ne pas hypothéquer l'avenir.
Cela étant dit, le déclin de nos instruments bilatéraux, qui semblait inexorable, est enrayé : les crédits progressent de 9, 4 %, et il importe donc désormais de renouer avec une stratégie offensive en matière d'assistance technique. Les coopérants ne font pas obstacle, bien au contraire, à une démarche de partenariat : ils sont désormais recrutés et payés par les pays bénéficiaires. Il y a un grand besoin de renforcement des capacités en Afrique, et le nombre d'assistants techniques devrait être augmenté ; c'est la condition même d'une absorption utile de l'aide et ce serait une faute d'en priver nos partenaires.
Telles sont, madame le ministre, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, les principales observations de la commission des affaires étrangères. Certes, les crédits n'augmentent pas, mais les orientations sont positives. Elles devront être confortées, au service d'une vision claire des besoins et d'une vraie stratégie.
La tâche est gigantesque, mais passionnante, car il faut souligner que nous sommes désormais sortis de la phase d'ajustement structurel en Afrique. Il y a actuellement place pour un nouvel élan, une nouvelle ambition. Il convient maintenant d'optimiser la « pause dynamique » que vous avez évoquée, monsieur le secrétaire d'État, afin de la rendre réellement dynamique. C'est dans cet esprit que la commission des affaires étrangères a émis un avis favorable sur l'adoption de ces crédits.