Intervention de Claude Belot

Réunion du 29 novembre 2007 à 22h00
Loi de finances pour 2008 — Compte spécial : avances à l'audiovisuel public

Photo de Claude BelotClaude Belot, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pour évoquer cette mission, je dispose de cinq minutes, contre vingt minutes voilà quelques années ! Je me dois donc d'être extrêmement bref.

S'agissant tout d'abord de la presse, depuis dix ans que je rapporte sur ce secteur au Sénat, tout comme mon ami Louis de Broissia, je commence toujours en affirmant que la presse française est la plus aidée en Europe, sans doute l'une des plus aidées dans le monde, mais que c'est aussi l'une des plus en difficulté, pour des raisons sans doute multiples.

Une bonne nouvelle mérite d'être soulignée : le compte de l'Agence France-Presse est excédentaire pour la première fois depuis des décennies, ce qui est tout à l'honneur de cette entreprise, qui a réussi à se redresser. Lors de contrôles sur pièces et sur place que j'avais eu l'occasion d'effectuer, en leur temps, dans certains bureaux de l'Agence France-Presse situés notamment autour de Hong- Kong et plus généralement dans l'ensemble de l'Asie jusqu'à l'Afghanistan, j'avais vu des équipes ardentes. Leur travail a fini par se traduire dans les comptes.

Parmi les choses qui ne vont pas, il faut mentionner le fait que les décrets d'application de l'article 14 de la loi de finances pour 2007 relatifs, à la fois, aux investissements des entreprises de presse et à la souscription au capital des sociétés de presse ne sont toujours pas parus, alors même que ces dispositions résultent d'une volonté du Gouvernement et du Parlement de favoriser les mutations en améliorant les conditions dans lesquelles elles s'effectuent.

Croyant bien faire, le Sénat et l'Assemblée nationale avaient prévu un décret en Conseil d'État. Considérant que le sujet ne relevait pas de son champ de compétence, le Conseil d'État nous a renvoyé le texte. Il nous faut donc rapidement le modifier, peut-être dans le cadre de la loi de finances rectificative. En dépit des crédits qui existent et d'une volonté politique pour aller de l'avant, rien ne se fait ! Plusieurs entreprises déplorent ce retard.

Par ailleurs, le problème des relations entre La Poste et les entreprises de presse n'est toujours pas réglé de façon satisfaisante. La Poste s'est longtemps plainte de ne pas être payée pour les services qu'elle rend. Voilà deux ans, le Gouvernement a fait un effort pour essayer de lui donner satisfaction et, aujourd'hui, ce sont les entreprises de presse qui se plaignent du fait que La Poste n'accomplit pas son travail convenablement, alors que ses services sont convenablement rétribués.

Il convient donc, madame la ministre, de se pencher sur ce dossier. Dès lors qu'un contrat existe, il doit être exécuté de façon que la presse puisse parvenir à destination dans des délais performants.

J'émets un souhait : précisément, à l'heure où il est largement question de mesure de la performance, conformément à l'esprit de la LOLF, il faut le savoir, les entreprises de presse reçoivent une aide budgétaire de 242 millions d'euros et de multiples exonérations accordées par l'État et par les collectivités locales au titre des taxes professionnelles, ou d'autres « gâteries », mais ces différents soutiens ne donnent lieu à aucune évaluation. Quelle est leur utilité ? Il faudra avoir le courage d'examiner ce dossier de très près.

S'agissant de la communication audiovisuelle, voilà dix ans, - on l'oublie - Antenne 2 était en quasi faillite, FR 3 ne valait guère mieux et l'audiovisuel public était en grande difficulté.

Des dispositions ont été prises par l'ensemble des gouvernements pour améliorer la situation. En particulier, la procédure des contrats d'objectifs et de moyens a permis d'avoir une règle du jeu claire. Pendant trois ans, le chef d'entreprise sait où il va ; il est assuré d'une recette, il connaît sa marge de manoeuvre en matière de dépenses. Il sait que sa recette n'augmentera pas et ce qu'il doit faire pour rester dans les limites des enveloppes ainsi fixées.

Grâce à cette mesure positive, France 2 est devenue une entreprise qui exerce bien son métier, obtient de bons succès d'audience et se redresse progressivement. D'ailleurs, le groupe France Télévisions, globalement, est de loin le premier groupe français de télévision. On a toujours tendance à dire que c'est Pierre, Paul ou Jacques qui est le premier ! Non, le premier, c'est lui !

Pour 2008, le budget s'établit à 2, 89 milliards d'euros, en hausse de 3, 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2007, soit plus que le taux de l'inflation. Que demande de plus le peuple audiovisuel ? Mais il aimerait bien avoir plus.

S'ouvre alors le débat sur la redevance. Est-elle bien nécessaire ? On répond généralement par l'affirmative, mais force est de constater que l'audiovisuel public en général est doté convenablement. Par conséquent, je ne soutiendrai pas à l'excès une augmentation à cet égard.

J'observe tout de même que le produit de la redevance stagne et a perdu de sa dynamique. Une cassure s'est produite à la suite de la mise en oeuvre du nouveau mode de recouvrement. Il s'agit, vous le savez, de cocher une case sur la feuille d'imposition de la taxe d'habitation. La redevance a donné lieu à plus de six cent mille recours contentieux l'an dernier, ce qui représente trois quarts du contentieux fiscal français. Pourtant, il nous avait été dit que le nouveau système permettrait de réaliser des économies. Louis de Broissia et moi-même étions réticents, l'essentiel étant à nos yeux que des gens exercent bien leur métier et soient satisfaits de voir le produit se développer. Mais nous n'avons pas été écoutés.

J'attire du reste votre attention sur un nouveau phénomène simultané, qui s'imposera à nous de toute façon : il concerne l'appareil récepteur. Le téléviseur est soumis à un impôt, mais des ordinateurs qui reçoivent les émissions ? N'étant pas dans le champ de la loi, leurs détenteurs peuvent se permettre de ne pas payer la redevance, sans être poursuivis pour autant.

Il faudra donc, pour l'avenir - c'est un appel que je lance - examiner l'assiette et le fondement de la redevance audiovisuelle. Le téléviseur, c'était au temps de l'ORTF !

Enfin, nous sommes un certain nombre dans cette enceinte à avoir souhaité, depuis des années, le développement de l'audiovisuel extérieur français. Lors de la guerre en Irak, il avait été question d'une chaîne CNN à la française, selon le souhait du Président de la République. J'ai toujours soutenu cette initiative. Aujourd'hui, nous avons LCI et France 24.

Il m'est arrivé dans différentes circonstances, au cours de voyages à l'étranger, en Malaisie par exemple, de constater avec surprise - et ce n'est pas si ancien - que l'ambassadeur de France ne connaissait ni les responsables de TV 5 ni ceux de l'AFP, qui ne se connaissaient d'ailleurs pas entre eux, alors qu'ils brassaient des événements et une matière identiques.

Selon la thèse qui a été défendue devant le Sénat, comme le prouvent les comptes rendus de nos débats de l'époque, France 24 devait permettre de faire la synthèse de tous les moyens existants, en les complétant. J'ai le sentiment qu'il n'en a pas été ainsi.

C'est pourquoi j'ai présenté un amendement à la commission des finances, qui l'a retenu, et dont nous discuterons tout à l'heure. Il vise à inclure dans le même chapitre budgétaire tous les crédits concernant l'action de l'audiovisuel public à l'étranger.

Ce n'est pas facile à mettre en oeuvre, car il y a des intérêts privés, des capitaux publics. Il faut aussi tenir compte des Belges, des Canadiens, des Suisses. Mais nous avons l'ambition de réussir. Sachant que nos moyens ne sont pas extensibles à l'infini, il nous faut impérativement trouver une solution pour y parvenir. C'est le sens du rapport que vont rendre prochainement MM. Benamou et Levitte.

Telles sont les remarques que je souhaitais formuler. Je vous précise, s'il en était besoin, que la commission des finances est favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias ».

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