La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures cinq.
La séance est reprise.
M. le président du Conseil constitutionnel a fait connaître à M. le président du Sénat que, par décision du 29 novembre 2007, le Conseil constitutionnel a rejeté la contestation dirigée contre l'élection à l'Assemblée nationale, à la suite du scrutin du 17 juin 2007, de M. Philippe Goujon comme député de la douzième circonscription de Paris.
En conséquence, conformément à l'article L.O. 137 du code électoral, M. Philippe Goujon cessera d'appartenir au Sénat à compter de ce soir à minuit.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce n'est pas la mission « Conseil et contrôle de l'État » qui prend habituellement beaucoup de temps dans ce débat budgétaire et cette année ne fera pas exception.
Cette mission concerne pourtant trois organismes importants de la République, puisqu'elle est constituée des trois programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives », « Conseil économique et social » et « Cour des comptes et autres juridictions financières ». Au sein de ces trois programmes, s'est progressivement imposée une logique de performance, en conformité avec les préconisations et l'esprit de la LOLF.
La mission « Conseil et contrôle de l'État » bénéficie de 497 millions d'euros en crédits de paiement, dont 82 % correspondent à des frais de personnel.
Le premier de ses trois programmes, « Conseil d'État et autres juridictions administratives », est doté de 266, 4 millions d'euros en crédits de paiement, soit plus de 53 % des crédits de l'ensemble de la mission. L'évolution est significative, puisque la hausse est de 6, 2 % par rapport à 2007.
Il convient de saluer les efforts accomplis au sein de ce programme en vue d'une meilleure maîtrise des frais de justice : alors que la dotation destinée à couvrir ces frais avait augmenté de 26 % en 2005, de 42 % en 2006 et de 12 % en 2007, elle baisse cette année de 3, 4 %, se stabilisant aux alentours de 8, 5 millions d'euros.
Au terme de la programmation retenue en 2002 dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice, 177 emplois de magistrats administratifs auront été créés : les objectifs fixés ont donc été quasiment respectés, avec un taux de réalisation de 84 %.
Au cours de la période, ces renforts ont tout particulièrement profité aux tribunaux administratifs de la région parisienne, que la croissance du contentieux soumet à une très forte pression. Ils ont également permis la création des tribunaux administratifs de Nîmes, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin - puisque la création de ces deux entités administratives s'est accompagnée de celle des tribunaux administratifs correspondants -, ainsi que de Toulon, l'ouverture de ce dernier étant prévue pour septembre 2008.
Au sein de ce programme, l'acclimatation à la culture des indicateurs de performance s'est faite sans difficulté particulière, la référence à des délais moyens de jugement étant utilisée depuis longtemps déjà par le Conseil d'État pour son rapport annuel. Ce constat est d'autant plus remarquable que, comme pour le programme « Conseil économique et social », la fonction consultative ne se prête guère à la mesure de la performance.
Le programme « Conseil économique et social », puisque je viens de le mentionner, connaît une innovation dans le projet de loi de finances pour 2008. En effet, il s'articule désormais autour de trois actions.
Le Conseil économique et social bénéficie depuis sa création, et encore aujourd'hui, sous l'empire de la LOLF, d'une très forte autonomie de gestion. Du fait du faible montant de son budget, de la relative rigidité de la dépense et de la nature même de ses activités - le conseil et le dialogue sont difficilement chiffrables en termes de coûts -, le Conseil économique et social, troisième assemblée de l'État aux termes de la Constitution, n'est pas incité à se doter d'une véritable comptabilité analytique. Toutefois, il dispose d'une capacité d'analyse par fonction qui, même si elle ne constitue pas un véritable contrôle de gestion, lui permet d'assurer un suivi maîtrisé de ses dépenses.
Les crédits de ce programme connaissent une très faible progression - de 1, 05 % - et s'élèvent pour 2008 à 36, 3 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.
Par nature, le Conseil économique et social, assemblée consultative, se prête mal à la mesure de la performance, car « les chiffres ne remplacent jamais les idées ». Toutefois, conformément aux préconisations formulées par la commission des finances en 2005 et en 2006, le projet annuel de performance a connu des améliorations certaines, et de nouveaux indicateurs ont été introduits. La commission s'en félicite, et en félicite le Conseil économique et social.
Le dernier des trois programmes est celui qui s'intitule « Cour des comptes et autres juridictions financières ». Il est financé, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, par une enveloppe de 194, 7 millions d'euros, en hausse de 7, 1 % par rapport au budget accordé pour 2007. Cette progression s'explique, notamment, par la dynamique des dépenses immobilières.
Pour 2008, le plafond d'emplois autorisé est fixé à 1 840 emplois équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, soit une diminution de 11 ETPT.
Les besoins liés aux nouvelles missions de certification dévolues à la Cour des comptes semblent donc avoir été bien absorbés par les redéploiements internes ainsi que par la politique de recrutement d'« experts » issus du secteur privé et encadrés par des magistrats. Le projet de loi de finances pour 2008 ne prévoit aucune création supplémentaire au titre des missions de certification, ce qui mérite d'être souligné.
Les 1 840 emplois du programme incluent à ce jour les 372 ETPT mis à la disposition des juridictions financières par le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi. Toutefois, le statut de ces personnels est en pleine réforme. S'agissant des personnels de catégories B et C, des corps administratifs et techniques propres aux juridictions financières ont été créés en 2007 ; pour les personnels de catégorie A, la création d'un corps spécifique devrait intervenir en septembre 2008.
Enfin, la démarche de performance engagée par les juridictions financières mérite d'être saluée ; il convient de relever tout particulièrement les améliorations apportées aux indicateurs de performance.
Je ne voudrais pas terminer ce rapport sans souligner la confiance dont est empreinte la collaboration entre la commission des finances et ces trois grandes structures de l'État. Naturellement, notre mission de contrôle a fait apparaître des questions, mais il y a toujours été répondu très franchement.
En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits de la mission et de chacun de ses trois programmes.
Applaudissements
Monsieur le président, madame la ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, cette année encore, les crédits de la justice administrative du programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » sont retracés dans la mission « Conseil et contrôle de l'État », à côté des programmes « Cour des comptes et autres juridictions financières » et « Conseil économique et social ».
Il conviendra sans doute - cette soirée nous éclaire, d'ailleurs, à cet égard - de préciser les choses, en tout cas, après le renouvellement sénatorial de septembre prochain, sachant que des liens continuent à exister entre les juridictions administratives et le ministère de la justice.
L'augmentation des contentieux, notamment dans le domaine de la contestation du retrait de points sur le permis de conduire, ou encore ceux qui sont attendus sur le droit au logement opposable, démontre chaque jour la montée en puissance de la justice administrative dans le quotidien de nos concitoyens.
Je voudrais aborder maintenant les moyens dont vont disposer ces juridictions l'année prochaine et interroger le Gouvernement sur quelques points particuliers.
S'agissant du programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », on note que ce poste budgétaire progresse nettement plus que le budget général de l'État, soit, à périmètre constant par rapport à 2007, plus 4, 1 % contre 1, 6 % pour l'État.
Les priorités pour l'année à venir vont essentiellement se concentrer sur le financement de nouvelles créations d'emplois et la poursuite de la mise en oeuvre de mesures améliorant le statut des personnels, ainsi que sur un certain nombre d'opérations immobilières qui sont particulièrement indispensables.
Concernant le personnel, il est nécessaire de poursuivre les efforts de créations de postes. En effet, la loi d'orientation et de programmation de 2002 n'a atteint ses objectifs qu'à hauteur de 70 %, avec 335 emplois créés sur les 480 prévus ; les nouvelles .juridictions installées récemment, comme celle de Nîmes avec 15 créations de postes, absorbent un nombre important de ces créations. Il faut également prendre en considération des éléments plus conjoncturels liés à la hausse du contentieux ou encore les perspectives en matière de vieillissement, de pyramide des âges, dans le corps des magistrats et agents des greffes, de la première instance jusqu'au Conseil d'État.
Pour 2008, 29 postes de magistrat doivent être créés ainsi que 27 emplois d'agent des greffes, ce qui correspondra à une hausse de 6 % des dépenses de personnel. Il sera nécessaire d'amplifier ces efforts dans les années à venir.
Je me réjouis également de la prise en compte d'une ancienne revendication relative à la revalorisation du taux indemnitaire moyen, qui va être porté à 55, 3 %, certes avec un léger étalement dans le temps.
Concernant le programme d'investissement, je souhaiterais que le Gouvernement puisse apporter quelques précisions sur trois dossiers qui me paraissent prioritaires.
Tout d'abord, pour alléger la charge de travail très lourde des juridictions administratives de la région parisienne, celle du tribunal administratif de Cergy-Pontoise - créé en 2000 - en particulier, notamment du fait de l'explosion du contentieux des étrangers, nous croyons nécessaire la création d'un nouveau tribunal qui pourrait se situer en Seine-Saint-Denis.
Par ailleurs, plus au sud, si le projet de création du tribunal administratif de Toulon est en voie de concrétisation, je souhaiterais néanmoins qu'une décision puisse rapidement intervenir sur le choix du site destiné à l'accueillir.
Dans mon département, enfin, j'aimerais avoir des informations sur le financement du ravalement de la façade du tout nouveau tribunal administratif de Nîmes, pour un coût estimé à 655 000 euros TTC, sachant que des cofinancements peuvent être envisagés avec les collectivités locales concernées.
Je voudrais, cette année, insister tout particulièrement sur l'évolution préoccupante du contentieux, alimentée par la multiplication des procédures nouvelles.
Deux chiffres illustrent bien cette croissance exponentielle : entre 2005 et 2006, le contentieux du droit des étrangers a augmenté de 9 % et celui de la contestation du retrait de points sur les permis de conduire de 146 %. Ce sont, chaque année, des milliers d'affaires nouvelles que les juridictions administratives doivent absorber. Il ne faut pas que ces nouveaux contentieux, plus ceux qui sont attendus, nuisent à moyen terme à la qualité des jugements rendus.
Si, pour l'heure, l'augmentation constante des moyens alloués aux juridictions administratives, des tribunaux jusqu'au Conseil d'État, ont permis, d'une part, une amélioration constante bien qu'encore insuffisante des délais de jugement, encore trop souvent au-delà d'un an et, d'autre part, le maintien d'une grande qualité de jugement, il existe, pour l'avenir, un risque certain d'engorgement des juridictions administratives.
D'ores et déjà, plusieurs solutions sont envisageables pour désengorger les juridictions et faire baisser le délai prévisible moyen des affaires en stock de manière à atteindre les contrats d'objectifs qui se généralisent depuis 2002 à l'ensemble des juridictions.
Parmi ces solutions, je citerai l'extension du recours au juge unique, prévue par le décret du 23 décembre 2006, tout en préservant - j'y insiste tout particulièrement - le principe de l'examen collégial pour les affaires mettant en jeu des intérêts sensibles au regard des libertés ou des droits sociaux, ou encore l'instauration par ce même décret de règles particulières tendant à rationaliser la procédure contentieuse, ou encore l'extension du champ d'application du filtrage des pourvois par le président d'une formation de jugement du tribunal administratif ou d'une cour administrative d'appel.
Un décret est attendu pour permettre la mise en oeuvre du recours préalable du contentieux de la fonction publique. L'application de ce dispositif de prévention permettra sans nul doute une diminution des litiges devant les juridictions. Un dispositif identique pour le permis à points serait sans doute utile.
Notre collègue Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois sur la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, n'avait pas manqué d'appeler l'attention du Gouvernement sur le risque de « saturation des juridictions administratives » corrélatif à l'application de ce texte.
Cette loi est symptomatique de ce qu'il ne faut plus faire. En effet, gouverner c'est prévoir. Or, les contentieux susceptibles d'intervenir et consécutifs à la mise en oeuvre de nouvelles dispositions législatives ou réglementaires ne sont pas toujours anticipés.
À cet égard, il serait souhaitable que le Gouvernement accompagne systématiquement les projets de loi qu'il soumet au Parlement d'une étude d'impact précise sur les moyens supplémentaires qu'ils impliquent.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits consacrés au programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » dans le projet de loi de finances pour 2008.
Applaudissements
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a, pour cette discussion, fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs qui n'appartiennent à aucun groupe.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose, au total, de dix minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme « Conseil d'État et autres, juridictions administratives ». Monsieur le rapporteur, je ne sais si des constats voisins vont nous conduire aux mêmes conclusions...
La situation des tribunaux administratifs n'est pas bonne, en particulier dans la région parisienne.
Les crédits de la mission, qui s'élèvent à 266, 4 millions d'euros en crédits de paiement, sont certes en hausse de 5, 8 % par rapport à l'année dernière, mais cette augmentation ne peut répondre au problème de l'engorgement des tribunaux, administratifs.
Cet engorgement est provoqué par les modifications législatives datant de 2006 relatives au droit des étrangers, qui ont entraîné la croissance du contentieux des étrangers. Il représente, en effet, plus du quart des requêtes enregistrées par les tribunaux administratifs, mais ce qui inquiète avant tout les magistrats, c'est le rythme de croissance de ce contentieux, qui est très supérieur au rythme général de croissance : au premier semestre de 2007, il a augmenté de 10, 29 % alors que la croissance générale était de 6, 14 %.
La loi du 24 juillet 2006 a organisé la fusion entre les contentieux du séjour et de l'éloignement afin, selon le Gouvernement, d'alléger la charge des magistrats administratifs en leur permettant de juger à la fois le refus de séjour et l'éloignement. Compte tenu des chiffres que je viens de citer, c'est exactement l'inverse qui s'est produit.
Le problème est que la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, introduit un nouveau droit pour les étrangers, celui d'un recours suspensif ouvert aux demandeurs d'asile se voyant refuser l'entrée sur le territoire.
En ce qui nous concerne, bien entendu, nous avons défendu ce droit, mais nous voulons qu'il soit effectif. Or, compte tenu de l'engorgement des tribunaux administratifs, notamment celui de Cergy-Pontoise, particulièrement concerné par le contentieux des étrangers, nous craignons que ce nouveau recours ne vienne faire exploser les chiffres de ce contentieux, au détriment de la qualité de la justice rendue et, au final, au détriment des étrangers.
En résumé, la politique du Gouvernement en matière d'immigration pose non seulement un problème sur le fond et sur sa conformité avec nos principes fondamentaux, mais également sur la forme, puisqu'elle aboutit à une situation tout à fait déplorable pour les juridictions administratives.
Le problème va également se poser lors de l'entrée en vigueur de la loi relative au droit au logement opposable, en décembre 2008. La loi prévoit, en effet, que des commissions de médiation devront être créées dans chaque département, mais que, à défaut, les demandeurs pourront saisir directement le juge administratif. Si ces commissions chargées de traiter de la quasi-totalité des litiges ne sont pas généralisées à l'ensemble des départements, les juges administratifs seront, une fois encore, inondés de recours. Je rappellerai simplement que 4 millions de personnes sont susceptibles d'être concernées par cette loi.
À la lecture des documents budgétaires, il est difficile d'imaginer que le Gouvernement ait bien pris la mesure du problème rencontré par les tribunaux administratifs. En effet, la loi d'orientation et de programmation pour la justice - la LOPJ - de 2002 n'aura été exécutée qu'à hauteur de 70 %, et non de 84, 3 %, comme l'indique le rapport, puisque ce dernier taux prend en compte les créations de postes pour 2008, ce que ne prévoyait pas la LOPJ. Afin que cette loi de programme soit entièrement exécutée, il faudrait, de l'aveu même du rapporteur, « obtenir, en 2009, 33 postes de magistrats administratifs ».
Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit la création de 29 nouveaux postes : c'est un minimum, compte tenu de la croissance exponentielle du contentieux. Il convient également de souligner que le problème se pose pour les greffes, bien entendu. Actuellement, le ratio magistrat/agent de greffe n'est que de 1, 3, ce qui est bien insuffisant. Mais est-ce vraiment étonnant lorsque l'on sait que la justice judiciaire est confrontée à cette même situation ?
Je vous signale, à titre d'exemple, que la Cour européenne des droits de l'homme compte 250 assistants juristes pour 47 juges. De ce point de vue, la loi de programme de 2002 est encore moins bien appliquée s'agissant des greffes que des magistrats.
Enfin, je souhaite formuler quelques remarques relatives au statut tant des greffes que des magistrats. Le Gouvernement a-t-il prévu de couper le cordon qui existe entre le ministère de l'intérieur et la justice administrative ? En effet, les personnels des greffes des tribunaux administratifs sont encore des agents du ministère de l'intérieur. Or, leur statut devrait être aligné sur celui des personnels du Conseil d'État.
Par ailleurs, comment expliquer que les magistrats administratifs ne bénéficient pas d'une revalorisation indemnitaire au même titre que les magistrats des chambres régionales des comptes, alors que leurs corps sont équivalents ?
De nombreux points restent en suspens et ne sont pas réglés par ce projet de loi de finances pour 2008.
La situation des tribunaux administratifs est critique : il est impossible de demander aux magistrats d'accroître leur productivité - bien que ce soit à la mode depuis six mois ! - s'ils veulent continuer de répondre à l'impératif de qualité de la justice rendue, ce qui est le minimum de leur objectif. Augmenter davantage les effectifs, rendre la profession plus attractive en accroissant le nombre de postes ouverts aux diplômés de l'ENA, développer le précontentieux : voilà des pistes que les magistrats proposent eux-mêmes, mais sans doute n'est-ce pas à l'ordre du jour.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous ne pourrons pas voter en faveur des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à saluer le travail remarquable réalisé par le rapporteur spécial, Jean-Claude Frécon, et le rapporteur pour avis, Simon Sutour, sur la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
Celle-ci comprend, comme vous le savez, trois programmes : « Conseil économique et social », « Cour des comptes et autres juridictions financières » et « Conseil d'État et autres juridictions administratives ».
Assemblée constitutionnelle, le Conseil économique et social a réalisé, cette année, un effort remarquable d'adaptation de sa présentation budgétaire aux exigences de la LOLF. Il connaît une augmentation de 1, 5 % de sa dotation globale. La nomination de deux nouveaux conseillers au titre de l'outre-mer et l'incidence de l'augmentation de la valeur du point d'indice pour la rémunération du personnel expliquent une telle hausse. Toutefois, s'agissant de ses autres dotations, il fonctionne, il convient de le signaler, avec des crédits inchangés depuis 2001.
Quant au programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », il s'inscrit dans un contexte d'accroissement de l'activité du Conseil d'État et des autres juridictions administratives.
Ce budget permettra, d'une part, la création d'un nouveau tribunal administratif à Toulon et, d'autre part, le renforcement en personnel des juridictions administratives dont la croissance du contentieux ne peut être traitée à effectifs constants.
Le Conseil d'État s'est lancé, depuis 2006, dans une politique volontariste de maîtrise des frais de justice qu'il supporte, lesquels sont constitués, pour l'essentiel, de frais d'affranchissement. Ainsi, pour la première fois, cette dotation, qui était précédemment ajustée à la hausse tous les ans, a pu être reconduite à l'identique dans le projet de loi de finances pour 2008.
En expérimentant également l'envoi par Internet des pièces de procédure, le Conseil d'État devrait, à terme, diminuer ses coûts d'affranchissement.
Vous avez exprimé, monsieur Frécon, vos inquiétudes quant à la dégradation de l'indicateur important que constituent les délais de jugement.
À cet égard, il faut noter que, depuis l'élaboration au printemps dernier des documents budgétaires, la situation s'est notablement redressée. La poursuite de la croissance soutenue du nombre d'affaires enregistrées devant le tribunal administratif, qui devrait atteindre 5 % en 2007, est absorbée par une augmentation plus importante du nombre d'affaires traitées, qui s'élève à 8 % sur les dix premiers mois de l'année 2007. J'ajoute que le nombre d'affaires traitées dépasse le nombre d'affaires enregistrées, ce qui devrait mécaniquement réduire le stock, et donc les délais de jugement.
En outre, le projet de loi de finances présenté traduit la volonté du Gouvernement de continuer à réduire les délais de jugement devant les juridictions administratives. Ces dernières sont engagées depuis longtemps dans une démarche de performance, qui vise à diminuer ces délais en augmentant la productivité - même si certains n'aiment pas ce terme ! - des magistrats et des agents de greffe, tout en maintenant la qualité des décisions juridictionnelles.
Quant à la pratique du détachement et de la mise à disposition de membres du Conseil d'État, je rappelle qu'elle est une caractéristique essentielle de l'institution, car elle permet à ses membres d'acquérir une expérience qui contribue grandement à la qualité de leur travail.
De plus, on peut noter que la proportion de personnels mis à disposition n'a pas significativement varié depuis 2001 et que, à l'inverse, de plus en plus de fonctionnaires expérimentés en provenance d'autres administrations sont accueillis au sein du Conseil d'État.
Enfin, trois éléments caractérisent le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières ».
Tout d'abord, il s'agit d'un budget qui consolide encore l'autonomie de gestion des ressources humaines de ces juridictions, malgré les 200 000 euros que vous avez évoqués tout à l'heure, monsieur le président de la commission des finances !
Sourires
Ensuite, le budget qui vous est présenté, mesdames, messieurs les sénateurs, rationalise les moyens. Si la mission de certification des comptes a nécessité la création d'emplois sur la période 2006-2007, les recrutements correspondants d'experts ne seront achevés qu'en 2008. Par ailleurs, l'externalisation de certaines fonctions support, comme le stockage des pièces justificatives et la modernisation des moyens, permettront la suppression, en 2008, de onze emplois.
Enfin, le projet de budget pour 2008 est marqué par une opération immobilière ambitieuse. En effet, les travaux de rénovation de la tour des archives seront engagés prochainement. Il s'agit du projet immobilier le plus important depuis l'installation de la Cour des comptes au palais Cambon, en 1912 : 8, 4 millions d'euros y seront consacrés en 2008 au titre des investissements et, parallèlement, les services qui y sont actuellement installés devront être relogés. C'est le financement de cette opération immobilière qui explique l'essentiel de la progression des crédits des juridictions financières.
Je répondrai maintenant aux questions posées par M. Sutour.
D'une part, j'indique que les effectifs des magistrats en région parisienne seront encore renforcés ; la création d'un nouveau tribunal administratif doit y être effectivement envisagée.
D'autre part, les locaux du tribunal administratif de Toulon, dont j'ai parlé tout à l'heure, ont été trouvés et l'équipe de préfiguration est déjà mise en place.
Enfin, pour répondre à une inquiétude exprimée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, j'indique que le Premier ministre a demandé au Conseil d'État de lui remettre, à la fin du premier trimestre de 2008, des propositions concrètes de nature à favoriser le développement du recours administratif obligatoire et à réduire la charge des juridictions, y compris, par exemple, en matière de contentieux des étrangers.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État » figurant à l'état B.
§(en euros)
Mission
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Conseil et contrôle de l'État
Conseil d'État et autres juridictions administratives
Dont titre 2
217 440 000
217 440 000
Conseil économique et social
Dont titre 2
29 557 150
29 557 150
Cour des comptes et autres juridictions financières
Dont titre 2
158 900 000
158 900 000
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État » figurant à l'état B.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
Ces crédits sont adoptés.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics » (et article 45 ter).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, rapporteur d'une mission ne donnant pas lieu à des évaluations de performances, je suis néanmoins attaché à ce que la LOLF permette, selon une expression chère au Sénat, de mettre de « la lumière dans toutes les pièces ».
Il convient donc, monsieur le secrétaire d'État, pour l'ensemble des sénateurs présents, de se satisfaire des travaux de l'Assemblée nationale, qui ont permis d'apporter cette lumière au palais de l'Élysée. Mais, si vous le voulez bien, j'y reviendrai dans quelques instants.
Dans un premier temps, je me félicite de l'évolution positive de la présentation des crédits de la mission « Pouvoirs publics ». Les documents budgétaires s'étoffent, tout particulièrement pour ce qui concerne les assemblées parlementaires.
Les crédits de la mission regroupant les dotations nécessaires au fonctionnement des pouvoirs publics, tels qu'ils ont été présentés à l'Assemblée nationale, montrent une progression raisonnable de 2, 23 %, supérieure toutefois aux prévisions d'inflation retenues pour la formation du projet de loi de finances pour 2008, fixées à 1, 6 %.
Compte tenu de la diversité et de la pondération de chacune des dotations de la mission, cette évolution recouvre plusieurs tendances, qui traduisent toutes, cependant, une volonté affirmée de maîtrise des dépenses.
Examinons, tout d'abord, les dotations qui contiennent leur évolution en deçà de l'inflation prévue.
On retrouve dans cette catégorie la dotation de la Cour de justice de la République, qui enregistre une baisse de 1, 38 %. Malgré le poids excessif des loyers et des charges des locaux de la rue de Constantine, la Cour parvient, grâce à une évaluation moindre des dépenses des frais de justice à venir, à solliciter une dotation en très légère régression.
On y trouve également la dotation destinée à couvrir les indemnités des représentants français au Parlement européen, qui connaît une augmentation de 0, 15 %, mais également celle de l'Assemblée nationale, qui ne progresse que de 0, 75 % du fait d'une forte baisse des investissements et d'un important prélèvement sur ses disponibilités.
Venons-en, ensuite, aux dotations qui dépassent les prévisions d'inflation.
On y trouve la dotation du Conseil constitutionnel ; les informations contenues dans le « bleu budgétaire » remis au Parlement ne m'ont pas permis d'établir de comparaisons ou d'analyses. J'aurai très prochainement l'occasion de m'en entretenir avec son président.
Concernant le Sénat, si la progression des crédits liés à sa mission institutionnelle enregistre une augmentation de 4, 51 %, celle-ci est parfaitement justifiée, je m'empresse de le dire, par le prochain renouvellement triennal en septembre 2008, avec l'arrivée de douze nouveaux sénateurs, dont deux pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, tant au niveau des dépenses de fonctionnement qu'à celui des besoins d'investissement induits.
À périmètre constant, la dotation du Sénat ne progresse que de 1, 6 % sous l'effet conjugué, d'une part, de la maîtrise des dépenses de rémunération des personnels titulaires due au mouvement de recul des effectifs qui a été engagé et, d'autre part, de sa contribution sur ses ressources propres au financement des travaux lourds.
Par ailleurs, les crédits sollicités pour le musée du Luxembourg régressent de plus d'un tiers, grâce à une baisse importante des charges de fonctionnement et à une stabilisation des dépenses d'investissement.
S'agissant de La Chaîne parlementaire, la forte progression de sa dotation à hauteur de 8, 54 % tient aux charges liées à la diffusion de la TNT. En effet, l'élargissement de l'audience et l'extension de la couverture du territoire induisent le renforcement de certains moyens d'exploitation tels que les régies de production, la refonte du site Internet ou le développement de captations d'événements en direct, ainsi que les tournages extérieurs.
Enfin, deux dotations « hors catégorie », dirai-je, figurent dans cette mission.
La dotation de la Haute Cour de justice pour laquelle, comme les années précédentes, aucun crédit n'a été sollicité.
Comme je vous l'ai annoncé au début de mon intervention, j'en reviens maintenant à la dotation de la Présidence de la République.
« Si la cause est bonne, c'est de la persévérance. Si la cause est mauvaise, c'est de l'obstination », écrivait Lawrence Sterne. Je crois pouvoir dire aujourd'hui que nous avons bien fait de persévérer, car la cause était bonne.
Depuis de nombreuses années, tant à Assemblée nationale qu'au Sénat, nous avons martelé la nécessité de clarifier la dotation de la présidence de la République. Je me réjouis que le volontarisme du Président de la République ait permis de faire avancer les travaux de l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, dans la voie d'une telle clarification.
La consolidation, au sein de la dotation, de l'ensemble des crédits destinés au fonctionnement et à la rémunération des personnels mis à la disposition de la présidence de la République va réellement dans le sens d'une plus grande et nécessaire transparence.
C'est ainsi que plus de 68 millions d'euros sont transférés des ministères concernés vers la dotation de la présidence de la République.
Pour m'en être entretenu avec la directrice de cabinet du Président de la République, à la fois ordonnateur et comptable des dépenses de l'Élysée, j'ai la conviction que se mettent en place des procédures conformes à l'esprit et aux principes de la LOLF.
Par ailleurs, l'alignement des conditions de rémunération du Président de la République sur celles du Premier ministre, introduit par l'adoption de l'article 45 ter, se fera au moyen d'un redéploiement au sein de la dotation, dans le cadre de la fongibilité asymétrique prévue par la LOLF.
Nous vous donnons rendez-vous, monsieur le secrétaire d'État, à l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement définitif du budget de 2008. Nous pourrons alors vérifier les conditions d'application effectives des engagements pris aujourd'hui.
Sous le bénéfice de ces quelques remarques, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits de la mission « Pouvoirs publics », ainsi que l'article 45 ter rattaché.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics » donne lieu, chaque année, à un rapport pour avis de la commission des lois, qui porte sur les dotations du Conseil constitutionnel, de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République.
Ces dotations évoluent peu ; Jean Arthuis vient de rappeler les chiffres. Elles sont en légère hausse pour le Conseil constitutionnel, en légère baisse pour la Cour de justice de la République et l'évolution est nulle pour les dotations de la Haute Cour de justice. Elles n'appellent pas d'observations particulières de la part de la commission des lois, si ce n'est celle du caractère très partiel des réponses que nous avons obtenues du Conseil constitutionnel.
Je vous parlerai donc de deux institutions dont les crédits figurent non pas dans la mission « Pouvoirs publics », mais au sein de la mission « Justice ». Je n'ai pas pour autant le sentiment d'être hors sujet, car ces deux institutions sont la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, ...
... et le Conseil supérieur de la magistrature, le CSM, dont les spécificités et le rôle éminent qu'elles jouent justifieraient, aux yeux de la commission des lois, que leurs crédits ne constituent plus de simples actions au sein de la mission « Justice » et qu'elles soient intégrées dans des missions plus adéquates.
La mission « Pouvoirs publics » nous paraît être, du moins pour le Conseil supérieur de la magistrature, celle qui devrait abriter sa dotation budgétaire. Un point est incontestable : compte tenu de son rôle particulier, le CSM, qui est non pas une juridiction, mais un élément essentiel de garantie et de contrôle de l'indépendance de notre justice, ne peut se satisfaire de voir ses crédits correspondre à une simple action du programme « Justice judiciaire ».
Plus encore aujourd'hui qu'hier, à la suite des suggestions faites par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par Édouard Balladur, le rôle tout à fait spécifique du Conseil supérieur de la magistrature doit être reconnu dans la nomenclature budgétaire, comme c'est déjà le cas pour le Conseil constitutionnel, la Haute Cour de justice et la Cour de justice de la République.
La commission des lois souhaite donc, monsieur le secrétaire d'État, que le Gouvernement l'entende sur ce point. Cela irait dans le sens souhaité pour une institution qui se doit évidemment d'être indépendante et dont les crédits doivent, en quelque sorte, être sanctuarisés.
La commission des lois a noté avec satisfaction que les moyens de la Commission nationale de l'informatique et des libertés allaient augmenter en 2008. Toutefois, cette dernière est encore loin de disposer de moyens comparables à ceux de ses homologues étrangers alors que ses compétences s'accroissent.
Nous renouvelons donc notre demande pour que son budget ne soit plus une simple action du programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice ». L'action n° 05 : « Commission nationale informatique et libertés » figure, en effet, dans ce programme, alors qu'elle n'a rien à y faire ! Mieux vaudrait qu'elle rejoigne d'autres autorités administratives indépendantes, comme la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, HALDE, le Médiateur de la République ou le Conseil supérieur de l'audiovisuel, CSA, dans une mission budgétaire spécifique.
Avant la suspension du dîner, lors de l'examen des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », nous avons adopté un amendement qui tend à créer le programme : « Défense et protection des droits et des libertés fondamentales »...
... et qui a pour objet, selon ses bons auteurs - la commission des finances ! -, ...
... de bien identifier dans un programme spécifique, au sein de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », les crédits de plusieurs « autorités administratives indépendantes qui concourent à la défense et à la protection des droits et des libertés fondamentales ».
Je ferai une seule petite remarque à la commission des finances : elle a omis d'inclure la CNIL dans les « autorités administratives indépendantes qui concourent à la défense et à la protection des droits et des libertés fondamentales » !
J'ignore si, comme le craint le président de la commission des finances, cet amendement ne figurera pas dans le texte définitif de la loi de finances. Quoi qu'il en soit, au cas où la commission le présenterait à nouveau l'an prochain, nous souhaitons que la CNIL fasse partie des autorités concernées. En effet, comme me l'a fait valoir son représentant, la CNIL « ne saurait être assimilée à un simple démembrement d'un ministère, sauf à nier son indépendance réelle et sa spécificité d'action ».
Voilà, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les quelques observations que je voulais présenter, au nom de la commission des lois, sur les crédits de la mission « Pouvoirs publics », auxquels nous donnons, bien entendu, un avis favorable, avec le ferme espoir d'être entendus l'année prochaine, à défaut de l'être cette année ! Cela conforterait la transparence et l'indépendance inhérentes aux spécificités de ces institutions.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.
Merci, monsieur le rapporteur, pour cette note d'espoir !
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n'appartenant à aucun groupe.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. Robert del Picchia.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics » qui nous est présentée est l'occasion pour moi de marquer ma satisfaction, d'abord en tant que membre du Parlement, mais aussi et surtout en tant que citoyen.
La satisfaction que j'éprouve en tant que parlementaire est de voir progresser la transparence et la densité des documents budgétaires qui sont soumis à notre contrôle, comme l'a très justement souligné le président de la commission des finances. En effet, cette dotation étant sensible, toute obscurité budgétaire susciterait l'incompréhension, voire la méfiance de nos concitoyens.
S'agissant justement du point sensible de la rémunération du chef de l'État et des crédits de l'Élysée, il me semble que nous pouvons nous féliciter des mesures qui ont été adoptées par nos collègues de l'Assemblée nationale.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ne cédons pas au chant des sirènes de la démagogie et regardons les choses telles qu'elles sont ! Ceux qui s'indignaient hier, et à juste titre, de l'opacité des crédits et de la rémunération allouée au Président de la République se félicitent aujourd'hui de ce bouleversement.
Selon un nouveau principe de réalité, non seulement la rémunération du chef de l'État sera au même niveau que celle du Premier ministre, ce qui paraît pour le moins naturel, mais surtout nous connaîtrons désormais les réponses exactes aux questions « Combien ? », « Par qui ? » et « Comment ? ». C'est remarquable, vous avez eu raison de le souligner avant moi, monsieur le président de la commission des finances. Nous revenons enfin à un essentiel fondement de notre démocratie.
Je balayerai d'une main distraite les objections sur le montant de la rémunération. Quant on voit ce que gagne un chef d'entreprise dans le privé, il me semble qu'il ne nous est pas possible de pousser des cris d'orfraies ! Mais la France n'est pas une entreprise, et la rémunération du chef de l'État n'a pas les mêmes fondements idéologiques.
Mes chers collègues, le principe d'une rémunération des charges électives n'est pas une exception française. De plus, il n'est pas récent, puisqu'il est né avec la démocratie. Périclès avait, en effet, instauré la misthophorie au Ve siècle avant Jésus Christ.
Rires
Il s'agissait alors d'affirmer véritablement la démocratie, en donnant à chacun la possibilité de participer aux travaux de la Cité, sans discrimination due aux revenus.
Les indemnités des élus sont donc nécessaires, tant pour garantir une égalité d'accès aux fonctions électives que pour lutter contre la corruption ; personne ne remet cela en cause. Mais on sent bien que l'on attend plus de ce principe, du moins autre chose. Au-delà du principe de réalité, se profilent la transparence et donc la possibilité de contrôle.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, homme d'information, je ne peux m'empêcher de considérer que la transparence est indispensable au bon fonctionnement d'une démocratie.
Français de l'étranger, je ne peux pas non plus m'empêcher de comparer avec ce qui se passe ailleurs.
Certes, comparaison n'est pas raison, mais en considérant les systèmes alentours, force est de le constater, ce qui change tellement, ce n'est pas tant le montant des rémunérations du pouvoir public que la manière d'en rendre compte et, à travers elle, une conception de la démocratie.
Cette clarification de la structure du budget des pouvoirs publics me confirme dans le bien-fondé de l'initiative que, modestement, j'avais prise en juin dernier concernant les indemnités des conseillers élus à l'Assemblée des Français de l'étranger.
Au regard de la taille des circonscriptions des élus et de la charge énorme de responsabilités qui est liée à ce mandat, le Gouvernement a été amené à créer une indemnité mensuelle et forfaitaire. La première des mesures a pourtant été prise par voie réglementaire, ce qui l'a rendue précaire et obscure. J'ai donc proposé que cette indemnité mensuelle complémentaire soit inscrite dans la loi, comme le sont les indemnités perçues par les élus locaux, cela par souci de transparence et afin d'en assurer la pérennité. On y viendra peut-être un jour ; c'est en tout cas l'objet d'une proposition de loi qui a été déposée.
Monsieur le secrétaire d'État, la mission « Pouvoirs publics » que vous nous présentez aujourd'hui m'inspire la même réflexion : réalité, transparence, contrôle et, par conséquent, pérennité, car, dans une démocratie moderne, on ne peut concevoir que la rémunération du chef de l'État et les moyens alloués pour son action soient fonction de sa personnalité.
Voilà les remarques que je voulais vous soumettre avant de vous assurer, monsieur le secrétaire d'État, de l'enthousiasme avec lequel je voterai les crédits de cette mission !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Pouvoirs publics », d'un montant relativement réduit - 939 millions d'euros -, recouvre, comme chacun sait, les dépenses afférentes au fonctionnement de la présidence de la République, des deux assemblées parlementaires, de la représentation française au Parlement européen et des plus hautes instances d'arbitrage du pays.
Elle recouvre, en outre, les crédits ouverts pour le fonctionnement des deux chaînes parlementaires, LCP- Assemblée nationale et Public Sénat, et ceux qui sont destinés, entre autres, à l'entretien et à la valorisation du domaine du Sénat. Elle est donc l'objet de conditions particulières d'exécution et de contrôle, conditions particulières qui vont d'ailleurs évoluer.
En effet, les comptes des deux assemblées parlementaires seront désormais certifiés par audit externe, dans des conditions qui restent à définir, mais qui traduisent une évolution. La Cour des comptes, autorité de contrôle la plus indépendante qui soit, nous paraît être la mieux à même de répondre à cette mission en donnant, comme elle le fait en vertu des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances, tout élément d'éclairage à la représentation nationale.
Pour autant, ce qui a naturellement habité le débat sur cette mission, c'est l'évolution spécifique de la dotation budgétaire de la présidence de la République.
Comme vous, monsieur le président de la commission des finances, je me félicite de la refonte de la présentation de son programme. Un effort de clarification très sensible a été effectué quant aux postes budgétaires concernant les personnels mis à disposition de l'Élysée pour mener son action, et quant au niveau de la rémunération du Président de la République.
À ce propos, je comprends tout à fait - permettez-moi de le souligner - l'émotion légitime suscitée dans l'opinion publique par les informations relatives à la hausse spectaculaire de la rémunération du chef de l'État, cela deux mois seulement après le refus du Gouvernement de donner le moindre coup de pouce au SMIC et aux retraites, et alors que le pouvoir d'achat des Français stagne depuis des années. Il s'agit tout de même d'un triplement de la rémunération officielle du Président de la République !
Les explications quelque peu embarrassées fournies tant par le porte-parole du Gouvernement que par celui de l'Élysée n'ont pas tout à fait dissipé les interrogations...
Un article 45 ter, précisant les conditions de rémunération du Président de la République, a été introduit au titre des articles rattachés aux crédits de la mission et a animé la controverse. Nous apprécions positivement qu'un effort de transparence soit fait pour les revenus « officiels » du Président de la République et que soient ainsi précisés les éléments de sa rémunération publique.
Selon l'article 45 ter du projet de loi de finances, la rémunération du Président est portée au niveau de celle du Premier ministre. En outre, « les éléments de rémunération du Président de la République sont exclusifs de tout autre traitement, pension, prime ou indemnité, hormis celles à caractère familial. »
Tout cela a le mérite de la clarté ! Mais, même si cette augmentation s'opère au moyen d'un redéploiement au sein de la dotation, elle reste parfaitement choquante pour bien des Français, confrontés aux fins de mois difficiles.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je puis vous assurer que, dans les années à venir, notre groupe sera extrêmement vigilant sur la manière dont se manifestera la transparence sur les frais de fonctionnement des pouvoirs publics.
Et puisque, pour l'heure, seule la question du pouvoir d'achat du Président de la République semble prise en compte, nous ne voterons pas les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Pouvoirs publics », comme vous le savez, regroupe en fait les organes constitutionnels de la République.
Je m'empresse de dire qu'en vertu du principe de séparation des pouvoirs il n'est pas de coutume que le représentant du Gouvernement évoque les budgets de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je me conformerai naturellement à ce principe.
Je n'insisterai pas non plus sur les programmes « Cour de justice de la République » et « Conseil constitutionnel », M. le président de la commission des finances ayant dit bien mieux que ne pourrais le faire tout ce qu'il fallait en dire.
M. le président de la commission proteste.
Le programme « Présidence de la République » est évidemment au coeur de nos débats, je l'ai bien entendu, monsieur Détraigne, même si vous avez beaucoup insisté sur un certain nombre d'éléments qui ont fait très plaisir à M. le président Arthuis, hormis la question de savoir à quelle mission la CNIL pourrait être rattachée. Il s'agit donc d'un élément de réflexion !
Sourires
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Je souhaite remercier M. Robert del Picchia de son enthousiasme issu de sa parfaite connaissance de la Grèce archaïque et antique, connaissance qui ne démérite pas au Sénat.
Sourires
Le budget du programme « Présidence de la République », par la volonté du Président de la République et conformément aux conclusions du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la ve République, marquera, en 2008, un tournant fondamental.
Afin de conférer enfin au budget de la présidence de la République toute la transparence et la cohérence souhaitables, dans le respect des prérogatives particulières de cette mission, le budget pour 2008 réintègre dans le budget officiel de l'Élysée l'ensemble des dépenses qui contribuent à son fonctionnement. Cela a été rappelé d'une manière positive, me semble-t-il, par l'ensemble des orateurs.
Cette réintégration concerne, naturellement, les collaborateurs directs du Président de la République et l'ensemble du personnel de l'Élysée, qui, lorsqu'ils sont issus de la fonction publique, ne doivent plus être rémunérés par leur administration d'origine, ainsi que les frais de déplacement en France et à l'étranger.
Monsieur Vera, s'agissant de la rémunération du Président de la République, je vous complimente pour votre modération, mais je ne suis évidemment pas d'accord avec votre manière de voir.
Cette rémunération, qui était jusqu'à présent fixée de manière complètement autonome par l'intéressé lui-même, le sera désormais par la loi, c'est-à-dire par le Parlement, puisque l'Assemblée nationale et le Sénat auront à en connaître tous les ans. Elle sera portée, cela a été dit, à un niveau comparable à celle du Premier ministre - aucun statut particulier n'a donc été inventé - et des homologues étrangers du Président de la République française, et sera exclusive de tout autre traitement ou pension.
Parallèlement, le Président de la République lui-même a accepté que de nouvelles mesures de contrôle viennent renforcer encore la mise en cohérence et la clarification du budget de la présidence de la République. En effet, la Cour des comptes vérifiera désormais chaque année la nature des dépenses effectuées, et certifiera l'exactitude et la sincérité du rapport d'activité de la présidence et des documents communiqués au Parlement.
J'ajoute, comme je l'avais fait lors de la présentation de ce budget à l'Assemblée nationale voilà quelques semaines, que le Parlement sera naturellement destinataire des documents explicatifs concernant le budget, et pourra poser des questions et émettre des commentaires.
Par ailleurs, la présidence de la République s'engage à publier chaque année, à compter de 2008, un rapport d'activité retraçant l'utilisation des fonds alloués à son fonctionnement.
La conséquence immédiate de cette nouvelle présentation clarifiée est une augmentation comptable, sans effet sur le montant réel des dépenses, de la dotation qui doit être allouée à la présidence, puisque celle-ci prend désormais en charge des dépenses autrefois supportées par les ministères.
Pour conclure, il s'agit, je le crois sincèrement, d'une mission de plus en plus transparente et de plus en plus contrôlée, comme cela a été souligné par plusieurs orateurs. Elle est à l'image de la dignité que l'on peut attendre des pouvoirs publics.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics » figurant à l'état B.
§(en euros)
Mission
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Pouvoirs publics
Présidence de la République
Assemblée nationale
Sénat
La Chaîne Parlementaire
Indemnités des représentants français au Parlement européen
Conseil constitutionnel
Haute Cour de justice
Cour de justice de la République
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Pouvoirs publics » figurant à l'état B.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Ces crédits sont adoptés.
J'appelle en discussion l'article 45 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Pouvoirs publics
Le I de l'article 14 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1050 du 6 août 2002) est ainsi modifié :
1° Le début de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigé : « Le Président de la République et les membres du Gouvernement reçoivent...
le reste sans changement
2° Dans l'avant-dernier alinéa, après le mot : « fonction », sont insérés les mots : « du Président de la République et » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les éléments de rémunération du Président de la République sont exclusifs de tout autre traitement, pension, prime ou indemnité, hormis celles à caractère familial. »
L'article 45 ter est adopté.
Le Sénat va examiner les crédits du budget annexe des publications officielles et information administrative.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le budget annexe « Publications officielles et information administrative » est entré dans sa première année d'existence, je dirais même de coexistence, puisqu'il s'agit du rassemblement de la direction des Journaux officiels et de la direction de la Documentation française au sein d'un budget annexe unique.
À ce jour, ce rapprochement se traduit par un développement des coopérations et la mise en place de structures communes, ce qui permet à chaque entité de fonder son activité sur son coeur de métier.
Les tâches d'impression ont été totalement abandonnées par la Documentation française, les Journaux officiels en ayant repris une partie. Sur l'année 2007, 110 millions de pages, représentant un quart des impressions de la Documentation française, ont été imprimées par les Journaux officiels, qui se sont donnés pour objectif de définir, d'ici au printemps 2008, un projet complet de repositionnement de la structure industrielle en adéquation avec les attentes des donneurs d'ordres.
En ce qui concerne l'édition et la diffusion, les travaux délégués restent à développer et sont actuellement circonscrits aux codes, aux conventions collectives et à quelques ouvrages et rapports institutionnels. Sur un plan structurel, une agence comptable et un schéma informatique communs seront mis en place dès 2008.
Ces évolutions conduisent aujourd'hui à s'interroger sur la pertinence de l'instauration, à terme, d'une structure unique. La question se pose d'autant plus que les personnels, qui ont consenti à de sévères plans sociaux pour faire face aux besoins de modernisation, ont aujourd'hui besoin d'une visibilité sur le long terme quant à l'avenir des deux entités.
Plus généralement, est posée, me semble-t-il, la question de l'avenir d'un grand pôle public de l'édition, de l'impression et de la diffusion, en vue d'améliorer et de développer la qualité du service rendu. Cependant, c'est de l'évolution concrète de la coopération entre les deux entités et à partir de la situation et des spécificités de chacune d'entre elles qu'émergeront les perspectives d'avenir.
La direction des Journaux officiels doit régler d'importants problèmes de réduction d'effectifs. Elle a lancé, à cet effet, un plan de mutualisation des tâches, fondé sur le redéploiement, la mobilité et la formation des personnels de la direction des Journaux officiels et de la SACIJO, la société anonyme de composition et d'impression des Journaux officiels.
L'objectif est d'assurer une meilleure unité des personnels au-delà des tâches très segmentées de vérification et de fabrication et de favoriser la réorganisation autour de l'outil commun, à savoir la nouvelle plate-forme éditoriale. La mutualisation des tâches, si elle est séduisante, ne va pas sans poser des difficultés, au premier rang desquelles figurent les différences de statut et de salaire des personnels.
Par ailleurs, des plans sociaux, calqués sur le plan de cessation anticipée de travail de la presse parisienne, ont été mis en place à la fin de l'année 2006. Ils concernent potentiellement 153 personnes au sein de la direction des Journaux officiels et 138 personnes à la SACIJO. L'estimation est imprécise, car elle dépend de la démarche volontaire des agents.
Deux vecteurs me semblent essentiels, afin d'accompagner les évolutions en cours et à venir : la formation qualifiante des personnels, tant sur les métiers d'avenir que sur les métiers traditionnels, afin d'optimiser le processus de mutualisation des tâches, et les investissements indispensables pour accroître les possibilités de coopération et anticiper sur les évolutions futures.
La direction de la Documentation française, quant à elle, poursuit le redressement de sa situation financière et le développement de ses activités. De profondes réformes ont été menées en très peu de temps. Son endettement est passé de 11 millions d'euros en 2002 à 6 millions d'euros à la fin de l'année 2006, et les effectifs ont été réduits de 50 personnes. Parallèlement, l'institution s'est attachée à développer ses activités, le chiffre d'affaires étant passé de 14, 61 millions d'euros en 2002 à 17, 67 millions d'euros à la fin de l'année 2006, ce qui représente une augmentation de l'ordre de 20 %.
Les centres interministériels de renseignements administratifs, les CIRA, et le service « Allô 39 39 » ont été pris en charge par la Documentation française. En matière d'information administrative, les sites internet service-public, vie-publique, formation-publique, et la documentation française remportent un très vif succès, avec plus de 40 millions de visiteurs en 2007.
En ce qui concerne le renseignement administratif, un audit de modernisation concernant l'accueil à distance des administrations préconise la suppression des CIRA au profit du traitement des questions par chaque ministère. Certes, le coût du renseignement par téléphone est encore élevé, puisqu'il devrait atteindre 3, 5 euros en 2008, l'objectif pour 2010 étant fixé à 3, 4 euros, mais une telle solution risque d'aller à l'encontre de l'intérêt de l'usager. L'avantage des CIRA est lié à leur caractère interministériel, qui leur permet d'apporter une réponse complète et fiable, dotée des explications nécessaires. Ils jouent, en quelque sorte, un rôle d'observatoire de l'attente des usagers du service public.
Bien que les deux directions aient chacune intérêt à la mise en place d'une structure unique et si l'adhésion des personnels est totale, des priorités demeurent, et chaque entité doit achever auparavant les réformes en cours.
En ce qui concerne les crédits du budget annexe, ils n'attirent pas de commentaires particuliers, puisqu'ils se maintiennent au niveau de 2007, à savoir 193, 89 millions d'euros en autorisations d'engagement et 196, 20 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui traduit une légère hausse de 1, 1 %.
Les recettes du budget annexe, avec près de 198 millions d'euros, sont en légère baisse. Elles permettent cependant un excédent d'exploitation de 1, 3 million d'euros, la bonne situation financière de la direction des Journaux officiels permettant d'absorber l'endettement de la Documentation française.
Alors que les effectifs sont en baisse de 2, 3 % et représentent 1 008 équivalents temps plein, les dépenses de personnel progressent de 4, 7 %, pour atteindre près de 73 millions d'euros. Cette évolution est liée essentiellement au coût des plans de modernisation sociale et au recours accru aux personnels temporaires à la direction des Journaux officiels.
Enfin, je souhaiterais relever les progrès qui restent à réaliser, pour les deux programmes, en matière de performance, notion trop souvent mal définie.
Sous le bénéfice de ces observations, la majorité de la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits proposés pour ce budget annexe.
M. le président de la commission applaudit.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier M. Vera de la qualité des propos qu'il vient de tenir et des pistes qu'il a évoquées et qui méritent, de notre part, une vraie réflexion.
Depuis 2007, le budget annexe « Publications officielles et information administrative » regroupe les programmes finançant respectivement les Journaux officiels et la Documentation française.
Des mutualisations sont organisées entre les deux directions et se poursuivent. La direction des Journaux officiels assure, en effet, l'impression des trois quarts des périodiques et ouvrages propres à la Documentation française. Cette dernière assure, en retour, la diffusion de l'ensemble des ouvrages.
L'année 2008 marquera une nouvelle étape, avec la création d'une agence comptable unique et d'une direction des systèmes d'information commune aux deux directions. Par ailleurs, un travail commun destiné à mutualiser certains achats des deux directions est en cours.
En ce qui concerne le programme 621 « Accès au droit, publications officielles et annonces légales », le budget proposé pour 2008 assure l'équilibre global du budget annexe, tout en réaffirmant la maîtrise des coûts et des tarifs mise en oeuvre ces dernières années. Les dépenses courantes diminuent globalement : 133, 7 millions d'euros prévus en 2008, contre 134, 5 millions d'euros en 2007. Mais les dépenses de personnels sont en hausse de 2, 6 millions d'euros par rapport à 2007.
Cette légère augmentation s'explique, notamment, par des surcoûts provisoires liés au début d'application du plan de départs anticipés, les charges de personnels ayant vocation à diminuer dans les années ultérieures. Les dépenses de fonctionnement général sont en baisse importante du fait des économies obtenues à partir de la politique de dématérialisation engagée ces dernières années.
Les dépenses d'investissement diminuent également en crédits de paiement, mais augmentent en autorisations d'engagement : 9, 6 millions d'euros en 2008 contre 7, 4 millions d'euros en 2007, afin d'assurer la poursuite des projets stratégiques, notamment la nouvelle plate-forme de production éditoriale.
L'ensemble de ces orientations permettrait de dégager un excédent de 32, 9 millions d'euros dans le cadre du programme 621 et de 1, 3 million d'euros globalement pour le budget annexe.
J'en viens au programme « Edition publique et information administrative ».
Ce dernier est décliné en trois actions : la première correspond aux activités d'édition, de diffusion et de documentation ; la deuxième concerne le renseignement administratif, à savoir l'activité des Centres interministériels de renseignement administratif, que vous évoquiez tout à l'heure, monsieur Vera, et « Allô Service-Public 39 39 », qui a été rattaché en 2006 au budget de la Documentation française ; enfin, la troisième action vise la dépense de soutien.
Pour 2008, le budget nécessaire s'établit, en autorisations d'engagement, à 50 millions d'euros et, en crédits de paiement, à 49 millions d'euros. Ce budget est proposé à partir d'une prévision de 17, 5 millions d'euros de recettes propres, en hausse de 3 % par rapport à la prévision de recettes du projet de loi de finances pour 2007. Notons que, par rapport à l'an dernier, les demandes d'autorisations d'engagement relatives aux opérations courantes progressent de 3, 9 %, celles de crédits de paiement de 2, 1 % seulement.
Conformément aux engagements du plan de consolidation, il est procédé, au titre de ce projet de loi de finances, à sept suppressions d'équivalents temps plein du plafond d'emplois budgétaire. Avec cette étape, ce seront cinquante emplois budgétaires de la direction de la Documentation française, soit environ 15 % par rapport à 2003, qui auront été supprimés.
Les principales augmentations de dépenses, hors personnel, correspondent à des améliorations informatiques destinées en priorité aux sites d'information « service-public.fr » et « vie-publique.fr », ainsi qu'à favoriser une offre numérique accrue des publications. À cet égard, notons que les sites pilotés par la direction de la Documentation française auront accueilli cinquante millions de visites en 2007, ce qui est un très beau succès qui, je l'espère, sera confirmé et amplifié en 2008.
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous propose d'adopter les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Nous allons procéder à l'examen des crédits du Budget annexe des publications officielles et information administrative figurant à l'état C.
§(en euros)
Mission
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Publications officielles et information administrative
Accès au droit, publications officielles et annonces légales
Dont charges de personnel
Édition publique et information administrative
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Budget annexe des publications officielles et information administrative » figurant à l'état C.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
Ces crédits sont adoptés.
Le Sénat va examiner les crédits relatifs aux missions : Médias » et compte spécial « Avances à l'audiovisuel public » (et article 62).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pour évoquer cette mission, je dispose de cinq minutes, contre vingt minutes voilà quelques années ! Je me dois donc d'être extrêmement bref.
S'agissant tout d'abord de la presse, depuis dix ans que je rapporte sur ce secteur au Sénat, tout comme mon ami Louis de Broissia, je commence toujours en affirmant que la presse française est la plus aidée en Europe, sans doute l'une des plus aidées dans le monde, mais que c'est aussi l'une des plus en difficulté, pour des raisons sans doute multiples.
Une bonne nouvelle mérite d'être soulignée : le compte de l'Agence France-Presse est excédentaire pour la première fois depuis des décennies, ce qui est tout à l'honneur de cette entreprise, qui a réussi à se redresser. Lors de contrôles sur pièces et sur place que j'avais eu l'occasion d'effectuer, en leur temps, dans certains bureaux de l'Agence France-Presse situés notamment autour de Hong- Kong et plus généralement dans l'ensemble de l'Asie jusqu'à l'Afghanistan, j'avais vu des équipes ardentes. Leur travail a fini par se traduire dans les comptes.
Parmi les choses qui ne vont pas, il faut mentionner le fait que les décrets d'application de l'article 14 de la loi de finances pour 2007 relatifs, à la fois, aux investissements des entreprises de presse et à la souscription au capital des sociétés de presse ne sont toujours pas parus, alors même que ces dispositions résultent d'une volonté du Gouvernement et du Parlement de favoriser les mutations en améliorant les conditions dans lesquelles elles s'effectuent.
Croyant bien faire, le Sénat et l'Assemblée nationale avaient prévu un décret en Conseil d'État. Considérant que le sujet ne relevait pas de son champ de compétence, le Conseil d'État nous a renvoyé le texte. Il nous faut donc rapidement le modifier, peut-être dans le cadre de la loi de finances rectificative. En dépit des crédits qui existent et d'une volonté politique pour aller de l'avant, rien ne se fait ! Plusieurs entreprises déplorent ce retard.
Par ailleurs, le problème des relations entre La Poste et les entreprises de presse n'est toujours pas réglé de façon satisfaisante. La Poste s'est longtemps plainte de ne pas être payée pour les services qu'elle rend. Voilà deux ans, le Gouvernement a fait un effort pour essayer de lui donner satisfaction et, aujourd'hui, ce sont les entreprises de presse qui se plaignent du fait que La Poste n'accomplit pas son travail convenablement, alors que ses services sont convenablement rétribués.
Il convient donc, madame la ministre, de se pencher sur ce dossier. Dès lors qu'un contrat existe, il doit être exécuté de façon que la presse puisse parvenir à destination dans des délais performants.
J'émets un souhait : précisément, à l'heure où il est largement question de mesure de la performance, conformément à l'esprit de la LOLF, il faut le savoir, les entreprises de presse reçoivent une aide budgétaire de 242 millions d'euros et de multiples exonérations accordées par l'État et par les collectivités locales au titre des taxes professionnelles, ou d'autres « gâteries », mais ces différents soutiens ne donnent lieu à aucune évaluation. Quelle est leur utilité ? Il faudra avoir le courage d'examiner ce dossier de très près.
S'agissant de la communication audiovisuelle, voilà dix ans, - on l'oublie - Antenne 2 était en quasi faillite, FR 3 ne valait guère mieux et l'audiovisuel public était en grande difficulté.
Des dispositions ont été prises par l'ensemble des gouvernements pour améliorer la situation. En particulier, la procédure des contrats d'objectifs et de moyens a permis d'avoir une règle du jeu claire. Pendant trois ans, le chef d'entreprise sait où il va ; il est assuré d'une recette, il connaît sa marge de manoeuvre en matière de dépenses. Il sait que sa recette n'augmentera pas et ce qu'il doit faire pour rester dans les limites des enveloppes ainsi fixées.
Grâce à cette mesure positive, France 2 est devenue une entreprise qui exerce bien son métier, obtient de bons succès d'audience et se redresse progressivement. D'ailleurs, le groupe France Télévisions, globalement, est de loin le premier groupe français de télévision. On a toujours tendance à dire que c'est Pierre, Paul ou Jacques qui est le premier ! Non, le premier, c'est lui !
Pour 2008, le budget s'établit à 2, 89 milliards d'euros, en hausse de 3, 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2007, soit plus que le taux de l'inflation. Que demande de plus le peuple audiovisuel ? Mais il aimerait bien avoir plus.
S'ouvre alors le débat sur la redevance. Est-elle bien nécessaire ? On répond généralement par l'affirmative, mais force est de constater que l'audiovisuel public en général est doté convenablement. Par conséquent, je ne soutiendrai pas à l'excès une augmentation à cet égard.
J'observe tout de même que le produit de la redevance stagne et a perdu de sa dynamique. Une cassure s'est produite à la suite de la mise en oeuvre du nouveau mode de recouvrement. Il s'agit, vous le savez, de cocher une case sur la feuille d'imposition de la taxe d'habitation. La redevance a donné lieu à plus de six cent mille recours contentieux l'an dernier, ce qui représente trois quarts du contentieux fiscal français. Pourtant, il nous avait été dit que le nouveau système permettrait de réaliser des économies. Louis de Broissia et moi-même étions réticents, l'essentiel étant à nos yeux que des gens exercent bien leur métier et soient satisfaits de voir le produit se développer. Mais nous n'avons pas été écoutés.
J'attire du reste votre attention sur un nouveau phénomène simultané, qui s'imposera à nous de toute façon : il concerne l'appareil récepteur. Le téléviseur est soumis à un impôt, mais des ordinateurs qui reçoivent les émissions ? N'étant pas dans le champ de la loi, leurs détenteurs peuvent se permettre de ne pas payer la redevance, sans être poursuivis pour autant.
Il faudra donc, pour l'avenir - c'est un appel que je lance - examiner l'assiette et le fondement de la redevance audiovisuelle. Le téléviseur, c'était au temps de l'ORTF !
Enfin, nous sommes un certain nombre dans cette enceinte à avoir souhaité, depuis des années, le développement de l'audiovisuel extérieur français. Lors de la guerre en Irak, il avait été question d'une chaîne CNN à la française, selon le souhait du Président de la République. J'ai toujours soutenu cette initiative. Aujourd'hui, nous avons LCI et France 24.
Il m'est arrivé dans différentes circonstances, au cours de voyages à l'étranger, en Malaisie par exemple, de constater avec surprise - et ce n'est pas si ancien - que l'ambassadeur de France ne connaissait ni les responsables de TV 5 ni ceux de l'AFP, qui ne se connaissaient d'ailleurs pas entre eux, alors qu'ils brassaient des événements et une matière identiques.
Selon la thèse qui a été défendue devant le Sénat, comme le prouvent les comptes rendus de nos débats de l'époque, France 24 devait permettre de faire la synthèse de tous les moyens existants, en les complétant. J'ai le sentiment qu'il n'en a pas été ainsi.
C'est pourquoi j'ai présenté un amendement à la commission des finances, qui l'a retenu, et dont nous discuterons tout à l'heure. Il vise à inclure dans le même chapitre budgétaire tous les crédits concernant l'action de l'audiovisuel public à l'étranger.
Ce n'est pas facile à mettre en oeuvre, car il y a des intérêts privés, des capitaux publics. Il faut aussi tenir compte des Belges, des Canadiens, des Suisses. Mais nous avons l'ambition de réussir. Sachant que nos moyens ne sont pas extensibles à l'infini, il nous faut impérativement trouver une solution pour y parvenir. C'est le sens du rapport que vont rendre prochainement MM. Benamou et Levitte.
Telles sont les remarques que je souhaitais formuler. Je vous précise, s'il en était besoin, que la commission des finances est favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias ».
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une fois n'est pas coutume, cette année je serai très concis sur les crédits alloués à la presse. À la suite de mon excellent collègue Claude Belot, je salue l'effort important consenti pour ce secteur par le Gouvernement. Nous nous en félicitons tous, sur l'ensemble des travées de cette assemblée.
L'opportunité de cet effort n'est certes pas discutable. Malheureusement, vous en êtes consciente, madame la ministre, la crise que traverse depuis de si nombreuses années le secteur de la presse quotidienne ne sera pas résolue avec ces quelques dizaines de millions d'euros supplémentaires, même s'ils témoignent d'un effort important.
J'ai eu l'honneur de présenter, au nom de la commission des affaires culturelles, un rapport d'information intitulé Presse quotidienne d'information : chronique d'une mort annoncée ? Le point d'interrogation avait pour but d'adoucir la violence du titre.
Mais, sans un tel intitulé, personne n'aurait lu ce document ! Il a été lu : il dresse un état des lieux sans concession...
...des difficultés du secteur et de leurs origines. Il propose également des pistes de réflexion.
Lors de votre audition par la commission des affaires culturelles, madame la ministre, pour innover dans cette assemblée, après avoir récemment obtenu du Président de la République un Grenelle de l'insertion à la suite du Grenelle de l'environnement, j'ai exprimé le souhait que vous preniez la tête d'un « Valois de la presse », qui nous permettrait de sortir des difficultés. Il est d'ailleurs, à nos yeux, plus important de mener ce « Valois de la presse » qu'un hypothétique Grenelle de l'audiovisuel !
En ce qui concerne l'audiovisuel, je serai plus explicite. Le constat comptable - nous examinons un projet de loi de finances - est satisfaisant : le budget de l'audiovisuel progresse et chacune des sociétés se verra dotée, en 2008, des crédits et des moyens prévus par les différents contrats d'objectifs et de moyens.
Toutefois, les perspectives financières demeurent inquiétantes pour l'audiovisuel public. Je tiens ici, une fois de plus - bis repetita placent -, à dénoncer la dérive actuelle du financement des sociétés de programme qui, comme je l'ai dit dans mon rapport d'information, s'illustre parfois par une « succession de petites lâchetés » - j'emprunte cette expression à Francis Balle. Ainsi, lorsque j'ai proposé l'augmentation de la redevance audiovisuelle récemment, je n'ai pas trouvé un grand écho dans cette Haute Assemblée !
M. le président de la commission des affaires culturelles rit.
La principale lâcheté se trouve dans les multiples erreurs que contiennent les chiffres fournis par le ministère.
Elles portent, d'abord, sur le produit des encaissements de redevance, qui stagne au lieu de progresser. Nos rapports, madame la ministre, l'annonçaient depuis plusieurs années.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Ces erreurs concernent également les coûts de gestion et de perception de la taxe, qui ont presque doublé d'une année sur l'autre, réduisant d'autant les économies issues de la réforme. Les chiffres exacts se trouvent dans mon rapport ; je vous y renvoie pour d'excellentes lectures, qu'elles soient nocturnes ou diurnes !
Sourires.
Ces erreurs touchent par ailleurs les encaissements publicitaires des sociétés, qui ont été surévalués l'an dernier et qui déséquilibrent les budgets, puisque 40 millions d'euros étaient prévus, alors qu'on savait qu'ils n'y seraient pas !
Que dire également d'une réforme qui, sans aucune raison objective à nos yeux, nous a privés des ressources issues des résidences secondaires - à l'époque, nous avions proposé une autre méthode - et qui réintègre aujourd'hui dans le dispositif près de 800 000 foyers qui, pendant trois ans, étaient exonérés de la redevance audiovisuelle ? Cette dernière mesure est indispensable au « bouclage » de la réforme, mais on peut douter qu'elle permette de renforcer le pouvoir d'achat des personnes concernées !
Que dire enfin d'une réforme qui a brisé le dynamisme de la redevance audiovisuelle et qui nous place, monsieur le président de la commission des finances, dans la situation que nous avons toujours redoutée, celle de la prise en charge par le budget général d'une part croissante des ressources de l'audiovisuel public ?
Qu'elles soient claires ou sombres, ne nous étonnons donc pas si, dans les années à venir, le budget de l'audiovisuel est de nouveau victime d'un certains nombre de coupes ! Ce n'est pas à cette extrémité que nous voulons aboutir.
Cette budgétisation est d'ailleurs paradoxale, et mes propos s'adressent maintenant plus particulièrement aux membres de la commission des finances. Le rapporteur général m'a indiqué, mardi dernier, que la politique de la commission - à laquelle je souscris - était de refuser systématiquement tout amendement entrainant une augmentation des prélèvements obligatoires. Je rappelle simplement que, du fait des votes des budgets auxquels nous procédons ici, le financement de l'audiovisuel public par le budget général est déjà passé de 29 millions d'euros à 65 millions d'euros entre 2005 et 2006. C'est d'ailleurs loin d'être terminé, compte tenu de la stagnation des encaissements. Souvenons-nous, mes chers collègues, que nous votons la redevance de 2008 sans connaître le fruit de la redevance de 2007 !
Cette réforme de la redevance manquait d'ambition. Aujourd'hui, elle risque de paupériser durablement le service public, en tous cas dans son périmètre actuel - sans doute faudra-t-il, un jour, revoir ce dernier. C'est pourquoi elle demande des ajustements.
À tout le moins serait-il nécessaire, comme je l'indique dans mon rapport, de lancer quelques pistes de réflexion.
D'abord, il faut revoir la doctrine fiscale, qui n'est pas la doctrine légale du législateur que nous sommes, afin de faire participer l'ensemble des supports de réception au financement de l'audiovisuel public. Il s'agit là du respect du principe de neutralité technologique. L'Allemagne a des instructions fiscales très claires : le propriétaire d'un ordinateur muni d'une prise télévisuelle paie la redevance.
Ensuite, il faut indexer l'évolution de la taxe sur l'inflation. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette question lors de l'examen de l'excellent amendement déposé par la commission des finances, et que nous soutenons.
Permettez-moi, madame la ministre, de conclure mon intervention par deux questions. Elles sont en apparence anodines, mais, budgétairement parlant, elles nous inquiètent sur le plan du principe.
La première question concerne le financement de la diffusion de l'ensemble des décrochages de France 3 sur satellite.
Lors de l'examen de la loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, dont j'étais le rapporteur, la commission des affaires culturelles avait, sur l'initiative de son président, précisé les contours de ce financement lors de la discussion du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions en faisant modifier le contrat sur ce point. Celui-ci précise, désormais, que le montant du surcoût engendré par cette diffusion « fera l'objet d'un financement budgétaire ad hoc ».
Madame la ministre, puisqu'aucune ligne budgétaire ne figure spécifiquement dans la mission « Médias », je souhaite que vous nous expliquiez comment seront respectés la loi et le contrat d'objectifs et de moyens.
La seconde question, sur laquelle mon collègue Louis Duvernois reviendra dans quelques instants, concerne le budget extérieur, en particulier celui de France 24, qui est passé subitement de 70 millions d'euros à 88, 5 millions d'euros, soit 18, 5 millions d'euros supplémentaires, en vertu de la convention liant la chaîne à l'État.
Je sais bien que l'audiovisuel extérieur paraît échapper au contrôle du Parlement, mais, puisque nous examinons le projet de loi de finances, j'aimerais que nous nous penchions sur cette contradiction, ...
...qui veut que, d'un coté, l'État accorde 18, 5 millions d'euros en vertu d'une convention et que, de l'autre, il fasse fi d'un texte de loi et d'un engagement contractuel.
Je souhaite, madame la ministre, que vous nous apportiez des éclaircissements sur ces deux points. En dépit de ces remarques et de ces interrogations légitimes, la commission des affaires culturelles a adopté les crédits de la mission « Médias » et j'invite la Haute Assemblée à faire de même.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera exclusivement sur l'audiovisuel extérieur.
Madame la ministre, comme Louis de Broissia, je souhaite vous interroger sur le montant de la subvention accordée à France 24. Nous allons voter une dotation de 70 millions d'euros pour 2008. Or la convention de subvention conclue entre l'État et France 24 prévoit le versement d'une subvention de 88, 5 millions d'euros à la chaîne, soit une différence de 18, 5 millions d'euros.
Lors du débat à l'Assemblée nationale, le 24 octobre dernier, vous avez indiqué que ces 18, 5 millions d'euros supplémentaires proviendraient d'un redéploiement de crédits de gestion programmé au cours de l'année 2008. Redéployer signifiant prendre aux uns pour donner aux autres, ma question est simple : d'où viendront ces crédits et qui seront les victimes de cette dotation supplémentaire de 18, 5 millions d'euros qui est accordée à France 24 ?
J'en viens maintenant à la réforme annoncée de l'audiovisuel extérieur.
Le comité de pilotage devrait présenter demain ses recommandations au Président de la République. Selon les indications révélées aujourd'hui par plusieurs journaux, qui sont, comme à l'ordinaire, mieux informés que le Parlement
Sourires
Je dois avouer, madame la ministre, que cette idée me laisse assez sceptique. Qui peut croire que c'est en empilant les structures et en créant un ou même deux postes supplémentaires de président que nous parviendrons réellement à définir une stratégie plus cohérente ?
En revanche, je me félicite que l'idée, souvent évoquée, d'une fusion autoritaire des opérateurs de l'audiovisuel extérieur ait été, semble-t-il, écartée.
À ce propos, est-il nécessaire de rappeler que TV5 Monde est une chaîne francophone et que la France n'est pas seule à décider, même si elle participe à son financement à plus de 80 %? Nos partenaires francophones se sont d'ailleurs récemment émus de se voir imposer une réforme, dont ils n'avaient pas débattu.
Je reste convaincue, pour ma part, qu'il est souhaitable d'encourager les synergies entre les opérateurs, notamment en matière de production, de distribution et de commercialisation, afin d'éviter les coûteuses et stériles concurrences actuelles.
Je pense aussi que l'avenir de l'audiovisuel extérieur passe par Internet et que l'idée d'un groupement d'intérêt économique entre France 24 et RFI est intéressante, si elle permet de créer le pôle multimédia qui nous manque et qui devrait être établi sur le principe du volontariat des journalistes de France 24 ou de RFI amenés à y participer.
Enfin, je crois que la réforme de l'audiovisuel extérieur ne sera pas complète si elle ne s'accompagne pas d'une remise à plat de son mode de financement.
En effet, comment justifier que les crédits destinés aux opérateurs de l'audiovisuel extérieur soient scindés entre deux programmes ? En outre, comment expliquer que France 24 bénéficie d'une visibilité budgétaire grâce à sa convention pluriannuelle de subvention, contrairement à TV5 Monde ou à RFI ?
Est-il normal que les opérateurs de l'audiovisuel extérieur soient soumis au système de la réserve légale - 6 % cette année -, contrairement aux opérateurs de l'audiovisuel public national, qui sont financés par la redevance ?
Enfin, comment expliquer le fort déséquilibre qui existe entre les financements destinés à l'audiovisuel public national et ceux qui sont consacrés à l'audiovisuel extérieur ? Dans un cas, il est question de milliards d'euros, dans l'autre, il s'agit de millions d'euros !
La commission des affaires étrangères a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de ces deux programmes. Je considère, toutefois, madame la ministre, qu'il serait souhaitable que le Parlement soit étroitement associé à cette réforme de l'audiovisuel extérieur, dont le coût, pour le contribuable, doit être contrôlé par le Parlement, dès le stade préparatoire.
En matière d'audiovisuel extérieur, nous ne voulons pas être mis, une fois de plus, devant le fait accompli !
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
La parole est à M. David Assouline.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a à peu près un an, nous examinions le texte supposé créer les conditions du développement de la télévision du futur en France.
Un an plus tard, avec l'examen du projet de loi de finances pour 2008 et, il faut le répéter sans cesse, avec la même majorité de droite aux commandes, le temps est venu de s'assurer de la volonté du Gouvernement de donner à l'audiovisuel public les moyens de trouver sa place dans la télévision du futur.
En premier lieu, il faut constater que la révolution numérique bouscule significativement le marché de l'audiovisuel : la multiplication des réseaux de diffusion, avec la télévision numérique terrestre, la télévision mobile personnelle, l'internet à haut débit et, bientôt, à très haut débit, ou la fibre optique, qui viennent s'ajouter au câble et au satellite, constituent autant de vecteurs d'une diversification accrue de l'offre.
Or, ces changements technologiques majeurs dans les modes de diffusion et de distribution de la télévision accompagnent une évolution profonde du comportement des téléspectateurs.
Comme le montrent les résultats de l'étude « Les Français et la télévision » réalisée par TNS-SOFRES pour Télérama, au mois d'août dernier, une nouvelle attente par rapport à la télévision s'exprime, particulièrement parmi les personnes jeunes, âgées de 18 à 34 ans, et ayant accès à un large éventail de médias. Autrement dit, la révolution numérique que connaissent aujourd'hui les services audiovisuels rencontre les aspirations d'un public de plus en plus nombreux, qui se détache d'une télévision de l'offre, proposée par les grandes chaînes hertziennes privées et visant à réunir le plus grand nombre possible de téléspectateurs devant des programmes fédérateurs, en faveur d'une télévision de la demande, répondant à des attentes de contenu et d'accès individualisés.
Dans cette perspective, les chaînes publiques détiennent a priori un avantage comparatif réel par rapport aux chaînes privées historiques. En effet, leur participation essentielle à la création d'oeuvres françaises et européennes de fiction et de cinéma et à la production de documentaires leur permet de disposer de programmes extrêmement variés, rediffusables à différents horaires et sur des supports diversifiés.
Dans cet environnement en mutation profonde, le service public de l'audiovisuel a-t-il les moyens de prendre le virage éditorial et technologique vers la télévision du futur ?
Respectivement signés le 15 mars et le 24 avril 2007, les contrats d'objectifs et de moyens d'Arte France et de France Télévisions assignent des objectifs volontaristes aux antennes en matière de programmation et de diffusion.
Au moment de l'extinction de la diffusion analogique, France Télévisions devra ainsi consacrer 420 millions d'euros au financement de programmes de création, soit 100 millions d'euros de plus qu'en 2005. Pour sa part, Arte France a pris l'engagement d'apporter un soutien financier à la création d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques augmentant, en moyenne, de 5, 1 % par an sur la période 2007-2011.
Dans le même temps, les antennes du service public doivent assurer leur présence systématique sur l'ensemble des supports de diffusion. Le contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions fixe ainsi pour ambition au groupe de devenir un « média global », acteur majeur du développement accéléré de la télévision numérique pour tous en France. De ce point de vue, Arte a développé une stratégie offensive de présence sur les nouveaux réseaux au travers de « Arte Global », qui comprend, notamment, une plate-forme VOD, des programmes accessibles, la retransmission gratuite et exclusive d'émissions culturelles sur le site. Les chaînes publiques préparent aussi la diffusion de leurs programmes en haute définition et sur les réseaux de TMP.
Les opérateurs de la télévision publique ont donc pris, à l'égard de l'État actionnaire, des engagements importants, stratégiquement et financièrement.
Le Gouvernement se prévaut aujourd'hui, selon les termes que vous avez vous-même employés, madame la ministre, devant la commission des affaires culturelles, du « respect sans faille des engagements financiers de l'État » à l'égard de France Télévisions.
En effet, la dotation à France Télévisions d'une partie du produit de la redevance conduit à une hausse, au sein du projet de loi de finances pour 2008, de presque 3, 5 % par rapport à 2007, conformément aux dispositions du contrat d'objectifs et de moyens. Mais ce contrat sous-estime manifestement les besoins de financement du groupe en termes d'investissements dans les nouveaux supports de diffusion.
Les recettes publicitaires générées par les chaînes stagnent du fait de l'éclatement du marché et des audiences structurellement en baisse de la télévision hertzienne et ne peuvent donc garantir des ressources sûres et suffisantes à France Télévisions. Or, les hausses contractuellement garanties de la ressource publique sur la période 2007-2010, qui devraient correspondre à une augmentation totale de 171, 24 millions d'euros de la dotation, représentent à peine le coût annuel de la diffusion analogique des chaînes. Et le calendrier d'extinction de la diffusion analogique accuse aujourd'hui un retard d'au moins un an !
Dans ces conditions, il semble évident que le plan de financement prévu par le contrat d'objectifs et de moyens n'est déjà plus valable et doit être modifié d'urgence. Souvenez-vous de ces propos ! En tout état de cause, le groupe est aujourd'hui amené à puiser sur ses fonds propres pour réaliser les investissements nécessaires à sa diffusion sur les nouveaux supports.
De manière moins pressante, Arte France est aussi soumis au risque de décrochage de l'évolution de sa ressource publique par rapport à l'augmentation de ses charges. Ce décrochage est lié à la poursuite d'investissements lourds dans les nouvelles technologies. Or, Arte France doit assumer, en parallèle, sa participation au fonctionnement d'Arte GEIE, qui n'est pas prévue par le contrat d'objectifs et de moyens, et aura aussi à intégrer l'augmentation de ses coûts de diffusion du fait du retard pris dans le passage au « tout numérique ».
Les annonces gouvernementales sur le thème des « promesses tenues à l'égard de l'audiovisuel public » ne peuvent donc masquer la réalité du sous-financement durable des opérateurs du service public de la télévision.
Au-delà des services de télévision, Radio France n'est pas mieux lotie, devant assumer la ruineuse mais nécessaire réhabilitation des locaux de la Maison de la radio sans disposer des moyens de réellement investir dans le développement de la radio numérique.
Quant à RFI, il est difficile d'en parler sans éprouver un peu de honte à l'égard des journalistes, des techniciens et de l'ensemble des équipes qui réalisent des programmes en vingt langues, diffusés dans une centaine de pays différents, mais qui restent dans l'ignorance de leur sort futur - ignorance au moins aussi grande que celle des parlementaires qui doivent lire Le Monde et Libération aujourd'hui ! -, suspendus qu'ils sont aux arbitrages à venir en matière de restructuration des organismes de l'audiovisuel extérieur.
En conclusion, notre assemblée a perdu, à travers le débat sur l'augmentation de la redevance et avec une majorité UMP qui a désavoué la proposition de la commission des affaires culturelles, une occasion d'assurer un financement durable de notre audiovisuel public. À l'avenir, je pense qu'il faudra songer à l'instauration d'une taxe nouvelle, beaucoup plus légitime pour nos concitoyens et plus productive pour les finances publiques, qui ne pèse pas sur la majorité de nos concitoyens mais qui soit assise sur le chiffre d'affaires publicitaire des opérateurs privés de télévision, comme dans d'autres pays...
M. David Assouline. Non, mes chers collègues ! Les recettes publicitaires qui seraient ainsi transférées pourraient permettre de dégager des moyens pour financer l'audiovisuel public, par exemple.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la puissance publique s'est engagée à réorganiser l'audiovisuel extérieur, ce que certains appellent déjà, peut-être par réalisme fataliste, une « impossible réforme », pourtant enjeu stratégique majeur sur le plan tant de l'influence de la France et de la diffusion de sa langue que de la diversité culturelle.
Nous approuvons, certes, la révision de la politique audiovisuelle extérieure de la France, souhaitée par le Président de la République, car la pratique actuelle, qui fait intervenir de multiples opérateurs, laisse une impression de confusion. La presse vient, d'ailleurs, d'annoncer la remise imminente du rapport demandé par M. Sarkozy, qui préconiserait la création d'une holding, France Monde, coiffant TV5 Monde, France 24 et RFI. Toutefois, la configuration actuelle du système ne se prête pas facilement à la mutualisation des ressources humaines et financières des différents opérateurs.
La question reste de savoir si cette réforme répond à une réelle volonté de réorganisation en profondeur de l'audiovisuel extérieur dans un secteur d'activité perturbé depuis l'arrivée, en 2006, de France 24. Cette question, nombre d'observateurs se la posent et nous aimerions, madame le ministre, connaître sur ce point précis votre sentiment. Le Parlement comprendra mieux les principes d'une réforme de l'audiovisuel extérieur français, ambitieuse pour notre pays.
Deux chaînes de télévision, TV5 Monde et France 24, ainsi que d'autres acteurs comme France 2, Arte et Euronews, une radio publique, RFI, et une banque de programmes Canal France International constituent, entre autres, un paysage audiovisuel extérieur sous la tutelle de trois autorités publiques différentes et souvent discordantes, à savoir, les ministères des affaires étrangères et européennes, de la culture et de la communication, de l'économie, des finances et de l'emploi, auxquelles il faut ajouter, pour France 24, le rattachement aux services du Premier ministre.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, que nous étudions aujourd'hui, l'analyse des crédits ne fait pas apparaître clairement les évolutions d'un secteur d'activité dominé par une concurrence accrue et menacé par la révolution technologique, à l'échelle mondiale, telle la diffusion numérisée et par Internet.
Nos craintes d'un audiovisuel extérieur à plusieurs vitesses sont ainsi fondées. Le manque de transparence dans l'orientation et le contrôle de ces opérateurs par les pouvoirs publics, l'application régulière de la réserve dite « de précaution », le gel en cours d'exercice de crédits votés, la complexité de la procédure budgétaire à TV5 Monde, qui avantage finalement les actionnaires minoritaires, appellent une réforme en profondeur de l'investissement public.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes dans ce paysage audiovisuel asymétrique.
Pour France 24, dont personne ne conteste la raison d'être, les crédits inscrits pour 2008 s'élèvent à 70 millions d'euros, alors que la convention entre l'opérateur et l'État prévoit une augmentation annuelle automatique, calculée selon une obscure formule mathématique. En vertu de celle-ci, la subvention atteindra, en fait, 88, 5 millions en 2008 par redéploiement en cours de gestion. Les fonds publics n'étant pas extensibles à volonté, madame le ministre, je vous pose la question de savoir d'où proviennent ces 18, 5 millions d'euros attribués à titre de dotation complémentaire, sans l'aval du vote parlementaire.
Pour Radio France Internationale, l'analyse comparée des ressources publiques, constituées par la redevance audiovisuelle et la subvention de l'État, montre qu'elles n'ont progressé que de 3, 4 %, tandis que les différentes sociétés de l'audiovisuel public, sur la même période 2004-2008, ont connu une augmentation inscrite dans une fourchette située entre 11, 9 % et 17, 8%. Cette disparité de traitement tient, essentiellement, au montant de la subvention annuelle attribuée par le ministère des affaires étrangères et au fait que le financement public de RFI repose, pour plus de 50 %, sur la subvention précitée, là précisément où la redevance audiovisuelle constitue l'unique ressource publique des autres opérateurs.
Dans ces conditions, il n'est donc ni logique, ni économiquement sain que la dévolution des crédits votés par le Parlement soit conditionnée par la nature du financement, redevance ou subvention. La réforme de l'audiovisuel extérieur passe aussi, madame le ministre, par des pratiques transparentes d'allocations des crédits, votés en conformité de l'application de la LOLF, dont il faut rappeler qu'elle substitue à une logique de moyens une pratique d'évaluation des crédits votés et engagés pour toutes les actions de l'État.
Pour TV5 Monde, le problème est tout autre puisque la France, investisseur très largement majoritaire, à hauteur de 70 millions d'euros sur un budget total de 92 millions d'euros, cogère l'organisme avec quatre autres entités étatiques, la communauté française de Belgique, la Suisse, le Canada et le Québec. Il convient cependant de noter que le mécanisme de la réserve légale appliqué à TV5 Monde, soit 6 % en 2008, mais non à France 24 et partiellement à RFI, au regard de la seule redevance, complique grandement la gestion de la chaîne et affecte aussi sa capacité à atteindre les objectifs fixés par la loi de finances.
Cette équation particulière à TV5 Monde entre gestion de frais communs et frais spécifiques conduit à une analyse comptable illisible, avec, comme première conséquence, une passivité des pays bailleurs de fonds qui, au fil des ans, n'ont pas eu les moyens ou, plus probablement, n'ont pas voulu accompagner l'augmentation des besoins de la chaîne dans le sens de la modernisation de ses missions.
Avec ces mauvais exemples de schémas d'organisation institutionnels, on en viendrait de même à s'interroger sur un autre phénomène : la montée en puissance à l'international d'Arte, la chaîne franco-allemande, qui absorbe à elle seule, et chaque année, 219 millions d'euros provenant de la seule redevance audiovisuelle française.
Quel est, dans ces conditions, le sens de l'engagement financier total de l'État, qui s'élève à 360 millions d'euros incluant les 40 % de redevance de RFI ? Quelles missions audiovisuelles extérieures remplit-il, avec quels objectifs et pour quels résultats ?
Force est d'admettre que, dans cet habillage institutionnel hétéroclite, la tendance sur plusieurs années a consisté à superposer de nouvelles structures à une infrastructure publique toujours plus fragilisée par des ajouts successifs et l'absence récurrente de coordination entre elles.
Nous avons créé voilà un an France 24, télévision française d'information continue dont le concept est original, mais sans tenir aucun compte du fait que TV5 Monde existe depuis un quart de siècle. Or, cette chaîne de télévision francophone et généraliste est complémentaire de la précédente et non concurrente.
De même, on entend ici ou là des propos déconcertants de renoncement sur RFI, dont l'objectif ne devrait plus consister qu'à rechercher une couverture mondiale par voie hertzienne. Comment ne pas s'étonner de tels discours, et comment se résoudre - ce que, pour ma part, je me refuse à faire - à une gestion aussi désordonnée de ce secteur d'activité ?
RFI dispose du premier réseau mondial d'émetteurs FM, devant la BBC, qu'on cite pourtant souvent en exemple. Voilà qui devrait être, pour la France, un sujet de fierté. La diffusion FM reste, en effet, un support puissant et efficace pour toutes les populations.
TV5 Monde constitue, en outre, un atout majeur pour la promotion d'une francophonie qui regroupe plus de 60 pays et dont le centre de gravité tend à se déplacer du Sud vers le Nord.
Allons-nous réduire cette vitrine en Europe, où se joue la bataille d'influence de notre pays, et laisser à d'autres la conquête de nouveaux marchés, alors que nous demeurerons le premier bailleur de fonds et le seul opérateur français à avoir la capacité de réaction propre à développer une présence audiovisuelle à l'échelle mondiale ?
Doit-on, enfin, considérer comme désuets les concepts de francophonie et de multilatéralité, à la radio comme à la télévision, alors qu'ils nous sont enviés par le monde hispanophone et lusophone ?
Nous ne pourrons jamais exporter notre savoir-faire audiovisuel - produit de l'histoire d'un pays et de sa culture - si nous continuons à entretenir, par faiblesse politique et carence administrative, une situation qui freine l'exportation de nos programmes de qualité dans les domaines de la fiction, du divertissement, du documentaire et du cinéma, si nous nous obstinons à ne pas relier production et diffusion comme dans toute entreprise performante. Ce sont les groupes audiovisuels qui sont les mieux à même d'exporter leurs programmes : permettons-leur de pouvoir le faire !
Que pouvons-nous raisonnablement attendre de cette réforme ? Beaucoup, si nous réussissons un rapprochement pertinent entre les opérateurs ; encore plus, si la communication en direction des autres pays, en français et dans d'autres langues porteuses, devient globale, c'est-à-dire tri-média, incluant télévision, radio et Internet. Car, selon les zones, les publics, mais aussi le niveau d'équipement et les conditions de réception, l'un de ces trois médias peut se révéler être le mieux adapté.
Dans l'immédiat, la singularité de la chaîne d'information internationale France 24 brouille l'analyse et suscite des interrogations. Chacun gagnerait à une clarification des rôles et des missions, sans se concurrencer sur les modes de diffusion, notamment le câble et Internet.
L'État, bien qu'unique financeur de France 24, n'en est pas actionnaire ! La chaîne est, en outre, le seul opérateur de l'audiovisuel extérieur détenu à 50 % par un actionnaire privé - TF1 - dont la participation au capital de l'entreprise n'a été au départ que de 18 500 euros. Depuis le lancement de la chaîne, ce capital s'est trouvé valorisé, si l'on en croit la presse, et atteint plusieurs millions d'euros.
On n'ose donc imaginer, pour les finances publiques, un retrait négocié de l'opérateur privé ! Dans ce cas, en effet, nous serions confrontés à un surprenant paradoxe : l'État devrait indemniser un actionnaire à raison du concours financier que ce même État a apporté à l'entreprise !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ainsi, l'État devrait payer pour la valeur qu'il a lui-même créée, ce qui serait bien évidemment absurde !
Madame le ministre, votre connaissance des médias fait de vous un acteur sur qui nous comptons pour mettre un peu d'ordre dans ce capharnaüm. Pour cela, il convient de porter un regard impartial de façon à établir un pilotage stratégique et à parvenir à un rendement optimum des investissements publics.
De votre côté, vous pouvez compter dans cette tâche sur le travail parlementaire approfondi et consensuel dont vos prédécesseurs n'ont pas, jusqu'à présent, suffisamment tenu compte. La définition d'une politique audiovisuelle extérieure doit être un préalable à l'ingénierie audiovisuelle, et non l'inverse.
Je me fais ici le porte-parole du groupe UMP qui, bien évidemment et malgré mes observations, votera les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je suis de ceux qui, dans les années cinquante, ont acheté une télévision. Avec ma famille, je me régalais alors des programmes en direct, dits des « Buttes-Chaumont ».
Titulaire de la première rubrique « télévision » du journal L'Humanité-Dimanche, j'ai pu nouer des relations amicales et profondes avec nombre de professionnels de « cet instrument nouveau et bizarre [...] qui se proposait la connaissance et la conquête du public - des publics - et non sa banale satisfaction », comme le disait Claude Santelli.
À Aubervilliers, nous organisions des dizaines de télé-clubs, fréquentés par des centaines de personnes que rejoignaient, l'émission en direct terminée, les artistes qui nous avaient ravis et « augmentés ».
C'est inoubliable. Il s'agit là d'une des composantes fortes de ma vie. Cette télévision de service public a été construite par une sorte d'actionnariat populaire - la redevance - aux dimensions du pays, sans que l'État mette un sou.
C'est dire ma sensibilité à ce qu'est et surtout à ce que devient la radio-télévision française. Or, actuellement, par-delà tous les « malmenages » qu'elle a connus, on constate une tendance grave que j'observe pour ma part avec colère : l'existence, pour une part en devenir, d'un « régime spécial » dont bénéficient et bénéficieront les grands diffuseurs commerciaux, au détriment des artistes et techniciens de télévision, mais aussi des téléspectateurs et du service public de la télévision.
Ces toutes dernières années, nous avons en effet été confrontés à une cascade de cadeaux du pouvoir politique à quelques grands et gros intérêts investis dans ce média.
Lors des débats relatifs à la « télévision du futur », le 20 novembre 2006, le pouvoir a ainsi offert à TF1, Canal + et M6, opérateurs privés, un canal bonus ; aux nouveaux entrants de la TNT - Bolloré, Bertelsmann-RTL, Lagardère-Hachette et Canal +-TPS -, un accès automatique aux futurs réseaux de télévision mobile personnelle ; aux trois grands opérateurs de télécommunications - Orange, filiale de France Télécom, SFR, filiale de Vivendi et donc liée à Canal +, Bouygues Télécom, filiale du groupe du même nom intimement lié à TF1 - le marché de la télévision mobile personnelle.
Lors des débats sur la politique numérique, le 11 octobre 2007, le pouvoir a offert au marché de la télévision mobile le dividende numérique à travers la vente des fréquences hertziennes aux enchères.
Pas plus tard que mardi dernier, le pouvoir a offert un échelonnement de paiement pour l'attribution de la quatrième licence mobile UMTS. Pour ce faire, contrairement aux trois premières attributions, il retire au pouvoir législatif sa responsabilité et s'en empare, selon un nouveau principe : la concurrence non libre et faussée.
Il y a deux ans, Orange, SFR et Bouygues Télécom ont obtenu les trois premières licences et leurs marges sont souvent supérieures à 40 % ; je ne suis pas sûr qu'ils vont accepter sans rien dire la nouvelle méthode suggérée par Free !
Le pouvoir gratifie donc les grandes affaires d'un véritable « droit d'affaire », qui sera protégé du droit des affaires que Mme Rachida Dati est en train d'alléger.
Mais, non contentes d'être à Noël plusieurs fois par an, les grandes affaires demandent, et il semble qu'elles ont été entendues, des mesures de dérégulation.
J'en veux pour preuve, madame la ministre, votre discours ministériel au marché international des contenus audiovisuels, le MIPCOM, du 9 octobre 2007, dans lequel vous avez annoncé une loi globale pour la fin du premier trimestre 2008 concernant la hausse des volumes publicitaires, l'assouplissement des obligations de production et la levée des seuils anti-concentration. « Tout est positif dans ce projet », concluait un courtier en bourse.
C'est dans ces conditions que la publication, prévue au début du mois de décembre, d'un décret qui entérinait les votes unanimes du Sénat et de l'Assemblée nationale sur les oeuvres audiovisuelles a été différée, ainsi que le souhaitaient les chaînes commerciales qui manquent souvent à toutes leurs obligations.
Pourtant, dans cet hémicycle, un très beau et très profond débat avait eu lieu le 22 novembre 2006 sur la création audiovisuelle, auquel avaient participé Louis de Broissia, Charles Revel, Serge Lagauche, Catherine Morin-Desailly, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, Catherine Tasca, Ivan Renar, Renaud Donnedieu de Vabres, alors ministre, et moi-même. Tous ensemble, nous avions construit la pensée de ce décret, qui s'inscrit dans une politique de soutien à la diversité culturelle et à la création.
Le report de la publication de ce décret a provoqué, le mercredi 21 novembre dernier à Paris, au Cinéma des Cinéastes, archi-comble, la présence d'auteurs, de producteurs, d'artistes-interprètes, d'agents, de techniciens et de syndicats, tous professionnels de l'audiovisuel qui, à travers vingt organisations, voulaient montrer qu'ils enrageaient contre l'attitude gouvernementale, à vrai dire présidentielle, puisqu'on lit dans la lettre de mission adressée par le Président de la République à la ministre de la culture : « L'objectif doit être de supprimer les incohérences croissantes de la législation actuelle » - je rappelle que nous l'avons votée à l'unanimité - « et de permettre l'émergence de groupes de communication audiovisuelle français de premier plan ».
Arrêtons-nous sur le contenu de cette réunion dynamique et résolue, de femmes et d'hommes de métier, qui entendent garder et développer les moyens de les exercer.
Premièrement, les chaînes commerciales attribuaient par avance au décret leurs difficultés supposées.
Deuxièmement, ces difficultés supposées sont démenties par les résultats de ces chaînes commerciales. TF1, depuis 1999, a vu son chiffre d'affaires augmenter de 43, 1 %, M6 de 104 %. Les recettes publicitaires de TF1, depuis 1999, ont crû de 26 %, celles de M6 de 46 %. Entre 1999 et 2005, TF1 a connu une hausse de ses recettes diversifiées de 34, 2 %, M6 de 183 %. Cette bonne santé a d'ailleurs conduit TFI à augmenter le dividende de ses actionnaires depuis 2002 de 30 %, M6 de 66 %.
Troisièmement, 1 % du chiffre d'affaires cumulé de TFI et de M6 représente vingt millions d'euros, ce qui équivaut à vingt heures de fiction en prime time, ou trente heures de dessins animés, ou cinquante heures de fiction jeunesse, ou encore cent heures de documentaires.
Cela représente aussi vingt mille journées de travail pour les artistes et les techniciens, sans compter l'activité des auteurs, des prestataires techniques, des agents artistiques et des entreprises de production.
Quatrièmement, dès l'annonce du report de la publication du décret, les études boursières ont manifesté leur satisfaction : « Nous évaluons les impacts positifs potentiels à 3, 7 euros pour TF1 et 1, 2 euro pour M6 hors valeur spéculative », dit ainsi une étude de la Société générale sur le secteur des médias en date du 2 novembre 2007. Une étude de Goldman et Sachs sur le secteur des médias indiquait pour sa part, le 19 novembre 2007 : « Nous nous attendons à ce que le secteur audiovisuel français connaisse des changements réglementaires importants dans les mois qui viennent, ce qui devrait être un facteur positif pour TF1 et M6 »
Bref, les difficultés supposées des télévisions commerciales sont bien une comédie de lobbyistes. Face à eux, faisons entendre haut et fort notre solidarité avec les participants à la réunion du Cinéma des cinéastes, qui veulent tout simplement promouvoir la création et le pluralisme culturel audiovisuels !
C'est une ambition à maintenir, à développer, y compris en entrant dans l'ère du numérique. Le décret reporté, c'est-à-dire à renégocier dans le cadre de la mission Kessler-Richard - j'ai lu les questions posées : elles sont toutes orientées -, c'est un renversement de la politique culturelle française, qui a toujours comporté le soutien de la nation à la création culturelle.
Si l'on se rappelle que le Président de la République, dans sa lettre de mission du 1er août 2007 à la ministre de la culture et de la communication, met aussi en cause la création dans le spectacle vivant identifiée à « une offre répondant à l'attente du public » et la création du passé en souhaitant « la possibilité pour les opérateurs publics d'aliéner les oeuvres de leurs collections », on ne peut être qu'en alerte combative, d'autant que les chaînes publiques, malgré l'insistance de leur président, M. Patrick de Carolis, reçu à la commission des affaires culturelles et à la présidence du Sénat, se voient limitées dans leur volonté de créer plus.
La lettre de mission présidentielle ajoute qu'il faut « réallouer les moyens publics des politiques inutiles [...] au profit des politiques [...] que nous voulons entreprendre ».
Autrement dit, nous serions, nous, qui avons voté à l'unanimité l'amendement sur le renforcement des obligations patrimoniales, comme les participants à la réunion du Cinéma des cinéastes, des « inutiles » et des « incohérents croissants ».
Pour le Président de la République, l'utilité et la cohérence croissante, c'est la volonté de grands groupes à qui il offre un « régime spécial ». M. Sarkozy devrait connaître René Char : « À tous les repas pris en commun nous invitons la liberté à s'asseoir. La place demeure vide, mais le couvert est mis. »
Continuons donc et élargissons notre responsabilité de législateurs ! C'est le statut de la création dans tous ses états qui autrement est remis en cause. Les scénaristes réunis à Aix-les-Bains il y a un mois ont été explicites à ce sujet. Lydie Salvayre, dans son dernier roman, Portrait de l'écrivain en animal domestique, montre combien un être écrivant est atteint malgré lui, je dirais presque à son insu, dans son intimité de coeur et de pensée profonde, par un commanditaire opulent.
La finance sans rivage - le rapport Jouyet-Lévy théorise ce point de vue - abrase la vie, malmène l'imaginaire et l'immatériel, qui jouent un rôle de plus en plus important dans la société.
Ces méfaits se propagent - nombre de journalistes en témoignent - dans la presse quotidienne et hebdomadaire quand elle devient propriété ou rachat par les grands groupes. Tout le monde sait la bataille qu'ont dû mener les journalistes des Échos et de La Tribune face à LVMH.
Je sais que l'on m'objectera alors, au sujet de mon beau souvenir de la télévision des Buttes-Chaumont : « Mais vous êtes passéiste ! » Je répliquerai, avec Pierre Schaeffer, cet immense homme de musique, de télévision, de radio, d'innovation : « L'archéologie, comme on le sait, n'est pas exclusivement vouée au passé. Elle enracine le présent. Elle répond à la question : comment en sommes-nous arrivés là ? »
Nous ne voulons pas, avec les vingt organisations de l'audiovisuel, que nous en arrivions à ce que souhaite le Président de la République.
Mes chers collègues, soyons utiles, ayons une cohérence croissante et, sans aucune crainte, tenons fermement notre amendement unanime du 22 novembre 2006 !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma collègue Catherine Morin-Desailly n'ayant pu être des nôtres aujourd'hui, je vais m'exprimer à sa place au nom du groupe de l'Union centriste.
Depuis votre prise de fonction rue de Valois, madame la ministre, le Gouvernement a ouvert de nombreux chantiers de réforme de l'audiovisuel public, à la fois pour l'adapter aux évolutions technologiques, mais aussi pour engager une réforme des structures.
Ces chantiers font, pour le moment, l'objet de consultations, de réflexions ou d'arbitrage. Je pense notamment à la rationalisation de l'audiovisuel extérieur ou encore à la mission confiée à David Kessler et Dominique Richard. Nous attendons les décisions du Gouvernement sur ces questions, qui sont déterminantes pour l'avenir de notre politique audiovisuelle.
Dans cette perspective, et au-delà de l'augmentation de 3, 6 % du budget de l'audiovisuel public, je souhaite évoquer devant vous les moyens accordés aux organismes du service public de l'audiovisuel pour faire face à ses objectifs et relever les défis, notamment technologiques, en cours et à venir.
Pour les chaînes, certaines évolutions ont déjà été prises en compte dans les contrats d'objectifs et de moyens.
Ainsi pour le groupe France Télévisions, le contrat signé en avril dernier fixe des obligations et des objectifs ambitieux : le renforcement de la spécificité éditoriale des chaînes du service public, le développement des nouvelles technologies audiovisuelles, la modernisation de la gestion du groupe.
Plus largement, ce secteur est marqué par des bouleversements technologiques nombreux : l'extinction de la diffusion analogique et le passage au numérique induisent de nombreux coûts pour les chaînes du service public, qui doit assurer, de par la loi, la continuité de réception de ses services.
Toutes les chaînes sont également confrontées au développement des programmes en haute définition. Avec la télévision numérique terrestre, la TNT, les chaînes vont progressivement devoir généraliser leur offre de programmes en haute définition. Cet investissement est très coûteux.
En outre, le développement de la télévision par Internet oblige les chaînes à développer des services adaptés à ces nouveaux supports et aux nouveaux usages d'un public habitué à l'interactivité.
C'est le cas, notamment, des offres de vidéo à la demande développées par les chaînes publiques, notamment par Arte avec « Arte Global ».
Enfin, dernière mutation technologique, le développement de la télévision mobile personnelle, la TMP. Son lancement, annoncé pour la Coupe du monde de Rugby, a pris un peu de retard et est désormais attendu à l'occasion des jeux Olympiques de Pékin de 2008. La TMP obligera les chaînes de télévision à concevoir et développer des programmes spécifiques, courts et interactifs adaptés à ce support. À ces coûts de production des programmes, il faut ajouter les coûts de diffusion sur les réseaux des opérateurs de téléphonie mobile.
Ces investissements représentent des coûts importants pour les chaînes et ils n'ont pas toujours été prévus et financés dans les contrats d'objectifs et de moyens conclus entre l'État et les organismes publics.
Parallèlement à ces évolutions technologiques, les chaînes publiques se trouvent confrontées à une concurrence exacerbée.
La présence des dix-huit chaînes gratuites sur la TNT vient affecter l'audience des chaînes dites historiques. La perte d'audience qui s'ensuit se traduit par une perte de leurs ressources publicitaires.
Ainsi, France Télévisions voit ses recettes publicitaires augmenter d'à peine 1, 2 % en 2007. On ne peut donc compter sur une augmentation des ressources publicitaires pour assurer le financement de la télévision publique.
Cette concurrence a également des conséquences sur les achats de droits d'oeuvres cinématographiques et télévisuelles, qui connaissent une surenchère, ce qui a pour conséquence d'augmenter le coût de la grille.
Au regard de ces évolutions, les chaînes du service public doivent faire face aux obligations légales précisées dans leurs cahiers des charges, notamment celles qui concernent la création. Je pense, en particulier, à la diffusion d'oeuvres européennes et françaises aux heures de grande écoute ou à la contribution à la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles.
Le législateur a également imposé à France Télévisions de se lancer dans une politique de sous-titrage des programmes pour les sourds et malentendants. Ces obligations sont utiles, tant pour la création que pour l'accessibilité des programmes, mais elles sont aussi coûteuses.
L'ensemble de ces investissements pèse sur les charges des organismes de l'audiovisuel public, qui ne voient pas leurs ressources évoluer en conséquence.
Le niveau actuel de la redevance ne leur permet pas d'assurer convenablement leurs missions et de financer les investissements technologiques nécessaires.
Or, si nous voulons conserver une télévision publique avec des programmes de qualité se distinguant des chaînes privées, il est nécessaire de lui en donner les moyens.
Nous devons continuer la réflexion déjà engagée sur le financement que nous voulons pour l'audiovisuel public.
Le système de financement de notre audiovisuel public, comme celui de beaucoup de nos voisins européens, repose, d'une part, sur les recettes publicitaires, et, d'autre part, sur la redevance.
Dans notre pays, ce système s'essouffle parce que ces ressources ne sont pas assez dynamiques ; il est temps de l'adapter à la hausse des coûts et aux exigences des téléspectateurs.
Le montant de la redevance française est l'un des plus bas d'Europe et un des seuls à ne pas être indexé sur l'inflation. Si l'on constate une hausse du produit de la redevance cette année encore, c'est le résultat de l'amélioration du rendement de la redevance à la suite de la réforme de 2004, qui a adossé sa perception à la taxe d'habitation.
Quant aux recettes publicitaires, leurs perspectives d'évolution ne sont pas favorables : elles vont stagner du fait de la baisse d'audience et de la baisse des investissements des annonceurs sur les chaînes de télévision.
S'il est possible et nécessaire de réaliser des économies grâce à des synergies importantes au sein du groupe France Télévisions, ce ne sera pas suffisant pour dégager de nouvelles ressources à destination du service public.
Il n'existe que deux solutions : soit augmenter les ressources publicitaires, soit augmenter les recettes issues de la redevance.
La première option impose de revoir les règles actuellement applicables à la publicité télévisée.
Parmi les solutions possibles, sont régulièrement évoquées, à l'occasion de la transposition de la directive « Services de médias audiovisuels sans frontières », l'augmentation du volume horaire publicitaire pour les chaînes du service public, le passage de l'heure glissante à l'heure d'horloge ou encore l'augmentation de la publicité dans les émissions de flux, évoquée par le Président de la République et reprise par le président de France Télévisons.
Si ces propositions méritent réflexion, il faut néanmoins avoir à l'esprit qu'augmenter la publicité sur ces chaînes risque de conduire à leur assimilation à leurs concurrents privés.
La seconde option consiste à augmenter les recettes tirées de la redevance, qui permet aux organismes de l'audiovisuel public d'affirmer leur identité et leur différence. Trois pistes sont envisageables pour rendre cette ressource plus dynamique.
La première piste serait l'augmentation du montant de la redevance et son indexation sur l'inflation : cette année, comme depuis 2002, elle est à 116 euros. En outre, contrairement à d'autres impôts, elle n'est pas indexée sur l'inflation, ce qui n'est aucunement justifié.
C'est pourquoi les commissions des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat ont défendu, d'une part, une augmentation de la redevance, mais légère, afin de ne pas grever le budget des ménages et, d'autre part, son indexation sur l'indice des prix.
La redevance serait aujourd'hui à environ 128 euros si elle avait suivi l'indice des prix depuis 2002.
La deuxième piste résiderait dans la stricte application du principe de remboursement intégral des exonérations pour motifs sociaux par l'État : il n'est pas normal que le budget de l'audiovisuel public finance des politiques sociales.
La troisième piste, enfin, consisterait à taxer les nouveaux supports. Aujourd'hui, une instruction fiscale exonère les ordinateurs équipés pour la réception des chaînes de télévision, alors qu'ils constituent un « dispositif assimilé permettant la réception de la télévision pour l'usage privatif» tel que défini par l'article 1605 du code général des impôts.
À l'instar de l'Allemagne, et conformément au principe de neutralité technologique, il faut élargir l'assiette de la redevance à tous les supports permettant la réception des programmes télévisés.
M. Nicolas Sarkozy, conscient des mutations technologiques et de l'accroissement de la concurrence dans ce secteur, a admis, pendant la campagne présidentielle, le manque de moyens de l'audiovisuel public pour se développer.
Madame la ministre, vous vous dites attachée à l'augmentation des ressources financières de l'audiovisuel public. Il est donc difficile de comprendre la fin de non-recevoir adressée au président de France Télévisons qui demandait de pouvoir augmenter ses ressources publicitaires par le biais de la coupure publicitaire dans les émissions de flux.
Cette mesure, en étant conditionnée, aurait pu être favorable à la création et aux programmes culturels.
Nous regrettons également la position du Gouvernement et de la commission des finances rejetant l'amendement d'équité de la commission des affaires culturelles du Sénat visant à fixer le montant de la redevance à 120 euros, sous prétexte de ne pas affecter le pouvoir d'achat.
Certes, cette année, le produit de la redevance augmente de 3, 6 %. Cela s'explique principalement par la fin des exonérations dont bénéficiaient certaines personnes âgées.
Il n'en sera pas de même en 2009. En effet, sauf ressources nouvelles, les contrats d'objectifs et de moyens ne pourront pas être honorés par les organismes de l'audiovisuel public.
Le groupe de l'UC-UDF souhaite que vous meniez à bien l'ensemble de ces réformes, madame la ministre. Cependant, il juge essentiel que la question des moyens de l'audiovisuel public soit rapidement traitée. Il votera donc les crédits des missions « Médias » et « Avances à l'audiovisuel public » pour 2008 en espérant voir ces réformes aboutir dans le cours de l'année 2008.
MM. le président et le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles applaudissent.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette année encore, nous ne pouvons que faire le constat du sous-financement chronique de notre audiovisuel public.
Ainsi, France Télévisions n'aura pas les moyens de faire face aux bouleversements en termes de technologie et de concurrence. Prenons l'exemple du passage au numérique : non seulement les coûts induits sont mal évalués - je pense en particulier aux réaménagements de fréquences et au financement du GIP France Télé numérique -, mais l'on sait d'ores et déjà que le calendrier pour 2011 ne pourra être tenu, ce qui risque de surenchérir les coûts de double diffusion analogique et numérique. Nous n'avons d'ailleurs pas manqué de le souligner lors de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.
Quant à la TMP, la télévision mobile personnelle, elle est absente du contrat d'objectifs et de moyens, qui court jusqu'en 2010, alors même que les frais de diffusion sont évalués à 8 millions d'euros par an et par chaîne à partir de 2009, sans parler des coûts de production de contenus spécifiques.
C'est pourquoi, cette année encore, je regrette que tout amendement visant à augmenter notre redevance audiovisuelle, pourtant l'une des plus basses d'Europe, donne lieu systématiquement à un avis défavorable du Gouvernement et qu'il soit donc immanquablement retoqué.
À l'invite de M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, arrêtons l'hypocrisie. D'une manière ou d'une autre, nettement moins visible ou ressentie, nos concitoyens payent la publicité.
L'argument du pouvoir d'achat des ménages, avancé par le Gouvernement et le groupe UMP pour refuser cette augmentation, est à géométrie variable.
Bizarrement, le pouvoir d'achat des 780 000 personnes âgées aux revenus modestes, exonérées jusqu'alors de la redevance audiovisuelle, mais qui ne le seront plus dès 2008, ne vous soucie guère. Mais il est vrai que le maintien de ces exonérations aurait exigé un relèvement à due concurrence du plafond des exonérations. Si tel avait été le cas, nous n'aurions alors pas manqué de le rappeler, car l'audiovisuel n'a pas à financer la politique sociale du Gouvernement ; cela doit relever du budget de l'État.
À ce titre, l'adoption, à l'article 21, de l'amendement du Gouvernement tendant au relèvement du plafond est une bonne chose, mais on est encore bien loin du compte pour respecter le principe du remboursement intégral des dégrèvements pour motifs sociaux introduit par la loi, en 2000, sur l'initiative du gouvernement Jospin.
Avec la réforme de 2004, on a tout misé sur une augmentation significative du recouvrement. Mais les économies induites n'ont pas été à la hauteur des prévisions, et les écarts entre les montants de redevance votés et les encaissements réalisés ont même augmenté ces dernières années.
Plus largement - et sur ce point encore je rejoindrais l'avis de M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles -, à l'heure de la diversification des supports de réception de la télévision, nous ne pourrons faire l'impasse beaucoup plus longtemps sur un réel débat autour de l'élargissement de l'assiette de la redevance audiovisuelle.
D'ores et déjà, 3, 5 millions de Français regardent la télévision sur Internet et la TMP sera bientôt lancée. Ne taxer que les téléviseurs devient, chaque année, de plus en plus obsolète. Mais nous attendons de voir le contenu des réformes que vous avez annoncées, madame la ministre.
À l'instar des professionnels de l'audiovisuel, nous considérons le report des décrets d'application des obligations patrimoniales, votées sur l'initiative du Sénat lors l'examen du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, comme un très mauvais signe.
Invoquer les réformes à venir, qui ne concernent pas à proprement parler la définition de l'oeuvre audiovisuelle, pour ne pas appliquer les sous-quotas patrimoniaux, constitue, d'ores et déjà, un recul pour la création, dans un contexte où les diffuseurs privés réclament tout bonnement la remise en cause des obligations d'investissement et de diffusion.
De fait, madame la ministre, avec ce report, vous avez déjà accepté que ces obligations deviennent un élément de marchandage sur d'autres sujets.
La lettre de mission que M. le Président de la République vous a adressée l'été dernier vous enjoignait de permettre l'émergence de groupes de communication audiovisuelle français de premier plan, mais tout en tenant compte de la nouvelle donne du marché comme des exigences de la création. J'ai bien peur que cette dernière recommandation ne passe par pertes et profits, et que vos réformes à venir ne visent qu'exclusivement la première.
De plus, les derniers aléas de la crise de la presse, avec le rachat du journal Les Échos, nous ont démontré que la défense du pluralisme et de l'indépendance journalistique n'était pas non plus une des priorités de votre politique en matière de médias.
Si la presse est en crise, elle ne l'est pas pour tout le monde, et en tout cas ni pour les publicitaires orientés sur les « gratuits » ni pour les investisseurs.
Le dispositif des aides à la presse ne peut à lui seul permettre au secteur d'inverser une tendance de fond, liée à la révolution numérique et à celle des « gratuits » financés par la publicité.
De même, celui-ci ne peut être dissocié des questions soulevées par la concentration et la financiarisation des groupes multimédias et devrait prendre en compte des critères d'indépendance. Que Bernard Arnault se « paye » un des rares quotidiens français bénéficiaires, qui est l'une des plus importantes sources d'information du pays pour les milieux d'affaires, dont LVMH est un des fleurons, qu'il soit en mesure de choisir l'identité de son principal concurrent au travers de la revente de La Tribune, et ce avec la plus grande bienveillance du Gouvernement et de la Présidence de la République, tout cela en dit long sur la convergence idéologique du pouvoir actuel et des grands groupes industriels détenteurs de médias. Les journaux se font d'abord avec des actionnaires ; à eux, donc, de donner la ligne éditoriale. L'information n'est plus qu'une simple marchandise !
Mais, m'objectera-t-on, pourquoi ce secteur resterait-il à l'écart de cette normalisation économique, à l'écart du primat de l'économique ?
S'il est des secteurs où le « non lucratif » et le « hors marché » doivent encore avoir un sens, s'il est des secteurs qui doivent être protégés du « tout libéral » au profit du pluralisme et de l'indépendance, la presse d'opinion ne devrait-elle pas en faire partie ?
Car c'est de l'information des citoyens, et donc de la vitalité de notre démocratie, qu'il est question. Peut-être que ce sujet mériterait également un Grenelle, ou un Valois, comme le propose M. de Broissia. Finalement, peu importe l'appellation retenue !
Vous le comprendrez donc aisément, madame la ministre, dans un tel contexte, le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission « Médias ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, madame, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord remercier tous les orateurs de leurs interventions très intéressantes, très documentées et, souvent, très précises. Elles ont permis de dresser un tableau finalement assez complet de notre audiovisuel public, de la presse et, bien sûr, de l'audiovisuel extérieur, sujet qui préoccupe particulièrement M. Duvernois et Mme Cerisier-ben Guiga.
S'agissant de notre audiovisuel public, j'ai été sensible au fait que M. Belot, rapporteur spécial, et M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis, aient insisté sur l'effort important consenti par l'État. En effet, les contrats d'objectifs et de moyens conclus en la matière sont la marque d'un engagement fort de sa part.
Ainsi, dès mon arrivée rue de Valois, je me suis battue pour que ces contrats soient évidemment maintenus en l'état, dans la mesure où ils prévoient tout de même une augmentation significative des crédits alloués à France Télévisions et à ARTE, en hausse respective de 3, 5 % et de 4, 1 % pour 2008.
L'objectif sous-tendu par un tel effort est double : veiller au respect de l'identité propre à nos chaînes publiques, mais aussi négocier le virage décisif des nouvelles technologies, évoqué par M. Assouline, notamment la TNT, la haute définition, ainsi que la télévision mobile personnelle. C'est la raison de l'engagement de l'État au début de l'été, que j'ai constamment rappelé depuis.
Certes, l'augmentation éventuelle du financement de France Télévisions par l'octroi d'une seconde coupure publicitaire a fait débat, mais n'a finalement pas été retenue. Personnellement, j'étais réservée sur ce sujet, compte tenu de l'aspect très « imbriqué » de notre marché publicitaire et du fait qu'une mesure isolée, ne concernant pas les autres médias, radio et presse écrite, pouvait avoir des conséquences dangereuses.
Cela étant, je suis bien décidée à mener les réflexions et à ouvrir les chantiers qui s'imposent, en ayant évidemment à l'esprit - disant cela, je veux rassurer M. Ralite - le nécessaire respect des missions essentielles de France Télévisions. Certes, nous ne sommes plus à l'époque de Claude Santelli, mais nous attendons tous beaucoup de notre télévision publique, qui doit préserver autant que faire se peut son identité.
C'est le sens des réformes engagées sur plusieurs sujets d'importance.
Nous avons, tout d'abord, commencé à travailler avec les responsables de France Télévisions sur une évolution des structures du groupe, lequel comprend, d'un côté, la holdinget, de l'autre, les chaînes. De notre point de vue, certaines fonctions « support » pourraient être davantage développées au sein de la holding, ce qui entraînerait sans doute une meilleure utilisation des ressources et une gestion plus rationnelle.
C'est l'une des voies à creuser, mais certainement pas la seule, pour apporter une réponse aux problèmes de financement de l'audiovisuel public. Un tel mouvement a d'ores et déjà été initié au sein de France Télévisions, et nous souhaitons qu'il puisse se développer.
Par ailleurs, il conviendrait que le groupe prenne un virage éditorial plus marqué, car nous avons la conviction que cela correspond à l'attente d'une certaine partie du public. Bien sûr, M. Assouline l'a souligné, les publics sont multiples et les pratiques évoluent. Néanmoins, dans le même temps, nous pensons qu'il existe un public prêt pour une télévision de qualité. Nous avons pu le constater au travers des succès d'audience des grandes séries ou de la pièce de Sacha Guitry Faisons un rêve, le public répond présent quand on lui propose justement des produits de qualité.
Telle est la direction dans laquelle nous entendons travailler avec les responsables de France Télévisions.
Au-delà de ce mouvement vers une meilleure mutualisation des moyens, il importe de s'interroger sur le développement des ressources propres et, partant, sur le niveau de la redevance audiovisuelle et sur son mode de recouvrement. Pour 2008, la question a été réglée, puisque toute augmentation a été complètement écartée. Cela étant, la démarche peut être poursuivie, d'autant que les remarques formulées autour de la redevance sont très intéressantes et méritent de nourrir notre réflexion.
En outre, j'entends ouvrir le dossier de la publicité.
Nous sommes en train de réaliser un audit du paysage publicitaire au cours de l'année écoulée, qui porte notamment sur les modes de répartition des flux et sur les suites données à la mise en oeuvre des dispositions prises sur la grande distribution. Nous souhaitons nous faire l'idée la plus précise possible de la situation sur le plan publicitaire, en ayant à l'esprit qu'il s'agit effectivement d'un marché imbriqué. Il faut donc nous abstenir de toute initiative de nature à déstabiliser le secteur dans son ensemble, et notamment la presse écrite.
En même temps, plus d'argent, c'est aussi plus de souplesses et plus de possibilités offertes aux producteurs pour la création audiovisuelle.
Pour répondre aux observations faites par MM. Lagauche et Ralite, je tiens à souligner que les grands groupes télévisuels privés contribuent puissamment à la production et à la création. Nous ne pouvons que nous réjouir de ce que ces grands groupes offrent au public des chaînes gratuites, financées, naturellement, par la publicité. Il y a tout un éventail de programmes dont nous pouvons être fiers, et ce grâce à la très grande qualité des producteurs, des documentaristes et des animateurs. À cet égard, je le rappelle, TF1 consacre chaque année à des oeuvres de fiction et de création une part extrêmement importante de son chiffre d'affaires - 16 %, soit 240 millions d'euros !
Un autre chantier a été lancé concernant les relations entre les producteurs et les diffuseurs.
Les décrets de 2001 de Mme Catherine Tasca et, parallèlement, le sous-quota d'oeuvres patrimoniales au sein des obligations d'investissement dans la production audiovisuelle imposées aux diffuseurs, ont été évoqués.
Je le dis très clairement : je suis attachée à ce sous-quota. Si son instauration a été quelque peu différée, ce n'est pas parce que je souhaite le voir disparaître au profit de grands groupes dont je voudrais faciliter le développement. La raison en est que les décrets Tasca, dont la motivation était intéressante et certains effets tout à fait positifs, ont aussi produit des effets pervers concernant la circulation et la diffusion des oeuvres.
Chacun s'accorde à dire qu'il faut moderniser ces décrets. C'est dans cet esprit que nous avons confié à des personnalités très engagées sur le plan culturel, David Kessler et Dominique Richard, la mission de mener une réflexion à cet égard. La question du sous-quota d'oeuvres patrimoniales doit faire partie de cette problématique globale. Nous présenterons prochainement, dès le début de 2008, des propositions tendant à moderniser le système, tout en respectant les intérêts des divers acteurs, qu'il s'agisse des producteurs, des auteurs ou des diffuseurs.
En revanche, le dossier des seuils de concentration, qui concerne la question plus globale du développement des grands groupes, n'est pas encore ouvert. Il faut avoir présent à l'esprit que ceux que nous considérons, dans le domaine de l'audiovisuel, comme de grands groupes, ne le sont pas du tout si on les compare avec des groupes de télécommunications ou des groupes étrangers.
Telles sont les perspectives pour notre paysage audiovisuel.
Louis de Broissia a évoqué, plus particulièrement, les décrochages régionaux de France 3 et leur financement ; nous y réfléchissons actuellement. J'ai d'ailleurs été saisie de cette question par les responsables de France Télévisions. On pouvait considérer, en effet, que ces décrochages étaient financés par le COM, mais ce document mentionne un financement ad hoc. Nous évoquerons cette question importante très prochainement avec M. le Premier ministre, que j'ai déjà saisi du sujet.
M. Lagauche a affirmé que nous ne tiendrions pas le calendrier des évolutions technologiques futures. Je tiens à le rassurer : tout se déroule comme prévu et chaque étape est franchie en temps et en heure. Le passage au numérique aura lieu dans les délais prévus. Les appels d'offres ont, d'ores et déjà, été lancés par le CSA, et M. le Premier ministre présentera, au printemps, le schéma, comme cela avait été annoncé.
Pour les chaînes, le passage au numérique permettra des économies de diffusion qu'il est difficile, pour l'instant, d'évaluer de façon très exacte, mais qui pourraient atteindre les 200 millions d'euros. Certes, les nouvelles technologies coûtent de l'argent mais, parallèlement, le passage au numérique permet d'en économiser, et il est important de le souligner.
La télévision mobile personnelle n'était pas prévue dans le COM de France Télévisions. Mais elle peut assurer son financement en engendrant ses propres ressources, par exemple par le biais des abonnements, si l'on retient ce modèle-là.
L'audiovisuel extérieur, source d'interrogation, voire de perplexité, est un dossier fort complexe depuis longtemps, et encore plus depuis la création de France 24. Nous y consacrons au total 360 millions d'euros. Ce chiffre est, en fait, assez comparable à celui des investissements réalisés par nos voisins européens. Cependant, nos investissements sont plus éparpillés. La démarche qui a inspiré le rapport dont il est question aujourd'hui dans la presse vise précisément à donner plus de cohérence à l'ensemble.
Ce rapport, qui a été coordonné par l'Élysée - toutes les auditions s'y sont déroulées - a été lancé lors d'une réunion chez M. le Premier ministre, en raison de l'aspect interministériel du dossier. La Direction du développement des médias, la DDM, les services de la Direction de l'audiovisuel extérieur du ministère des affaires étrangères ainsi que les cabinets de ce ministère et de celui de la culture ont participé à son élaboration. Il s'agit donc d'un travail collectif.
Pour autant, nous en sommes seulement au stade du rapport et les décisions ne sont pas prises. Nous choisirons avec le Président de la République, le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères, au cours d'une réunion de travail, les propositions qu'il conviendra de conserver.
L'idée retenue est la constitution d'une holding. On ne pourra cependant pas avancer très vite sur ce dossier de l'audiovisuel extérieur, dont M. Duvernois a rappelé toute la complexité, à cause de la diversité des historiques, des actionnariats et des objectifs poursuivis, sans omettre la diversité des statuts, notamment ceux des journalistes.
Il faut donc avancer prudemment, mais avancer tout de même et trouver des synergies, car ce sujet est à l'ordre du jour depuis longtemps.
Ce dossier contient des points forts : la distribution et la diffusion pour TV 5, l'information pour France 24 - une petite chaîne qui commence à s'affirmer -, mais aussi, cela a été justement souligné, l'implantation de RFI et la force de ses réseaux.
M. Belot a fait remarquer que le système, cependant, ne fonctionnait pas bien et que les acteurs ne se connaissaient pas : les ambassadeurs ne connaissent pas les responsables, et ceux-ci ne se connaissent pas les uns les autres. Cela marque une faiblesse du paysage actuel.
TV 5 et France 24 seraient donc réunies au sein d'une holding, qui assumerait les fonctions de support. Par ailleurs, un groupement d'intérêt économique serait chargé de gérer la ressource Internet, et un autre l'agence auprès de laquelle les journalistes des chaînes pourraient puiser l'information, la traiter et l'éditorialiser en fonction de la culture propre à chaque chaîne.
Il ne s'agit, à ce stade, que d'un projet. On pourrait d'ailleurs imaginer une structure de préfiguration dont la mission serait de travailler sur ce projet et, notamment, sur sa faisabilité. Différents problèmes, comme celui du partenariat, doivent en effet être réglés.
TV 5 est, clairement, une chaîne francophone. Nos partenaires ont d'ailleurs fait connaître leurs interrogations, à Lucerne. Nous ne devons pas gâcher ce qui fait la force et l'originalité de TV 5, c'est-à-dire sa nature d'espace francophone. Il nous faudra, de toute façon, avancer avec nos partenaires.
D'autres problèmes, d'ordre financier et social, sont également à résoudre.
Le rapport apporte donc de bonnes bases et des pistes de réflexion intéressantes dans ce dossier, qui n'est pas simple. Il reste, ensuite, à prendre des décisions, auxquelles il est souhaitable que la représentation nationale - notamment le Sénat, très concerné par ces sujets - soit associée. Nous pourrons ainsi avancer dans la transparence, en nous inspirant des réflexions des uns et des autres.
Mme Cerisier-ben Guiga a souligné l'intérêt que représentent Internet et les pôles multimédias pour l'audiovisuel extérieur. Internet peut être effectivement une solution particulièrement intéressante dans certaines zones. Quant à la télévision et à la radio - pour cette dernière, dans le cas de l'Afrique, par exemple -, elles peuvent représenter une très bonne réponse dans d'autres zones.
S'agissant du financement de France 24, il est vrai que le montant figurant dans le budget est de 70 millions d'euros, alors que la convention passée avec l'État prévoit une somme de 88, 5 millions d'euros. Le Premier ministre s'est engagé, dans un courrier dont je dispose, à trouver ce financement complémentaire en cours d'année. Cet engagement sera tenu au cours de l'année 2008.
M. David Assouline sourit.
Il existe, par conséquent, une large palette de solutions et de nombreuses missions à préciser. Il ne s'agit, là encore, que de pistes, car nous en sommes toujours au stade de la réflexion, les décisions n'étant pas encore prises, je le répète.
M. Duvernois a évoqué la chaîne RFI, qui pose, il est vrai, un problème particulier. Plusieurs orateurs ont également souligné que, depuis plusieurs années, le financement de RFI n'était pas satisfaisant.
Nous travaillons à l'élaboration d'un COM pour RFI, afin que s'engagent une réforme et une réflexion, et que soient clarifiés les objectifs et les moyens. Il est important que ce travail préalable soit mené en concertation avec RFI, avant d'envisager l'intégration de cette chaîne au sein de la nouvelle structure de l'audiovisuel extérieur.
Monsieur Ralite, il n'y a eu, naturellement, aucune vente aux enchères de fréquences hertziennes ! S'agissant du « dividende » numérique ou de ce qu'il pourra être, j'ai au contraire personnellement défendu l'idée qu'il fallait garder toutes les possibilités de développements futurs, très gourmands en fréquences, de notre audiovisuel.
Il ne faut donc rien préempter, car le dividende numérique doit d'abord servir au développement de notre audiovisuel, avant celui des télécommunications.
La mise aux enchères de fréquences hertziennes a lieu dans certains pays, comme l'Angleterre. Cette idée est d'ailleurs défendue par Vivian Reading, la commissaire européenne pour la société de l'information et les médias. C'est une idée que je combattrais avec force, pour ma part, si l'occasion m'en était donnée, mais elle n'est pas à l'ordre du jour dans notre pays.
Louis de Broissia a souligné l'effort important fait en faveur de la presse, soit 288 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de plus de 6 % par rapport à 2007. Ces crédits sont destinés à la modernisation de la presse et à l'amélioration de sa diffusion.
Nous nous sommes ainsi fortement engagés dans la réforme des Nouvelles messageries de la presse parisienne, les NMPP, auxquelles nous consacrons 12 millions d'euros, contre 8 millions d'euros auparavant, ce qui permettra de multiplier les points de vente et de rendre la presse plus accessible. La première force des journaux gratuits, je le rappelle, c'est justement qu'on peut les trouver un peu partout. L'augmentation de 500 points de vente a, d'ores et déjà, entraîné une hausse des ventes de journaux.
Une réflexion d'ensemble sur la presse est certainement à mener. De nombreuses questions se posent, notamment celles qui sont liées au développement de la presse sur Internet et, par conséquent, au problème des droits d'auteur. J'ai d'ailleurs reçu, ce matin, une intersyndicale de journalistes, avec lesquels nous avons évoqué divers sujets.
Je ne sais pas s'il faut réunir un « Valois » de la presse, mais une réflexion globale est nécessaire, car ce secteur est en pleine mutation. Nous sommes tout à fait prêts à nous associer à cette réflexion.
Nous avons, d'ores et déjà, engagé une démarche de développement de la presse. Dans les deux affaires concernant Les Échos et La Tribune, de nombreuses garanties ont été données. Celles qui avaient été spécifiées par Pearson, lors de la vente de La Tribune, ont été reprises par l'acheteur. Le combat mené par les rédactions en vue de l'affirmation de leur indépendance constitue d'ailleurs un gage très explicite de la préservation de cette indépendance. Le Gouvernement a suivi de près cette affaire et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes examine actuellement l'ensemble du dossier.
M. Claude Belot a posé une question sur les décrets d'application de l'article 14 de la loi de finances pour 2007. Nous recherchons actuellement une solution afin de rendre applicable cette disposition que vous avez adoptée l'année dernière. Un amendement en ce sens a été voté, hier, par la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans le cadre de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2007. Nous espérons que ce problème sera bientôt résolu.
Nous vivons une période de grandes mutations, mutations que nous voudrions accompagner en réalisant les modernisations nécessaires tout en respectant les équilibres dans un secteur difficile, dont les acteurs - auxquels, je le disais, je suis très attentive - sont très fortement engagés et qui tient terriblement à coeur à chacun, car, comme le disait Jack Ralite, il représente une part très importante de notre vie quotidienne.
Vouloir développer des grands groupes n'est pas mal en soi. En revanche, il faut développer parallèlement notre audiovisuel public, veiller à ce que l'audiovisuel extérieur ait une voix plus forte et plus cohérente, accompagner aussi, bien sûr, la presse et les radios dans leurs évolutions.
C'est donc un mouvement d'ensemble qu'il faut conduire et c'est dans cet esprit que j'aborde les différents chantiers qui ont été ouverts. Ces chantiers sont d'ailleurs confiés à des personnalités qui connaissent bien les questions et qui sont susceptibles d'entendre assez finement les attentes fortes des uns et des autres.
Pour terminer, je ne crains pas de dire que nous pouvons être fiers de notre audiovisuel, qui reste exemplaire comme l'on peut s'en rendre compte dès que l'on voyage !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Nous allons procéder à l'examen de l'amendement portant sur les crédits de la mission « Médias » figurant à l'état B.
(En euros)
Mission
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Médias
Presse
Chaîne française d'information internationale
Audiovisuel extérieur
L'amendement n° II-15, présenté par M. Belot, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. Créer le programme : « Action audiovisuelle extérieure »
II. Supprimer les programmes : « Chaîne française d'information internationale, Audiovisuel extérieur »
III. En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Presse
Chaîne française d'information internationale
Audiovisuel extérieur
Action audiovisuelle extérieure
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Cet amendement traduit notre volonté de regrouper le plus possible les programmes qui concernent l'audiovisuel public, afin d'avoir une unité d'action y compris en termes budgétaires, en les fusionnant dans un même programme, ce qui facilitera le contrôle.
J'ai cependant cru comprendre, madame la ministre, que cette évolution était d'ores et déjà en marche, mais qu'il s'agissait d'un mécanisme d'horlogerie assez complexe à régler.
L'esprit n'étant pas de vous gêner dans votre action, à vous de décider : si vous estimez que cet amendement vous gêne, je le retirerai, mais si vous nous dites qu'il vous arrange, je ne doute pas que le Sénat le votera !
Sourires.
Monsieur le rapporteur spécial, j'ai en effet évoqué la réforme de l'audiovisuel extérieur qui va, je le souhaite, être enfin lancée. Aussi, si je comprends très bien votre souci d'une plus grande cohérence, laquelle pourrait, comme vous le suggérez, être atteinte par la réunion des crédits sur une même ligne, je ne suis pas très favorable à ce stade à une telle modification, car nous allons justement commencer à étudier les nouveaux schémas.
Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-15 est-il maintenu ?
Nous ne voulons pas nuire à l'action gouvernementale et nous retirons l'amendement, mais j'espère, madame la ministre, que nous n'aurons pas à déposer le même l'année prochaine et que vous aurez alors réglé cette affaire au mieux des intérêts de notre pays.
L'amendement n° II-15 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Médias » figurant à l'état B.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote sur cette mission avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de cette mission.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Compte spécial : avances à l'audiovisuel public » figurant à l'état D.
En euros
Mission
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Avances à l'audiovisuel public
France Télévisions
ARTE-France
Radio France
Radio France Internationale
Institut national de l'audiovisuel
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote sur cette mission avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de cette mission.
Ces crédits sont adoptés.
Avances à l'audiovisuel public
J'appelle en discussion l'amendement portant article additionnel avant l'article 62 qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Compte spécial : avances à l'audiovisuel public ».
L'amendement n° II-54, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Avant l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « À compter du 1er janvier 2009, ce montant est revalorisé, chaque année, dans la même proportion que l'indice des prix à la consommation ».
La parole est à M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis.
Madame la ministre, nous n'avons pas pu réussir voilà deux jours à réévaluer le montant de la redevance. Ainsi, le pouvoir d'achat de l'audiovisuel public se dégrade-t-il d'année en année, comme je le dis depuis maintenant neuf ans dans mes rapports et comme je l'ai encore redit avant-hier, mais, avant-hier comme il y a trois ans, les groupes politiques ne m'ont pas beaucoup soutenu... Je le dis au passage, mais c'est un peu dommage, parce que les années passent sans que nous ne réévaluions les moyens de l'audiovisuel public.
J'ai bien entendu le Président de la République, madame la ministre. Si cela vaut pour les loyers, cela vaut aussi pour la redevance, et il faut faire en sorte que la redevance soit revalorisée chaque année dans la même proportion que l'indice bien connu des prix à la consommation.
Il faut donner à l'audiovisuel public les moyens de ne plus dépendre - et je m'adresse également au président de la commission des finances - de crédits budgétaires de plus en plus importants. J'ai ainsi rappelé que nous étions passés à 65 millions d'euros sur le budget cette année.
Celui qui ne paie pas par la redevance paie par l'impôt, celui qui ne paie pas par l'impôt paie par la publicité... Le Français paie toujours, car, comme je l'ai dit à Jack Ralite, l'information gratuite n'existe pas. L'information, qu'elle soit publique ou privée, a un coût, et, ce coût, c'est la redevance qui l'assure.
Il faut donc réévaluer la redevance si l'on ne veut pas que l'information dépende un jour un essentiellement de crédits budgétaires, c'est-à-dire de crédits de l'État susceptibles d'évoluer selon les politiques publiques. J'espère donc avoir le soutien unanime de la Haute Assemblée !
Monsieur le président, je suis un peu embarrassé : vous assistez depuis des années à un numéro de duettistes entre Louis de Broissia et moi. Nous avons toujours fait corps sur les intérêts de la communication et de l'audiovisuel public, mais je suis obligé de rappeler à mon collègue rapporteur pour avis qu'en première partie le Sénat a rejeté la réévaluation de la redevance. Or il n'est pas possible, au nom de l'équilibre budgétaire, que le Sénat refuse d'un côté et accepte de l'autre.
La commission des finances ne peut donc qu'émettre un avis défavorable.
Cela étant dit, il y a là matière à un vrai débat.
Premièrement, on nous assène en permanence qu'il faut réduire les prélèvements obligatoires, mais on a le choix d'avoir ou non une télévision et, à mon avis, la redevance ne s'analyse donc pas comme un prélèvement obligatoire.
Deuxièmement, avant le service de la redevance, il y avait une recette dont le produit était affecté intégralement à une action particulière : si la marée montait, les moyens montaient. C'était cela, le système ! Bercy, à l'époque, essayait toujours de se contenter des avances sur douzième de l'année précédente.
Avec mon vieux complice, nous nous attachions à connaître les rentrées exactes. Les comptables du service de la redevance savaient en effet quel montant ils donnaient à l'État et ils nous le communiquaient, ce qui nous permettait de nous assurer que le produit de la redevance était reversé intégralement à son objet d'affectation.
Il nous est arrivé plusieurs années de prendre le Gouvernement - quelle qu'ait été d'ailleurs sa couleur - en flagrant délit de captation pour d'autres usages, et notre rôle était alors de tenter d'y remédier en loi de finances rectificative.
Mais il n'y avait pas de crédits budgétaires, hormis les compensations sociales. Or, aujourd'hui, le système est totalement renversé.
On voit l'État qui s'arc-boute pour que le montant de la redevance, ne varietur, n'augmente pas et qui, constatant que le produit est insuffisant, ayant déjà garanti 3, 6 % à France Télévisions, 4, 1 % à Arte et ainsi de suite, prend l'engagement de payer puisque ce sont des ressources certaines : la redevance ne suffisant plus, il va devoir rembourser cette année 495 millions d'euros au titre des exonérations.
Pour participer à la vie de la commission des finances depuis près de vingt, je puis dire que nous avons toujours essayé de trouver des ressources convenables - sans « plumer la volaille » à l'excès, mais ce n'est pas le sujet. Or, avec ce système, c'est l'État lui-même qui va être obligé de payer sur les crédits budgétaires des sommes qu'il avait les moyens d'encaisser.
Cela signifie d'ailleurs, au terme de mon raisonnement, que France Télévisions n'aurait pas eu d'argent en plus par rapport aux 3, 6 % garantis, mais la compensation par le budget de l'État aurait pu se faire à un moindre niveau.
Voilà, sous l'angle de l'arithmétique basique, la réalité des comptes de la nation. J'ai le sentiment que l'on raisonne mal, mais c'est ainsi.
En tout état de cause, mon cher Louis, la commission des finances a tranché et le Sénat l'avait déjà fait en première partie : la messe est dite pour cette année. Préparez vos prières pour l'année prochaine !
Sourires.
Il a en effet été décidé de ne pas augmenter la redevance en 2008 pour répondre à des préoccupations de maintien du pouvoir d'achat.
Pour 2009, ce sujet fera partie des réflexions qui seront menées au moment de l'élaboration du budget, mais aussi dans le cadre de la réflexion d'ensemble sur l'audiovisuel public.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour ma part, je ne crois pas que cette question soit définitivement tranchée, et pourtant, comme vous le savez, je suis un vieux conventionnel régicide !
Sourires.
Face aux défis que rencontre l'audiovisuel public aujourd'hui, que ce soit la concurrence accrue avec la TNT, l'Internet, les groupes de communication, le maintien de son originalité et de sa vocation culturelle passent par l'augmentation de ses ressources.
Il est clair qu'augmenter la part de la publicité revient à nuire à la spécificité même de la télévision publique. De surcroît, cela fragilise l'économie sous perfusion de la presse écrite.
Je sais bien que l'augmentation de la redevance est devenue un sujet tabou...sauf, je l'ai bien noté, pour les personnes de plus de soixante-cinq ans dont l'exonération est scandaleusement supprimée malgré la faiblesse de leurs revenus.
Une chose est certaine, sans moyens supplémentaires, France Télévisions ne pourra faire face aux multiples défis à relever : le développement de la TNT, que j'ai déjà évoqué, celui de la haute définition, la télévision mobile personnelle, le sous-titrage, la création artistique...
Il faudra bien sortir de ce cercle vicieux. Tous les soirs, au théâtre de La Huchette, on peut entendre cette réplique de La Cantatrice chauve de Ionesco : « Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux ! » Eh bien, Louis de Broissia est la première victime expiatoire !
Sourires
Il faudrait sérieusement mener une étude afin de trouver les meilleures solutions pour accroître le rendement de la redevance. Il y a certainement plusieurs solutions à creuser.
On sait que notre redevance est l'une des plus faibles d'Europe. On peut donc envisager d'augmenter son montant, sachant qu'une augmentation de 1 euro correspond à 20 millions d'euros de ressources supplémentaires.
On peut l'indexer sur le coût de vie, comme le prévoit en quelque sorte l'amendement de Louis de Broissia.
On peut augmenter son périmètre. Pourquoi en effet ne pas mettre à contribution ceux, de plus en plus nombreux, qui ont accès aux programmes via l'Internet haut débit, la téléphonie mobile ou personnelle ?
Enfin, on peut, comme cela a été proposé tout à l'heure, étendre la redevance à la télévision diffusée grâce aux fournisseurs d'accès à Internet.
Puisque presque tout le monde s'acquitterait de la redevance, on pourrait même envisager une redevance beaucoup moins élevée pour chacun, tout en maintenant, bien sûr, les exonérations à caractère social.
Les médias vivent une période révolutionnaire. Dès lors, monsieur Belot, pourquoi ne pas révolutionner le système de la redevance ?
Avec la refonte de la réglementation de la publicité, l'audiovisuel public pourra de moins en moins compter sur les recettes publicitaires, qui, de leur côté, alimentent de plus en plus Internet, en passe de devenir le premier des médias.
Sur le fond, il est essentiel de maintenir et de développer un service public audiovisuel de qualité. Le passage au numérique est l'occasion de favoriser les programmes de création, l'imaginaire, la diversité d'expression. Il ne suffit pas d'améliorer les tuyaux, nous sommes tous d'accord sur ce point, il faut également améliorer les contenus et combattre en permanence la standardisation.
Quand il en a les moyens, le service public sait faire ; il l'a montré et le montre encore.
Nous avons plus que jamais besoin d'une société de partage de la culture et de l'émotion, des connaissances des oeuvres de l'esprit. Cela suppose que l'État joue son rôle d'actionnaire et qu'il conforte les moyens du service public dans ses missions sans être prisonnier du seul critère d'audience.
L'augmentation prévue par le contrat d'objectifs et de moyens n'y suffira pas. Il est urgent de trouver des solutions de financement pour remettre la pensée, l'intelligence et le sensible au coeur du monde de l'image et du son.
Cet amendement est contradictoire, car il vise à augmenter la redevance sans remettre en cause la suppression de l'exonération pour les personnes âgées.
Néanmoins, nous surmonterons cette contradiction la tête haute et nous voterons l'amendement !
Sourires
Nous sommes en pleine incohérence. Pour un peu, je serais presque tenté de rejoindre les rangs de la commission des finances, mais j'ai beaucoup d'attachement à la commission des affaires culturelles, à son président et à tous ses membres. (Sourires.)
En effet, si j'étais membre de la commission des finances, je ne pourrais pas mieux dire que Claude Belot : l'État se tire une balle dans le pied, madame la ministre ! Nous vous proposons une réévaluation de la redevance qui est d'autant plus acceptable qu'elle n'atteindrait pas de toute manière les niveaux pratiqués par nos voisins européens. Je vous rappelle que la redevance est d'ores et déjà de 384, 85 euros en Autriche et de 204, 36 euros en Allemagne.
Même les Wallons font mieux que nous !
Ils ont fixé leur redevance à 149, 60 euros. En Finlande - Ah, le modèle scandinave ! - elle atteint 220, 70 euros et en Irlande 155 euros. En Italie, certes, elle n'est que de 99, 60 euros. Mais voulons-nous un paysage audiovisuel à l'italienne ? A priori non, même si, à l'époque de François Mitterrand on a fait venir Berlusconi en France. Je m'en souviens bien, j'étais déjà parlementaire.
Nous sommes donc en pleine incohérence. Nous proposons au Gouvernement de réévaluer la redevance, mais il refuse, en première partie comme en seconde partie.
On demande à l'audiovisuel public d'avoir une marque culturelle, mais, lorsqu'il diffuse Le Trouvère ou une pièce de Sacha Guitry, il ne perçoit pas de recettes publicitaires, il perd même 500 000 euros de recettes.
Veut-on un audiovisuel public de qualité ? Veut-on que l'État ait des moyens ? Je propose une solution d'une simplicité biblique que le conseil municipal de mon village de 119 habitants comprendrait aisément. On me la refuse et je ne comprends pas !
été très intéressé par cet échange de duettistes où chacun est dans son rôle.
Nous sommes fiers de l'audiovisuel public français, c'est vrai, mais nous n'avons pas tranché un certain nombre de contradictions. En somme, on veut tout, la redevance et la publicité !
À l'occasion d'une récente audition du président de France Télévisions, il m'était apparu qu'en matière de gestion de l'audiovisuel public nous avions encore quelques marges de progression.
Si, d'un côté, on peut rechercher un supplément de recettes par une réévaluation de la redevance, peut-être quelques réformes structurelles reste-t-il encore à achever qui, pour certaines, semblent au milieu du gué.
C'est également la responsabilité du Gouvernement d'indiquer très clairement aux responsables de l'audiovisuel public comment on entend l'administrer et remédier à un certain nombre de situations qui peuvent évoluer dans le sens d'une meilleure maîtrise des dépenses engagées.
Nous souhaitons, monsieur de Broissia, que l'audiovisuel public remplisse bien sa mission, mais nous ne sommes pas sûrs que la meilleure façon d'y parvenir soit de prévoir une augmentation fondée sur l'indice du coût de la vie. Peut-être faudra-t-il aller au-delà, si un jour on tranche entre publicité et redevance.
Il ne faudrait pas se priver non plus d'une évolution dans la structuration, même au plan juridique. M. de Carolis nous disait d'ailleurs que cette organisation en silo n'était peut-être pas optimale et que certains bienfaits seraient à attendre d'un décloisonnement juridique.
La réévaluation automatique du montant de la redevance ne me semble pas être un bon choix.
J'ai le regret de le confirmer à nos collègues de la commission des affaires culturelles, nous sommes défavorables à cet amendement. C'est peut-être dur à entendre, mais c'est la position des membres de la commission des finances. Et nous n'avons que de l'affection et de l'attachement pour l'audiovisuel public, comme Claude Belot en a témoigné avec beaucoup de conviction.
Nous travaillons ensemble, les auditions publiques se font conjointement, et d'autres occasions se présenteront encore. Pour l'heure, je serai très intéressé par les réponses que le Gouvernement ne manquera pas de donner, dans les mois qui viennent, au souhait exprimé par le président de France Télévisions.
Explication de vote, peut-être, monsieur le président, à supposer qu'il y ait vote, ce qui n'est pas certain !
Avec l'intervention de M. Arthuis, nous avons compris que la commission des finances ne voulait pas accorder au service public audiovisuel les moyens nécessaires à son bon fonctionnement.
Pour continuer à être un grand service public, France Télévisions doit disposer de ressources. Il est absolument normal que le grand actionnariat populaire dont parlait Jack Ralite soit la source de ce financement. Sinon, c'est effectivement l'État qui se tire une balle dans le pied !
Je suis très étonné que l'on nous dise d'attendre au motif qu'il existe des marges de progression dans le cadre d'une restructuration future de France Télévisions. C'est un peu comme si l'on décidait un plan d'économies pour rendre plus utile une augmentation des moyens.
J'ai entendu M. de Carolis, je lui ai posé des questions précises, notamment sur la nécessité d'être plus efficace, plus dynamique, plus rationnel dans cette restructuration. Je lui ai dit que, si l'on dégageait des moyens, ils serviraient à rendre la vie des personnels plus agréable, à augmenter leurs salaires et non pas à faire des économies et à licencier.
Je constate qu'il y a deux visions des choses. Les moyens dont dispose aujourd'hui France Télévisions sont insuffisants et la course à la publicité, la course à l'audimat, lui est imposée par ses concurrents, au détriment d'un certain nombre de programmes de qualité.
Un jour France Télévisions fait un bon coup avec une pièce de théâtre, mais elle n'a pas les moyens de le réitérer, car elle ne peut pas lutter contre les programmes concurrents et leurs séries américaines qui attirent un maximum d'audimat et de publicité.
Il faut adopter cet amendement. Au reste, il n'est pas correct de parler d'augmentation de la redevance, elle qui n'a pas été réévaluée depuis neuf ans. Il s'agit plutôt de suivre le coût de la vie. Ce n'est qu'un rattrapage.
Non seulement les redevances sont plus élevées chez nos voisins européens, mais elles peuvent même faire l'objet de nouvelles augmentations, comme en Allemagne, où la redevance est passée de 196 euros à 204 euros pour 2005, et cela n'a suscité aucun remous à l'époque.
Je ne comprends pas pourquoi les solutions pourtant évidentes de la commission des affaires culturelles sont à chaque fois retoquées. Peut-être est-ce parce que l'on ne veut pas les assumer et risquer de déplaire aux électeurs... Il y va cependant de notre honneur de savoir prendre des mesures justes et pas seulement démagogiques !
Quand j'écoute M. le président de la commission des finances, je me dis que c'est la voix de la raison. Mais encore faudrait-il, pour que je l'apprécie tout à fait, que cette voix parle toujours le même langage. Or, monsieur le président de la commission des finances, que je sache, le vote qui est intervenu mardi, sur la suggestion de Free, n'a pas posé de cas de conscience sur les dépenses que cela occasionnera, y compris pour l'État...
En outre, cela fait des années que l'on fait des cadeaux coûteux aux grands groupes, mais les diffuseurs demandent toujours la suppression de règles trop contraignantes qui les handicapent, alors que, comme je l'ai démontré, ils gagnent bien leur vie, puisqu'ils augmentent leurs dividendes.
Quand on supprime l'exonération de la redevance pour les personnes âgées, c'est le budget de l'État qui empoche la somme correspondante. Il n'y a qu'un perdant : le service public !
Il faut savoir si l'on veut d'un service public à finalité culturelle. Au point où nous sommes rendus, il me semble que l'on n'en veut pas, en haut lieu.
Je voterai l'amendement, c'est une question de principe !
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
Depuis quelques années, madame la ministre, nous essayons de convaincre les gouvernements successifs que l'audiovisuel ne peut pas rester immobile.
Lorsque nous rédigeons les contrats d'objectifs et de moyens, nous nous efforçons, sur la proposition de ceux qui en sont responsables et sous le contrôle du Gouvernement, d'apporter notre contribution de sorte que l'audiovisuel public soit à la mesure des attentes de nos concitoyens.
Le contrat d'objectifs et de moyens précédent, que nous avons étudié avec soin et dont nous étions satisfaits, définissait de nouveaux objectifs.
M. le président de la commission des finances souhaite une rigueur accrue dans l'utilisation des crédits mis à disposition de France Télévisions, il souhaite que des économies soient réalisées. M. de Carolis nous a montré, lors de son audition, les efforts qui étaient faits en ce sens.
En outre, nous avons souhaité une restructuration profonde de cette société très composite. Là encore, M. de Carolis nous a assuré récemment qu'une telle réforme était en cours, notamment à France 3, où des négociations, au reste difficiles, sont conduites par les responsables de la chaîne, qui ont fait des propositions aux personnels.
Monsieur Ralite, j'ajouterai un dernier élément, qui n'a pas été évoqué de façon explicite ce soir : le Président de la République, ainsi que, par conséquent, le Premier ministre et Mme la ministre de la culture et de la communication, ont donné des instructions pour que France Télévisions assure sa mission culturelle.
C'est pourquoi, au lieu de chercher à faire de l'audimat à tout prix, les chaînes publiques ont diffusé des programmes de qualité, avec des résultats très divers : si la retransmission d'oeuvres lyriques a été un échec relatif, il n'en a pas été de même pour le genre dramatique, comme l'a montré l'incontestable succès de la pièce de Sacha Guitry, Faisons un rêve.
Madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, on ne peut pas à la fois demander sans cesse aux chaînes publiques des efforts supplémentaires et limiter les ressources que l'on met à leur disposition ! Comme Louis de Broissia l'a souligné, la commission des affaires culturelles considère que les moyens dont disposent M. de Carolis et son équipe ne sont pas suffisants.
Depuis plusieurs années, nous réclamons une augmentation de la redevance, dont le niveau resterait extrêmement modeste, je le rappelle, surtout par rapport à ce qui se pratique dans les autres pays européens. Or, à chaque fois, la commission des finances rejette notre demande et certains groupes refusent de nous suivre, ce qui nous étonne beaucoup, d'ailleurs.
Nous faisons aujourd'hui une nouvelle tentative, non par obstination, mais par souci de cohérence avec ce que nous pensons depuis de longues années. D'ailleurs, ce point de vue est largement partagé au sein de la commission des affaires culturelles : il ne s'agit pas d'une foucade de Louis de Broissia et de Jacques Valade !
Nous nous efforçons d'indexer cette ressource sur le coût de la vie, tout simplement, et avec un retard considérable car, depuis neuf ans, on doit à la télévision publique des sommes qui ne sont pas négligeables et qui permettraient des réalisations importantes.
Mes chers collègues, gardons à l'esprit que l'augmentation de la redevance acceptée par le Gouvernement dans le budget pour 2008 sera presque entièrement absorbée par la mise à niveau technologique.
Nous ne pouvons pas demander aux chaînes publiques de mettre en place la TNT, la TVHD et éventuellement la TMP, dont le coût est incontestable, et en même temps leur refuser les moyens financiers correspondants. Certes, l'effort consenti cette année n'est pas négligeable, mais il nous paraît insuffisant.
Je regrette profondément de me trouver en contradiction avec mes éminents collègues de la commission des finances, et notamment son président, mais, pour ma part, je voterai cet amendement.
Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-54 est-il maintenu ?
Je mets aux voix l'amendement n° II-54.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 44 :
Le Sénat n'a pas adopté.
J'appelle en discussion l'article 62, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Compte spécial : avances à l'audiovisuel public ».
Le deuxième alinéa du 3° de l'article 1605 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Le bénéfice de ce dégrèvement est maintenu à partir de 2006 s'agissant des redevables visés au B du IV de l'article 37 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) et pour les seules années 2006 et 2007 s'agissant des redevables visés au A du même IV, lorsque : ».
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 62 du projet de loi de finances nous paraît prendre la question du financement de l'audiovisuel public par le mauvais bout.
En effet, voilà qu'au détour d'un amendement déposé à la dernière minute lors du débat à l'Assemblée nationale se trouve remis en cause le principe d'exonération de la redevance audiovisuelle d'un certain nombre de personnes disposant d'un récepteur de télévision.
En l'espèce, il s'agit de personnes ainsi définies par le rapport de notre collègue Claude Belot : « Selon les informations fournies à votre rapporteur spécial par le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, le projet de loi de finances initiale pour 2008 s'est basé sur l'hypothèse de 25 675 879 foyers assujettis et 4 380 852 dégrevés sur rôle, soit 14, 6 % de l'ensemble des foyers. Il a été estimé que les personnes âgées ou handicapées exonérées de redevance jusqu'en 2007 représentaient 879 288 foyers, dont 780 000 ne satisferaient plus les critères d'exonération de la redevance audiovisuelle en 2008. »
Pour le dire clairement, près de 800 000 foyers supplémentaires devront s'acquitter de la redevance audiovisuelle. Or cette mesure, qui sera sans doute très mal comprise, et qui l'est déjà d'ailleurs, n'apportera pas un euro de plus au financement de l'audiovisuel public : le seul gagnant sera le budget général, qui se dispensera du coût de ces exonérations.
Près de 800 000 retraités vont donc, à leur corps défendant, participer à la réduction du déficit de l'État, mais la question posée par le financement de l'audiovisuel public ne sera pas résolue pour autant !
En effet, au moment où l'on met à contribution des personnes qui, pour certaines d'entre elles, ne payaient plus la redevance audiovisuelle depuis des années, tout est agencé pour offrir à certains opérateurs de télécommunications et à certains groupes privés de l'audiovisuel des conditions particulières, une sorte de régime spécial, dont le caractère ultralibéral est affiché.
Ce régime spécial, ce sont les « conditions de concession aménagées » de la quatrième licence UMTS, destinées à satisfaire les attentes d'un opérateur privé qui prétend ne pas disposer des moyens financiers de s'acquitter de son droit d'entrée.
Pendant qu'on reprend sans hésiter 40 millions d'euros d'exonérations de redevance aux personnes âgées, on discute encore sur la manière d'aménager le paiement par un opérateur de télécommunications des 619 millions d'euros de droit d'entrée sur la quatrième licence ! Pour les uns, c'est la potion amère, pour d'autres, des sucreries !
De la même manière, la loi sur la télévision du futur, masquant derrière le mirage des avancées techniques la guerre ouverte qui fait rage entre groupes de l'audiovisuel, offre sur un plateau - d'argent ! -, avec les recettes publicitaires potentielles à la clé, trois canaux de diffusion, les fameuses chaînes « bonus », aux sociétés de télévision privée historiques.
Le régime spécial, dans ces cas-là, c'est la rigueur pour le téléspectateur, alors même que la télévision demeure pour nombre de familles la principale pratique culturelle, et les facilités les plus éhontées pour les grands groupes privés de l'audiovisuel.
Il est contre-productif et injuste de refuser d'augmenter les ressources de l'audiovisuel public, et donc la redevance. La concurrence en matière audiovisuelle est désormais exacerbée : on s'arrache à prix d'or, et souvent avec des prix dépassant la raison, l'exclusivité de tel ou tel événement sportif. On tente de racoler le spectateur avec des programmes qui visent le plus possible au-dessous de la ceinture, entre braguettes et mitraillettes.
Sourires
M. Ivan Renar. À cette heure-ci, mon cher collègue, les enfants sont couchés !
Nouveaux sourires.
De même, on farcit littéralement les émissions de coupures publicitaires de plus en plus longues. Et je pourrais continuer la liste
Priver le secteur public des ressources qui découlent de la redevance, en refusant d'augmenter cette dernière, revient à le désarmer, encore plus sûrement que le partage de la manne publicitaire, face aux appétits des grands.
Cet article constitue une fausse réponse aux vraies questions du financement de l'audiovisuel public que j'évoquais tout à l'heure. Nous ne saurions donc le voter.
L'article 62 est adopté.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 110, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, vendredi 30 novembre 2007 :
À dix heures quarante-cinq :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (n° 90, 2007 2008).
Rapport (n° 91, 2007-2008) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Examen des missions :
- Justice
M. Roland du Luart, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 16) ;
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome III) ;
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome IV) ;
M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome V).
À quinze heures et le soir :
- Travail et emploi (+ articles 52, 53, 53 bis, 54 à 59)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 33) ;
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 95, tome VII).
- Solidarité, insertion et égalité des chances (+ articles 49 à 51 bis)
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 31) ;
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 95, tome VI).
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
La séance est levée le vendredi 30 novembre 2007, à une heure quarante-cinq.