Intervention de Ivan Renar

Réunion du 29 novembre 2007 à 22h00
Loi de finances pour 2008 — Article 62

Photo de Ivan RenarIvan Renar :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 62 du projet de loi de finances nous paraît prendre la question du financement de l'audiovisuel public par le mauvais bout.

En effet, voilà qu'au détour d'un amendement déposé à la dernière minute lors du débat à l'Assemblée nationale se trouve remis en cause le principe d'exonération de la redevance audiovisuelle d'un certain nombre de personnes disposant d'un récepteur de télévision.

En l'espèce, il s'agit de personnes ainsi définies par le rapport de notre collègue Claude Belot : « Selon les informations fournies à votre rapporteur spécial par le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, le projet de loi de finances initiale pour 2008 s'est basé sur l'hypothèse de 25 675 879 foyers assujettis et 4 380 852 dégrevés sur rôle, soit 14, 6 % de l'ensemble des foyers. Il a été estimé que les personnes âgées ou handicapées exonérées de redevance jusqu'en 2007 représentaient 879 288 foyers, dont 780 000 ne satisferaient plus les critères d'exonération de la redevance audiovisuelle en 2008. »

Pour le dire clairement, près de 800 000 foyers supplémentaires devront s'acquitter de la redevance audiovisuelle. Or cette mesure, qui sera sans doute très mal comprise, et qui l'est déjà d'ailleurs, n'apportera pas un euro de plus au financement de l'audiovisuel public : le seul gagnant sera le budget général, qui se dispensera du coût de ces exonérations.

Près de 800 000 retraités vont donc, à leur corps défendant, participer à la réduction du déficit de l'État, mais la question posée par le financement de l'audiovisuel public ne sera pas résolue pour autant !

En effet, au moment où l'on met à contribution des personnes qui, pour certaines d'entre elles, ne payaient plus la redevance audiovisuelle depuis des années, tout est agencé pour offrir à certains opérateurs de télécommunications et à certains groupes privés de l'audiovisuel des conditions particulières, une sorte de régime spécial, dont le caractère ultralibéral est affiché.

Ce régime spécial, ce sont les « conditions de concession aménagées » de la quatrième licence UMTS, destinées à satisfaire les attentes d'un opérateur privé qui prétend ne pas disposer des moyens financiers de s'acquitter de son droit d'entrée.

Pendant qu'on reprend sans hésiter 40 millions d'euros d'exonérations de redevance aux personnes âgées, on discute encore sur la manière d'aménager le paiement par un opérateur de télécommunications des 619 millions d'euros de droit d'entrée sur la quatrième licence ! Pour les uns, c'est la potion amère, pour d'autres, des sucreries !

De la même manière, la loi sur la télévision du futur, masquant derrière le mirage des avancées techniques la guerre ouverte qui fait rage entre groupes de l'audiovisuel, offre sur un plateau - d'argent ! -, avec les recettes publicitaires potentielles à la clé, trois canaux de diffusion, les fameuses chaînes « bonus », aux sociétés de télévision privée historiques.

Le régime spécial, dans ces cas-là, c'est la rigueur pour le téléspectateur, alors même que la télévision demeure pour nombre de familles la principale pratique culturelle, et les facilités les plus éhontées pour les grands groupes privés de l'audiovisuel.

Il est contre-productif et injuste de refuser d'augmenter les ressources de l'audiovisuel public, et donc la redevance. La concurrence en matière audiovisuelle est désormais exacerbée : on s'arrache à prix d'or, et souvent avec des prix dépassant la raison, l'exclusivité de tel ou tel événement sportif. On tente de racoler le spectateur avec des programmes qui visent le plus possible au-dessous de la ceinture, entre braguettes et mitraillettes.

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