Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 10 novembre 2010 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Articles additionnels avant l'article 9

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis :

À titre personnel, j’ai une part de responsabilité dans l’institution de la CADES.

Les années 1991, 1992 et 1993 – cette dernière ayant été marquée par la première récession que nous ayons connue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale – avaient mis à rude épreuve les finances sociales.

À l’époque, considérant qu’il s’agissait d’une situation tout à fait exceptionnelle, nous nous étions inspirés du modèle de la caisse d’amortissement de la dette de la SNCF, qu’un gouvernement précédent avait logée dans un « satellite », qui d'ailleurs a posé problème quelques années plus tard. Nous pensions qu’il n’y aurait plus jamais, par la suite, de déficit de la sécurité sociale.

Nous estimions donc que la CADES aurait une vie éphémère et que la CRDS suffirait à amortir la dette sociale au terme de quelques années. Peut-on financer par l’emprunt les dettes de la sécurité sociale ? Certainement pas. Malheureusement, le déficit est devenu chronique, et depuis 1996 les gouvernements successifs ont logé au sein de la CADES quelque 130 milliards d’euros de dette.

Or, comme cela ne suffit pas, l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, portant aujourd'hui une dette d’un montant considérable, ce qui ne correspond pas à sa vocation, il va falloir transférer à la CADES, au titre des années 2009, 2010 et 2011, 68 milliards d’euros supplémentaires. En outre, comme la réforme des retraites que nous venons de voter coûtera au moins 62 milliards d’euros entre 2012 et 2018, cette estimation étant fondée sur des hypothèses macroéconomiques optimistes, ce sont au total 130 nouveaux milliards d’euros qui vont s’ajouter aux 130 milliards d’euros initiaux, dont la CADES n’a pu rembourser à ce jour que 46 !

Quelle idée nous faisons-nous de la solidarité intergénérationnelle quand nous reportons ainsi le remboursement d’une montagne de dettes ? Nous nous comportons comme s’il s’agissait d’un endettement perpétuel, or nous avons le devoir d’enrayer ce processus.

Le Gouvernement affirme accomplir des efforts sans précédent pour contenir la dépense publique. Cela est vrai, puisque le déficit de l’État sera ramené de 152 milliards d’euros à 92 milliards d’euros, soit un recul de 60 milliards d’euros. Toutefois, cette réduction du déficit s’explique, à hauteur de 35 milliards d’euros, par le non-renouvellement de l’emprunt pour les investissements d’avenir, et à concurrence d’une douzaine de milliards d’euros par la fin du plan de relance. L’effort est donc en réalité bien modeste.

Au lendemain des conférences sur le déficit public, on nous annonçait une baisse de 5 % des dépenses de fonctionnement de l’État et des crédits d’intervention. Force est de constater qu’ils seront réduits de 0, 5 % à 1 % seulement… Nous éprouvons les pires difficultés à comprimer la dépense publique, et nous sommes donc dans l’obligation de relever la CRDS.

Monsieur le ministre, le tableau que vient de vous remettre M. le rapporteur pour avis de la commission des finances ne semble harmonieux que parce qu’il est agréablement coloré. En réalité, il est proprement illisible et incompréhensible. Il n’y a pas si longtemps, le Conseil constitutionnel a censuré des textes pour ce motif. Un jour viendra où il censurera également toute cette tuyauterie complexe. De grâce, mes chers collègues, décidons d’augmenter de 0, 26 point le taux de la CRDS ; nous sommes lucides, soyons courageux !

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