Intervention de Guy Fischer

Réunion du 17 novembre 2006 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Article additionnel avant l'article 54

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Nous ne « lâcherons » pas, parce que nous sommes convaincus que M. le Président de la République est très attaché, au-delà de ce qui peut se dire à l'heure actuelle, à ce problème.

Monsieur le ministre, jamais film n'a autant infléchi l'activité législative que Indigènes, de Rachid Bouchareb, qui retrace l'histoire des tirailleurs maghrébins pendant la Seconde Guerre mondiale. L'émotion provoquée par ce film, dont il faut saluer la qualité, a réveillé les consciences. Enfin ! Consécutivement au retentissement médiatique de cette oeuvre, le Gouvernement n'a donc eu d'autre choix que d'annoncer certaines mesures, par souci d'équité. Hélas ! tout cela n'est qu'apparence.

Dans un premier temps, engagement a été pris de revaloriser les pensions versées aux anciens combattants des ex-colonies françaises. Cependant, cette revalorisation n'est que partielle et a minima, puisqu'elle ne concerne que la retraite du combattant, soit 450 euros par mois, et les pensions militaires d'invalidité, soit moins de 700 euros par mois. Quid des pensions de retraite civiles et militaires ? Quid des pensions de réversion, un certain nombre de veuves étant laissées pour compte, en France ou dans le pays d'origine du bénéficiaire ? C'est toutefois un problème qui a été résolu en partie, ce dont nous nous réjouissons.

Mais, de fait, contrairement aux intentions affichées du Gouvernement, la « décristallisation » des pensions, que le groupe CRC n'a jamais cessé de réclamer, n'est toujours pas décidée. Cette aumône que j'évoquais à l'instant permettra au mieux d'étouffer la vague d'indignation provoquée par l'inégalité évidente de traitement entre anciens combattants étrangers et anciens combattants français, dont même Mme Chirac s'est, semble-t-il, offusquée à l'issue de la projection d'Indigènes.

Dans un second temps, annonce a été faite, par le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, de l'intention du Gouvernement de prendre en considération la retraite des vieux travailleurs migrants. Dans un élan charitable, M. Borloo a expliqué « ne pas vouloir qu'un immigré soit contraint de vivre en France alors qu'il n'en a pas envie ». Or, dans le même temps, monsieur le ministre, vous leur imposez de revenir en France régulièrement et d'y rester trois mois par an.

Faut-il le rappeler ? Si ces anciens travailleurs ont besoin de ce minimum vieillesse, c'est bien parce qu'ils ont exercé les métiers les plus pénibles et les moins bien rémunérés. C'est aussi parce qu'ils ont été parfois victimes d'employeurs peu scrupuleux profitant de leur condition d'immigrés, qui les ont exploités sans toujours déclarer la totalité de leurs heures de travail.

De même, si nombre d'entre eux présentent des pathologies, c'est bien parce qu'ils étaient en contact avec des matériaux de construction dangereux, comme l'amiante, ou qu'ils ont été victimes d'accidents du travail sur les chantiers, dans les mines, dans la sidérurgie. Pourtant, vous leur refusez l'accès aux soins en France, au motif que la détention d'une carte de séjour « retraité » leur impose de se soigner dans leur pays d'origine.

Alors qu'il convient de faire respecter leurs droits, afin qu'ils jouissent d'un minimum de dignité, vous leur imposez de nouvelles tracasseries. En effet, je n'entends minimiser ni les compétences ni la bonne volonté de la SONACOTRA, mais permettez-moi d'émettre des doutes sur l'organisation que va nécessiter l'application d'une telle mesure. À coup sûr, les échanges et colocations de chambres vont se solder par un imbroglio, ce qui se retournera contre les intéressés.

Voilà ce que mes collègues et moi-même souhaitions dire au travers de la présentation de cet amendement. Certes, le problème soulevé ne sera pas résolu aujourd'hui, compte tenu des avis défavorables émis par la commission et le Gouvernement, mais il se pose véritablement pour des personnes qui ont consacré leur vie de travail à la France.

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