Intervention de Philippe Bas

Réunion du 17 novembre 2006 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Article 55, amendement 287

Philippe Bas, ministre délégué :

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 287, qui, s'il était adopté, aurait un effet contraire à celui qui est recherché. En effet, son adoption entraînerait le rétablissement implicite, mais nécessaire, de la mise à la retraire d'office à soixante ans sur l'initiative unilatérale de l'employeur, disposition qui serait encore plus défavorable au salarié !

Même si je comprends bien la motivation de l'amendement n° 167, présenté par M. Pelletier, je tiens à rappeler que la France est le pays où l'on entre le plus tard dans la vie active et où l'on en sort le plus tôt, tout en effectuant la semaine de travail la plus courte. Cela ne peut pas durer éternellement !

Le fait que les séniors mettent fin précocement à leur activité ne créé pas d'emplois pour les jeunes, cela a été démontré. Aujourd'hui, compte tenu de l'évolution démographique, des besoins de financement de nos retraites, de l'augmentation très forte de la vitalité des personnes qui vieillissent et de l'amélioration de leur santé, il est nécessaire que nous nous rapprochions - soyons modestes dans nos objectifs, pour le moment ! - de la moyenne européenne.

La suppression par le Sénat avant-hier de l'article 13 bis, qui avait été introduit par l'Assemblée nationale, va dans ce sens. En effet, après une période de transition, la mise à la retraite d'office ne pourra plus intervenir avant l'âge de soixante-cinq ans.

Toutefois, je reconnais, monsieur le sénateur, que vous avez soulevé de véritables problèmes.

Vous avez évoqué la situation des salariés. En réalité - et c'est le premier problème que vous avez soulevé -, la situation préoccupe aujourd'hui non pas les salariés, mais - il faut bien le reconnaître - une partie du monde économique.

En effet, par commodité, certaines entreprises pratiquaient largement les mises à la retraite d'office et unilatérales à soixante ans, en utilisant toutes les facilités que leur offraient les textes en vigueur. Je ne les juge pas : elles n'étaient pas dans l'illégalité, elles savaient simplement optimiser les réglementations, ce qui était leur droit.

Ces entreprises se disent aujourd'hui que la mise à la retraite d'office à soixante-cinq ans va leur poser un problème. En effet, si elles veulent assurer à tous leurs salariés partant à la retraite à l'âge de soixante et un, soixante-deux ou soixante-trois ans une indemnité d'un montant identique à celui que percevaient ses salariés partant à soixante ans dans le cadre du régime de la mise à la retraite d'office, cela va leur coûter plus cher parce qu'elles auront à payer des cotisations sociales. On ne peut pas ignorer leur embarras, même s'il résulte de leurs méthodes de gestion du personnel, qui, encore une fois, consistent à optimiser les règles en vigueur.

Naturellement, je préfère regarder non pas derrière nous, mais vers l'avant. Je ne souhaite donc pas que l'on inflige à ces entreprises des dispositions qui les pénaliseraient et gêneraient leur développement normal. J'ai le souci qu'elles puissent continuer de créer des emplois et d'investir.

Le second problème que vous avez soulevé concerne, lui, les salariés. Ceux-ci craignent de percevoir des indemnités moindres du fait que leur employeur ne bénéficierait plus des exonérations de cotisations sociales auxquelles donnait droit le régime de la mise à la retraite d'office. De plus, les indemnités de départ à la retraite que percevraient ces salariés en dehors du régime de mise à la retraite d'office seraient imposables au titre de l'impôt sur le revenu.

Même si je comprends très bien ces préoccupations, je ne souhaite pas que l'on en vienne à régler ces deux problèmes en remettant en cause, d'une manière ou d'une autre, la volonté qui a été celle des partenaires sociaux dans le cadre du Plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors, que M. le Premier ministre a présenté, avec M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes et moi-même, au Conseil économique et social au mois de juin dernier.

Votre amendement a le mérite de soulever des questions auxquelles il faudra bien répondre d'une manière ou d'une autre, mais je vous demande de bien vouloir le retirer, monsieur le sénateur, sous réserve que M. le rapporteur vous indique, ce qui est mon souhait, que la commission mixte paritaire réexaminera ces problèmes et les réglera.

J'espère qu'elle trouvera un bon compromis, c'est-à-dire celui qui ne fera pas perdre de recettes à la sécurité sociale -notre rôle est aussi de veiller à l'équilibre de ses comptes -, qui ne pénalisera pas les salariés, qui n'imposera pas de charges trop lourdes à certaines entreprises, mais qui assurera l'efficacité du Plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors et respectera le report à soixante-cinq ans de l'âge de la mise à la retraite d'office.

Je rappelle que les partenaires sociaux s'étaient mis d'accord sur ce report. Si nous adoptons aujourd'hui des dispositions facilitant d'une manière ou d'une autre la mise à la retraite d'office avant soixante-cinq ans, cette concertation aura été un coup d'épée dans l'eau et nous n'aurons pas fait progresser notre pays.

Par ailleurs, j'émets un avis favorable sur les amendements n° 48, 49 et 50 rectifié.

En revanche, je demanderai à Mme Procaccia de bien vouloir retirer l'amendement n° 366 rectifié, qui sera satisfait par l'amendement n° 50 rectifié.

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