Intervention de Jean-Jacques Jégou

Réunion du 17 novembre 2006 à 22h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean-Jacques JégouJean-Jacques Jégou :

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, dont nous achevons la discussion, est porteur d'espoir et de progrès.

L'espoir réside naturellement dans l'apparent redressement des comptes sociaux, qui semble se dessiner depuis deux ans et que ce texte paraît conforter.

La spirale des déficits sociaux est enrayée. Déjà, lors du débat d'orientation sur les finances publiques et les finances sociales du 29 juin dernier, les chiffres publiés dans le rapport gouvernemental nous donnaient des raisons d'espérer. Le déficit de 11, 9 milliards d'euros auquel nous avions à faire face en 2004 battait tous les records. Depuis, les comptes sociaux se sont visiblement redressés. En 2006, le déficit cumulé des quatre branches, tous régimes confondus, restera tout de même de 9, 7 milliards d'euros.

Au-delà du caractère satisfaisant du constat que nous faisons en matière d'équilibres généraux, ce texte est porteur de mesures qu'il convient de saluer.

C'est le cas de l'extension du bénéfice de l'aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprise, de l'aide apportée à l'installation des médecins ou encore de l'article fixant la date limite avant laquelle doit être opérée la répartition des capacités d'accueil de chaque unité de soins de longue durée entre le domaine sanitaire et le domaine médico-social.

D'autres mesures emportent encore notre adhésion : l'exonération du ticket modérateur pour les consultations de prévention destinées aux personnes âgées de plus de soixante-dix ans, la création des centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie, l'amélioration consentie en faveur des petites retraites agricoles. Nous soutenons aussi la création du congé de soutien familial, destiné aux personnes qui cessent leur activité professionnelle pour s'occuper d'un membre de leur famille, âgé ou handicapé, ou encore la création d'un prêt à taux zéro pour les jeunes qui entrent dans la vie active.

De plus, les débats qui se sont déroulés au sein de notre assemblée ont permis d'enrichir substantiellement le texte qui nous était soumis. Par exemple, la nouvelle rédaction de l'article 19 est plus satisfaisante : elle garantit que les sommes issues des cessions immobilières des établissements de santé seront exclusivement affectées au financement des investissements hospitaliers.

La suppression de l'article 39 bis, que nous demandions en même temps que la commission, est une bonne chose. Cet article, au lieu de clarifier les conditions dans lesquelles peuvent être appliquées les pénalités en cas de non-respect des objectifs quantifiés fixés dans le cadre des contrats pluriannuels conclus entre les ARH et les établissements de santé, risquait d'obscurcir le dispositif.

Enfin, nous nous réjouissons qu'un certain nombre de nos amendements aient été adoptés.

En matière de services sociaux et médico-sociaux, nous avons permis aux entreprises ou associations gestionnaires d'un service d'aide à domicile d'obtenir l'autorisation de créer un établissement ou un service social ou médico-social sans que leur agrément puisse être remis en cause de ce simple fait. Mais nous avons surtout rétabli le droit pour les établissements publics sociaux et médico-sociaux d'agir directement contre les obligés alimentaires de leurs pensionnaires. En pratique, c'est très important !

Au sujet de l'organisation du secteur ambulatoire, nous avons rendu aux médecins biologistes libéraux leur pouvoir de prescription et confié aux chambres disciplinaires de l'ordre national des médecins le soin de sanctionner les manquements à l'obligation d'évaluation des médecins, et non plus aux sections des assurances sociales. Nous avons aussi garanti que chaque assuré social puisse savoir qui a consulté le Web médecin à son sujet et à quel moment.

Toutes ces mesures sont plus rationnelles et transparentes.

Nous avons également amélioré le dispositif de lutte contre les zones de désertification médicale en permettant aux centres de santé qui s'y implanteraient de percevoir une aide forfaitaire annuelle. La lutte contre les déserts médicaux est pour nous une priorité.

Sur une autre question de plus en plus sensible, nous avons fait adopter un dispositif visant à faire en sorte que soient rapidement prises des mesures destinées à limiter le montant des primes d'assurance en responsabilité civile médicale qu'ont à supporter certains médecins spécialistes.

Nous sommes aussi intervenus pour améliorer la continuité des soins en autorisant les pharmaciens, après l'expiration de la durée de validité d'une ordonnance, à dispenser à des patients chroniques les médicaments strictement nécessaires à la continuité de leur traitement dans l'attente d'une nouvelle prescription.

Pour finir, nous nous réjouissons d'avoir pu faire adopter un amendement très important à nos yeux précisant que les donneurs d'organes n'ont pas à supporter le forfait journalier lorsqu'ils sont admis dans les établissements sanitaires et qu'ils sont exonérés du ticket modérateur pour les frais liés à leur participation, au prélèvement ou à la collecte d'organes. C'était le moins que l'on pouvait faire pour eux.

Cela étant, le PLFSS pour 2007 est loin d'être entièrement satisfaisant. Le maintien de l'article 21, contre l'avis de la commission des affaires sociales, celui de la commission des finances et accessoirement contre le nôtre, qui vise à prévoir la non-compensation de plusieurs exonérations de charges sociales, entache gravement le texte. Alors que les relations financières entre l'État et la sécurité sociale sont plus que tendues et que les dettes de l'État vis-à-vis des organismes de sécurité sociale ne cessent de croître sans signe d'apaisement, une telle disposition n'augure rien de bon. Nous tenions à la suppression de cet article.

De même, nous tenions à l'adoption de certains de nos amendements qui n'ont malheureusement pas rencontré l'adhésion que nous attendions. C'est le cas, par exemple, de notre amendement visant à prévoir une extinction du coefficient de haute technicité en phase avec la convergence intersectorielle des tarifs. C'est aussi le cas de notre amendement tendant à garantir que le « reste à vivre », dont peuvent bénéficier les personnes placées dans un établissement au titre de l'aide aux personnes âgées ou de l'aide aux personnes handicapées, ne puisse être inférieur à 30 % du minimum vieillesse. C'est également vrai pour notre amendement visant à permettre le cumul de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant avec l'allocation de soutien familial pour les célibataires ayant adopté un enfant.

De manière encore plus fondamentale, on peut reprocher à ce PLFSS de porter un ONDAM volontariste, donc assez irréaliste.

Mais, surtout, l'amélioration des comptes sociaux reste encore bien fragile et lente. Alors que 2007 devait être l'année du retour à l'équilibre, le Gouvernement prévoit encore un déficit de 8 milliards d'euros pour 2008. L'année prochaine, comme cette année, toutes les branches seront encore dans le rouge, y compris celles qui sont traditionnellement excédentaires.

Plus grave encore, l'amélioration des comptes sociaux ne repose pas sur une réforme structurelle d'envergure : elle est principalement due à une importante augmentation des recettes. Les réformes « à un coup » se sont accumulées. Mais ce n'est pas ainsi que l'on pourra durablement lutter contre le déficit.

En particulier, rien n'a été fait en matière hospitalière, ce qui est regrettable, car le secteur hospitalier représente plus de 50 % des dépenses de santé. Réformer l'hôpital est donc une priorité, et une priorité prometteuse, puisque la Cour des comptes et le rapport d'Yves Cannac, fait au nom de l'Observatoire de la dépense publique de l'institut de l'entreprise, évoquent la possibilité de réaliser 10 milliards d'euros d'économies en matière d'établissements de santé.

Une réforme ambitieuse de l'hôpital pourrait s'articuler autour des trois grands axes que sont la rationalisation du système hospitalier, la réforme de sa gouvernance et l'introduction de l'intéressement dans la rémunération des personnels hospitaliers. Or ce que nous voyons se profiler en matière hospitalière est encore insuffisant. Bien entendu, cette réforme devra s'inscrire dans le cadre plus global d'une assurance maladie au financement intégralement repensé. La fiscalisation du financement de la santé est inéluctable. Sur ce dossier non plus, nous n'avons pas avancé.

Dans sa grande majorité, le groupe UC-UDF s'abstiendra sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

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