Intervention de François Autain

Réunion du 15 octobre 2010 à 9h30
Réforme des retraites — Article 11

Photo de François AutainFrançois Autain :

Plusieurs experts en économie le soulignent : on veut nous vendre cette réforme comme si la richesse de notre pays n’allait pas augmenter pendant les quarante prochaines années. Ces experts nous rappellent que la France a un taux de croissance moyen de 1, 7 % par an. La richesse de notre pays aura donc doublé dans quarante ans. Malgré cela, le Gouvernement considère qu’une augmentation de 63 % du nombre de retraités doit être financée à richesse constante.

Une politique économique et sociale réussie et durable ne doit pas perdre de vue que le contrat implicite qui sous-tend la retraite par répartition est la solidarité intergénérationnelle. Cette solidarité permet que chaque génération d’actifs puisse se reposer sur la plus jeun, et postule le partage de la création des richesses entre actifs et retraités.

N’oublions pas non plus que les jeunes actifs français subissent un des taux d’emploi les plus faibles d’Europe. Or, en prolongeant l’activité des fonctionnaires, nous prenons le risque de freiner, voire de bloquer l’accès des jeunes à la fonction publique.

Remplacer des retraités par des jeunes chômeurs ne constitue pas, en soi, une solution aux problèmes des déficits creusés par les gouvernements depuis 2002 et, particulièrement, depuis 2007.

Pour que les jeunes puissent payer les pensions des retraités, encore faut-il qu’ils ne soient pas au chômage. Or c’est malheureusement ce que votre réforme met en place. Les salariés âgés ne pourront laisser leur place sur le marché du travail aux nouvelles générations. Et la suppression de 30 000 emplois publics en 2009, puis celle de 36 000 postes qui est programmée pour 2010 ne font que noircir le tableau.

Globalement, c’est une réduction de 100 000 postes de fonctionnaires, d’ici à 2013, qui est prévue. Cet article est une véritable bombe à retardement, et le non-remplacement de la moitié des retraités de la fonction publique ne fait qu’ajouter de la matière explosive à une situation qui l’est déjà passablement. Aucune de ces mesures ne constitue une solution viable à court comme à long terme.

Non seulement votre réforme contredit toute politique volontariste en matière de lutte contre le chômage et de l’emploi précaire, mais elle met sérieusement en péril la bonne gouvernance et la productivité de notre pays.

Où est la politique de partage du travail et de création d’emplois ? Où sont la dynamisation et la rénovation de la fonction publique au plus près de nos concitoyens ? Nous ne voyons que la négation de l’accès au travail, l’aggravation des conditions d’emploi et de départ à la retraite. C’est la politique du « travailler plus » pour avoir plus de chômeurs, « travailler plus » pour finir en retraité spolié du principe de solidarité intergénérationnelle.

Vous prétendez dynamiser l’emploi en aggravant les conditions d’emploi et de salaires. C’est l’effet inverse qui se produit. La dévalorisation du travail, sous tous ses aspects, entraîne déqualification, précarité, détérioration de la santé et, au bout du compte, dépression de l’activité économique et donc dégradation des comptes sociaux.

Hier, dans la rue, les jeunes scandaient ce slogan : « Sarko, t’es foutu, la jeunesse est la rue ». Il est évident que je ne peux reprendre à mon compte un tel slogan !

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