Intervention de Denis Badré

Réunion du 19 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2005 — Article 18, amendements 128 18

Photo de Denis BadréDenis Badré :

Je suis heureux de ne pas avoir réagi trop vite tout à l'heure à la demande de M. le ministre et de ne pas avoir retiré l'amendement lorsqu'il me le demandait, puisque le débat que nous venons d'avoir, avec la solennité qui l'a caractérisé, m'a paru d'un excellent niveau et d'une grande utilité. C'est exactement ce que je souhaitais en défendant cet amendement. Je souhaitais précisément que nous ayons un vrai débat sur l'aide au développement.

Vous aurez noté que je n'ai traité que subsidiairement de tous les problèmes de concurrence et de faisabilité. J'ai centré l'essentiel de mon argumentation sur la nécessité d'avoir une vraie réflexion sur l'aide au développement et de bâtir une vraie politique d'aide au développement qui puisse être un projet pour la France, un projet pour l'Europe.

Ce que je crains, c'est que la mesure proposée démobilise les Français, qu'elle leur donne le sentiment qu'ils ont fait ce qu'il fallait et que tout va bien ainsi. Je ne veux pas que cette mesure serve d'alibi, qu'elle donne bonne conscience. Si elle permet d'avancer un petit peu, tant mieux ! Si elle permet de traiter le problème du sida, tant mieux ! Mais je ne voudrais pas que l'on oublie pour autant les principaux problèmes des pays en développement comme l'accès à l'éducation, l'accès à l'eau potable, etc. Il faut poser le problème dans toute sa dimension et ne pas le réduire à celui du sida, même si le problème du sida est grave, je le sais bien.

Si la France n'accorde pas aux problèmes de développement dans leur globalité toute l'importance qu'ils méritent, elle faillira à sa responsabilité historique.

Dans la réflexion que nous devrons mener, nous aurons à nous interroger sur l'incohérence, voire l'hypocrisie qui consiste à faire du déficit et à proposer une mesure comme celle qui nous est proposée. Faire du déficit, c'est aggraver la situation des pays en développement, c'est leur couper tout accès aux financements internationaux, financements dont ils ont beaucoup plus besoin que du produit d'une taxe sur les billets d'avion.

Tous les sujets comme l'agriculture, l'OMC doivent être traités sur le fond de manière responsable en essayant d'en mesurer les enjeux à moyen terme et à long terme pour le monde, pour l'Europe et pour notre pays !

Monsieur le ministre, je demande solennellement, au nom de mon groupe, que le Gouvernement nous propose une réflexion, mais surtout une vraie politique d'aide au développement. Demandez aux États-Unis de dire avec nous que le déficit aggrave la situation des pays en développement ! Alors, nous aurons fait un pas beaucoup plus grand que celui que vous nous proposez aujourd'hui.

Je souhaiterais que le Gouvernement propose à l'Europe de reprendre la stratégie de Lisbonne fondée sur les deux grands piliers que sont la compétitivité des pays développés et l'aide aux pays en développement. Les Européens peuvent se reconnaître dans un projet de ce genre ! L'Europe peut le proposer au monde. En 1945, en 1950, on proposait la paix au monde ; aujourd'hui, on peut proposer la compétitivité pour les pays développés et l'aide au développement pour les autres.

J'attends donc, monsieur le ministre, que vous envoyiez un message très fort aux Français pour qu'ils se mobilisent, mais aussi un message très fort à l'Europe et au monde, afin que l'on sache que la France veut aller au-delà sur un sujet aussi vital pour l'avenir du monde.

Dans ces conditions, monsieur le président, je retire l'amendement n° 128 §; cela soulagera un certain nombre de mes collègues qui souhaitent que nos différends n'apparaissent pas sur ce sujet, mais les membres du groupe de l'UC-UDF ne voteront pas l'article 18.

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