Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 8 juin 2006 à 9h30
Immigration et intégration — Article 3

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'indiquerai d'emblée que les dispositions de cet article sont à mon sens injustifiées.

La plupart des titres de séjour sont délivrés pour une durée d'un an, et l'examen du respect des conditions de renouvellement de ce type de titres s'effectue donc régulièrement tous les ans. Par conséquent, tous les ans, les services préfectoraux ont l'occasion de juger du respect des conditions d'éligibilité de tel ou tel migrant à un titre de séjour.

Le champ d'application de ce dispositif va s'étendre, puisque le projet de loi prévoit de généraliser, en quelque sorte, les titres de séjour d'un an.

Dans ces conditions, il n'est nul besoin d'instaurer un retrait obligatoire des cartes de séjour visées, si ce n'est pour mettre en place un statut « jetable » du travailleur migrant. Celui-ci, si l'article 3 est adopté, sera complètement à la merci de son employeur, qui pourra profiter de cette situation en toute tranquillité et le « jeter » une fois qu'il ne servira plus, sans risquer un recours. L'intéressé n'aura plus alors qu'une seule solution, quitter le territoire.

Il me semble que la recherche d'emploi pourrait tout à fait figurer au nombre des critères ouvrant droit à la délivrance d'un titre de séjour. Indiquons que, à l'heure actuelle, le préfet « peut » retirer le titre de séjour dans les circonstances visées, mais qu'il n'est pas tenu de le faire. Souvent, il prend en considération la situation de l'immigrant, notamment sa recherche d'un emploi et ses ressources.

De surcroît, la mise en oeuvre des dispositions présentées entérinera une dépendance tout à fait inacceptable du migrant à l'égard de la personne à laquelle est lié son droit au séjour, que ce soit son employeur ou son conjoint. La situation du migrant sera ainsi extrêmement précarisée.

Dans les faits, ces dispositions concerneront beaucoup moins de personnes que l'on ne tente de nous le faire croire. Cela montre bien, une fois de plus, que ce projet de loi a un seul objet : l'affichage, le marketing politique.

Enfin, je souligne qu'il est ici recouru à une notion juridique inadaptée. En droit administratif, c'est la notion de retrait qui est liée à la fraude ou au trouble à l'ordre public, tandis que celle de non-renouvellement se rattache à la notion de fin de droits. Ainsi, le fondement même de cet article est complètement erroné.

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