Comme je l'ai rappelé lors de mon intervention sur l'article précédent, l'objectif d'intégration des primo-arrivants est pour .nous, socialistes, une priorité. J'ai déjà précisé qu'à notre sens l'intégration ne pourra être réussie que si le pays d'accueil met tout en oeuvre pour être précisément un pays « d'accueil », et pour fournir à l'immigrant les outils nécessaires pour s'intégrer.
À cet égard, votre projet de loi n'apporte rien de concret, et c'est bien dommage. Il vise par ailleurs à précariser par tous les moyens la situation des étrangers présents sur notre territoire - fût-ce de manière régulière -, ce qui aura, à l'évidence, pour effet de rendre encore plus difficile l'intégration, que vous ne concevez apparemment que comme un slogan opposable uniquement à l'étranger, comme un devoir, ce qui se défend parfaitement, mais jamais comme un droit.
Si le fossé béant entre les droits et les devoirs fait de votre projet de loi un texte injuste, les règles de compétence que vous avez choisies en font, elles, un texte arbitraire. Arbitraire est, en effet, le mot clef, et le premier exemple en est donné par les conditions d'intégration auxquelles est subordonné l'octroi d'un certain nombre de titres de séjour.
Si l'intégration devient un critère de sélection pour ceux qui peuvent bénéficier d'une carte de résident, il conviendra de bien l'estimer, de bien la juger. Or vous admettrez que l'intégration dans la société française n'est pas un critère particulièrement objectif. Sans doute allez-vous dans votre réponse, monsieur le ministre, citer différents éléments, tels que la langue, le respect des lois, etc.
Quoi qu'il en soit, la rédaction de l'article 5 reste floue, ce qui semble assez inévitable s'agissant d'une réalité aussi subjective que l'intégration.
Ainsi, l'intégration d'une personne serait « appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République française, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance suffisante de la langue française ».
Or par qui cette intégration sera-t-elle appréciée ? C'est là que le bât blesse. En effet, l'une des grandes caractéristiques de ce projet de loi est de donner à l'administration, avec les risques d'arbitraire que cela comporte, une grande liberté de choix dans les décisions concernant le séjour des étrangers.
L'autorité administrative, qui saisira également pour avis le maire de la commune, aura ainsi tout pouvoir de décider, selon les critères flous que l'on connaît, si telle ou telle personne est ou non intégrée.
L'intervention du maire dans cette décision ne fera que renforcer une caractéristique regrettable de notre droit des étrangers, à savoir sa multiplicité, puisqu'il est souvent dit, avec raison, qu'il existe un droit par préfecture. Dès lors, existera-t-il désormais un droit par commune ?
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste souhaite la suppression de cet article 5.