Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 8 juin 2006 à 15h00
Immigration et intégration — Article 6

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

Nous n'aurons guère l'occasion de nous réjouir souvent en travaillant sur ce texte, mais je me félicite néanmoins que cet article 6 prévoie la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle, dont la durée peut aller jusqu'à quatre ans, pour certains étudiants étrangers.

Cette mesure est de bon sens : d'une part, elle sécurise un tant soit peu le parcours des étudiants étrangers dans notre pays ; d'autre part, elle permet de supprimer les procédures liées au renouvellement annuel des cartes de séjour pour les étudiants, qui sont une charge importante de travail pour les préfectures.

Cependant, cet article ne saurait être tout à fait satisfaisant. Il ne s'adresse qu'à certaines catégories d'étrangers étudiants : ceux qui ont déjà atteint le niveau du master, soit bac +4 ou bac +5. Le caractère élitiste de cette disposition a été justement souligné ce matin par Mme Dini et M. Pelletier.

Qu'en est-il des autres étudiants ? Ils resteront soumis aux nombreuses tracasseries administratives que doivent aujourd'hui subir les jeunes étrangers souhaitant étudier en France. Vous offrez cette faculté, nécessaire, à certains, mais vous la refusez aux autres.

Vous déniez la sécurité à tous ceux qui ont choisi de venir étudier en France dès la fin de leurs études secondaires. Pour ceux qui ont le plus confiance dans notre pays et dans ses universités, vous maintenez la précarité, ce qui me semble incompréhensible. Vous savez comme moi que les étudiants étrangers venus étudier en France seront plus tard les prescripteurs de l'image de la France dans le monde.

Avec cette mesure, vous ne faites que la moitié du chemin : vous choisissez sciemment de ne pas sécuriser le parcours d'enseignement d'étrangers qui ont choisi nos classes préparatoires, nos grandes écoles, nos universités. Cela me semble contre-productif.

Ou alors ce choix est parfaitement réfléchi et assumé. Derrière cette carte pluriannuelle délivrée à des étrangers déjà formés, se dissimule le désir de sélectionner des étudiants de haut niveau, susceptibles de travailler en France par la suite. On retrouve ici votre logique de sélection des êtres humains, le fameux « tri sélectif ».

Dans votre présentation, vous avez, monsieur le ministre délégué, insisté sur la volonté de codéveloppement qui aurait guidé ce projet de loi. Mais, avec cet article, nous découvrons vos réelles intentions. Les étudiants étrangers ne vous intéressent que lorsqu'ils appartiennent à l'élite. Et vous ne vous souciez pas tant de leur formation ou de l'intérêt de leur pays d'origine que des intérêts égoïstes de la France.

Votre dispositif me semble donc très incomplet et devrait être généralisé à tous les étudiants souhaitant effectuer un parcours universitaire en France.

Je souhaiterais enfin ajouter quelques mots sur l'article 6 bis, introduit par l'Assemblée nationale.

Cet article ouvre la possibilité de délivrer un titre de séjour provisoire aux étrangers souhaitant effectuer une mission de volontariat en France auprès d'une association ou d'une fondation reconnue d'utilité publique. En permettant par exemple aux associations d'exercer des missions de formation auprès d'étrangers, cet article va dans le bon sens. Mais je ne comprends pas pourquoi l'Assemblée nationale a assorti cette autorisation d'un agrément préalable des associations. La déclaration d'utilité publique est déjà un agrément suffisant. Exiger un nouvel agrément spécifique, c'est créer une nouvelle usine à gaz administrative - ce n'est pas la seule dans ce projet de loi ! C'est surtout jeter une suspicion systématique sur les associations et sur les volontaires étrangers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion