Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 2 du présent projet de loi de finances porte, comme c'est souvent le cas, sur le barème de l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
Cette année, tel qu'il se présente dans le cadre de cet article, le barème fixé pour l'impôt marque une pause relative dans le mouvement entrepris ces dernières années pour la baisse globale du poids et du rendement de l'impôt sur le revenu.
En effet, le projet de loi de finances pour 2005 ne contient d'autre mesure nouvelle essentielle qu'une réévaluation des limites des tranches d'imposition, tandis que quelques dispositions strictement ciblées vont être proposées, tant en première qu'en seconde partie, et ce pour des montants relativement modestes, à l'exception notable de la réduction accordée pour les emplois à domicile.
Dans les faits, la situation au regard de l'impôt sur le revenu est connue : les contribuables sont nombreux - plus de 33 millions de foyers fiscaux, majoritairement composés d'une seule personne, d'ailleurs - mais une part importante de ces contribuables n'est pas imposable, du fait de la modicité des ressources des intéressés.
Pour autant, l'orientation fixée par l'article 2 du projet de loi de finances présente plus d'un défaut et appelle d'autres solutions que celles qui ont pu être mises en oeuvre ces dernières années.
On ne peut d'ailleurs oublier que, cette année, avec la croissance attendue du produit de l'impôt de plus de 1, 5 milliard d'euros nets - due, pour l'essentiel, à l'évolution spontanée du produit de l'impôt -, nous sommes aussi confrontés, pour ce qui concerne les particuliers, notamment les salariés et les retraités, à un alourdissement des prélèvements sociaux proportionnels assimilables à l'impôt sur le revenu.
Comme nous l'avons souligné, la réforme de l'assurance maladie accroît ainsi de 900 millions d'euros la contribution sociale généralisée des salariés et de 750 millions d'euros celle des pensionnés et retraités. Nous sommes donc loin de la baisse annoncée depuis 2002 et, pour le plus grand nombre, c'est même à la hausse que l'on devrait constater l'évolution réelle.
Pour autant, l'article 2 conduit à réduire à la portion congrue l'impôt progressif, laissant une place de plus en plus grande aux droits indirects. Il contribue également à faire de la contribution sociale généralisée le véritable impôt sur le revenu, proportionnel au demeurant, et touchant plus largement chaque contribuable. De surcroît, le rendement de la CSG est autrement plus spectaculaire que celui qui résulte de l'impôt progressif, puisqu'il s'en faut désormais de 10 milliards d'euros pour que les cotisations perçues soient équivalentes.
A force de polariser l'attention sur le barème de l'impôt, on en oublie le véritable débat : celui qui porte sur l'assiette même de l'impôt et qui, de fait, en restreint dangereusement le rendement.
Quand à peu près 87 % de l'assiette de l'impôt sur le revenu sont constitués par les salaires ou revenus assimilés et par les pensions et retraites, chacun mesure aisément que toute baisse des taux du barème n'est pas une avancée de la justice sociale et fiscale. Aussi, agir sur les taux ne suffit pas. Il convient de poser, encore une fois, la question de la prise en compte des revenus du capital et du patrimoine dans l'assiette de l'impôt, dans un véritable respect du principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt.
Nous pourrions être ouverts à toute réduction des taux d'imposition - respectant, au demeurant, la progressivité et l'efficacité de l'impôt - si, dans le même temps, des efforts étaient accomplis pour une extension de son assiette, mettant notamment fin au principe des prélèvements libératoires qui sont autant de niches fiscales fort coûteuses qui ne profitent d'ailleurs qu'à proportion de ce que chaque contribuable peut consacrer aux placements concernés.
C'est pourquoi il est largement temps de poser la question du devenir des dispositifs divers de correction de l'impôt sur le revenu que nous connaissons et qui constituent autant d'éléments de dévitalisation de l'impôt progressif. Pour chaque disposition dérogatoire - et cette remarque ne vaut pas que pour l'impôt sur le revenu -, pour chaque niche fiscale, on doit s'interroger sur le coût, le rendement et l'efficacité économique et sociale de la mesure proposée.
Nous pourrions sans doute prolonger le débat sur l'impôt sur le revenu si nous procédions dès aujourd'hui à cet examen critique de l'ensemble de la dépense fiscale consacrée à modifier l'application du barème de l'impôt sur le revenu, modification qui représente un volume de plus de 39 milliards d'euros, soit plus des deux tiers du produit attendu de l'impôt lui même. Mais en aurions-nous le temps dans le cadre des délais constitutionnels ? Toujours est-il qu'il le faudrait !
Telles sont les quelques observations que les membres du groupe communiste républicain et citoyen souhaitaient formuler à l'occasion de l'examen de cet article 2, qui porte sur l'impôt sur le revenu.