Je souhaite revenir quelques instants sur la prime pour l'emploi.
Je rappelle que le coût de ce dispositif s'établit à 2, 435 milliards d'euros pour 2004, contre 2, 3 milliards d'euros en 2003.
Si l'on se souvient de l'origine de cette mesure, on peut se demander si elle est toujours bien conforme à ce que ses initiateurs souhaitaient.
Que devait être la prime pour l'emploi, sinon une incitation à travailler ? Elle était conçue et présentée ainsi, c'est-à-dire comme un différentiel suffisant entre le non-travail et le travail.
On considérait, à juste titre, que ceux qui se trouvent dans l'inactivité bénéficient - heureusement ! - de filets de sécurité, notamment de mesures sociales, de prestations d'assistance, de conditions tarifaires plus favorables ici ou là. Mais la différence entre le non-travail et le travail n'étant alors plus suffisante, il fallait apporter quelque chose de plus aux salariés modestes, les mettre dans une situation plus favorable par rapport à ceux qui sont dans l'inactivité et les encourager à progresser dans leur évolution professionnelle.
Naturellement, il ne faut pas oublier que, si les dispositifs sociaux, les mesures de protection et d'assistance, sont sans doute tout à fait nécessaires, ils peuvent avoir à la longue des effets pervers et encourager dans la non-activité des personnes qui n'ont pas vocation à rester toujours sur le bord du chemin et qu'il faudrait vraiment réinsérer dans la vie professionnelle.
Voilà quelle était l'utilité de la prime pour l'emploi.
Aujourd'hui, il peut être intéressant de se demander si c'est bien toujours la fonction remplie par un dispositif qui coûtera 2, 4 milliards d'euros en 2005.
Nos collègues députés se sont montrés sensibles à cette question à plusieurs reprises et ils se sont interrogés sur le délai de mise en place de la prime par rapport au retour à l'emploi, se demandant si une prime qui est payée un an après le retour à l'emploi avait encore un caractère incitatif en la matière. En effet, un an après, les conditions objectives où l'on se trouvait à l'origine sont oubliées !
L'an dernier, le Gouvernement a entendu cet appel de bon sens et a mis en place un système optionnel pour que le versement de la prime pour l'emploi intervienne plus tôt, c'est-à-dire, compte tenu des différentes contraintes et de toute cette mécanique compliquée à gérer, environ six mois après le retour au travail.
Mais l'on peut se demander si le délai de six mois représente vraiment un grand progrès dans l'esprit de nos concitoyens, d'autant que, le régime étant optionnel, le taux de demande pour bénéficier plus tôt de la prime s'est révélé extrêmement faible, comme M. le secrétaire d'Etat l'a souligné hier.
Par conséquent, ce système de la prime pour l'emploi pose vraiment un problème aujourd'hui à la commission des finances, qui réfléchit au bon emploi des deniers publics.
A la vérité, les remarques que vient d'exprimer M. Vera peuvent nous renforcer dans notre sentiment, parce qu'il semble bien que, pour lui, la prime pour l'emploi représente simplement du pouvoir d'achat supplémentaire, autrement dit une distribution d'argent à des personnes de condition modeste. Or, si cette dernière n'a pas un effet incitatif au retour au travail, la mesure aura complètement manqué sa cible.
C'est pourquoi la majorité de la commission peut reprendre à son compte - sans en suivre ni les principes ni la philosophie, bien sûr - la question qui a été soulevée par notre collègue.
Aussi, nous souhaiterions beaucoup, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une vraie réflexion puisse intervenir au cours de l'année 2005 non plus sur les modalités administratives, mais sur le fond même de ce dispositif.