Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 15 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 15

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Transférer des charges pour faire croire que l’on maîtrise les coûts est une technique de gestion inefficace et dangereuse. Or vous en avez fait une méthode de gouvernement inopérante et destructrice.

L’article 15 illustre votre démarche en la matière. En relevant les âges limites de versement des indemnités aux travailleurs privés d’emploi, dans les mêmes conditions que les bornes d’âge en matière de retraite, le Gouvernement organise concrètement la transformation des jeunes retraités en vieux chômeurs.

À l’assurance chômage de prendre le relais de ce qui relevait de la retraite ! Les nouveaux chômeurs y perdront ce que les employeurs y gagneront. Chacun sait en effet que les indemnités liées au chômage sont plus réduites, moins pérennes et, surtout, moins coûteuses pour les entreprises.

Avec seulement 17 % des 60-64 ans dans l’emploi, on mesure à quel point le relèvement de ces bornes d’âge pèsera sur les comptes de l’UNEDIC : plus de 1 milliard d’euros sur la période 2015-2017. Voilà le résultat de l’impact de votre réforme sur les comptes de l’UNEDIC !

L’impact sur les hommes et les femmes qui seront concernés n’est pas seulement quantitatif. Bien sûr, les conséquences de cet article seront mauvaises pour leurs finances, mais elles seront encore pires pour leur moral.

Alors que rien n’est fait pour favoriser le maintien dans l’emploi des seniors, alors qu’aucune réflexion n’a été amorcée pour mettre en place une autre politique des âges, au sein de l’entreprise comme dans notre société, vous choisissez de livrer aux affres de la fin de droits ceux qui n’aspiraient qu’à vivre enfin de leur retraite.

Loin de mobiliser tous les outils possibles pour remettre la question de l’emploi au cœur de la problématique de la gestion du vieillissement, vous faites l’aumône d’une aide à l’embauche des plus de 55 ans et d’un discours sur le tutorat, dépourvu de toute mesure concrète. J’en veux pour preuve cette palinodie que constitue l’obligation affichée pour les entreprises de plus de cinquante salariés de conclure un accord ou de mettre en place un plan d’action pour leurs salariés seniors. Soumise à aucune sanction, n’ayant fait l’objet d’aucun débat, ne donnant lieu à aucune mesure concrète, cette disposition est le cache-misère de la désertion de ce gouvernement du front de l’emploi des seniors.

Dommage, car d’autres ont su se battre sur ce front-là et ont obtenu des résultats. Dans les pays nordiques, par exemple, l’effort a notamment porté sur le relèvement du taux d’emploi des quinquagénaires. La question de la valorisation de ce patrimoine humain les a conduits à mettre en place une politique globale axée sur le maintien de l’employabilité de leurs salariés. Ils ont ainsi pu faire changer le regard que les entrepreneurs portaient sur les seniors.

Anticipant la pénurie de main-d’œuvre que le départ des baby-boomers du marché de l’emploi devrait susciter, ils ont su, d’un côté, attirer et fidéliser les jeunes générations et, de l’autre, retenir les seniors. C’est ainsi que la Suède et la Finlande ont réussi à créer un consensus autour de l’importance d’améliorer le bien-être au travail et de proposer des perspectives de développement professionnel aux différents âges de la vie.

Notre gouvernement, lui, a été incapable de s’emparer de cette question.

Cet article parachève donc le véritable objectif du Gouvernement : afficher une réduction des déficits de la branche vieillesse en maintenant les plus faibles dans la précarité et en transférant à l’assurance chômage ce qui relève du droit à la retraite.

Une gestion aussi calamiteuse ne saurait avoir le soutien du groupe socialiste.

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