Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 25 novembre 2009 à 9h30
Loi de finances pour 2010 — Participation de la france au budget des communautés européennes

Pierre Lellouche, secrétaire d'État :

Cinq milliards d’euros, ce n’est pas rien ! Cela représente quatre fois le montant du budget de la mission « Santé » du PLF 2010, deux fois le montant du budget de la mission « Plan de relance de l’économie », une fois et demie le montant du budget de la mission « Aide publique au développement ». C’est aussi, chaque année, quarante fois l’hôpital Georges-Pompidou ou deux porte-avions nucléaires !

Cette réalité, qui fait de nous l’un des très grands bailleurs de fonds des politiques communautaires, certains de nos partenaires l’ignorent, mais d’autres souvent feignent de l’ignorer Il est temps de le faire savoir, et vous pouvez me croire, je m’y emploie, même si la manière peut ne pas être toujours très diplomatique.

La France aura l’occasion, dans le grand débat budgétaire qui s’annonce pour l’après-2013, de faire connaître cette situation dans les termes que je viens de vous exposer. Il y a un devoir de transparence absolue sur le coût. Car je vous ai parlé des avantages, mais ces derniers ont un coût.

Cette dure réalité des chiffres est appelée à s’imposer à nous avec encore plus de force d’ici à 2013 avec la fin des perspectives financières.

Certes, selon les derniers chiffres disponibles de la Commission, la France a reçu du budget communautaire quelque 13, 7 milliards d’euros en 2008, faisant de notre pays le premier bénéficiaire de la dépense communautaire. Mais cette dépense est fortement concentrée sur la politique agricole commune, pour un montant d’environ 10 milliards d’euros, et nos retours agricoles vont progressivement décliner au profit des nouveaux États membres, autre réalité incontournable.

Nous devons donc avoir le courage et la lucidité de chercher à améliorer nos performances dans tous les domaines, à corriger les défauts, à améliorer les dispositifs de montage et de portage des projets, à mieux communiquer sur l’Europe, à mieux négocier et à mieux consommer les crédits. C’est un vaste chantier qui nous attend.

Nous rendrons ainsi un double service à la France : d’une part, en faisant mieux connaître l’Europe et ses bénéfices, nous luttons contre l’abstention et le désintérêt des peuples pour la construction européenne ; d’autre part, en consommant mieux les crédits, nous contribuons à optimiser notre taux de retour.

Que pouvons-nous faire concrètement ?

Il faut, en premier lieu, mieux tirer parti des dépenses dites « de compétitivité et d’avenir », qui représentent aujourd’hui 15 % environ du budget communautaire, mais qui, sans doute, sont appelées à en représenter une part croissante.

Depuis 2007, les grands débats communautaires ont porté sur cette rubrique budgétaire : je pense au financement du projet Galileo, à hauteur de 3, 4 milliards d'euros, qui a été au cœur des débats en 2007, au financement du volet du plan de relance communautaire de 5 milliards d'euros consacré aux infrastructures énergétiques et au développement rural. La tranche 2009 de ce plan de relance a été intégralement financée. Un accord a été trouvé voilà quelques jours avec le Parlement européen sur les conditions de financement de la tranche 2010, pour un montant de 2, 4 milliards d'euros.

Il est temps d’examiner, programme par programme, avec les ministères compétents et les acteurs économiques et sociaux, les moyens de mieux tirer parti des fonds communautaires de cette rubrique. Cela suppose d’analyser minutieusement comment les différents acteurs sont organisés, par quels canaux la France répond aux appels d’offres de la Commission, quel est le degré de connaissance des procédures communautaires de nos propres décideurs et comment la France peut mieux « vendre » ou « orienter » ses projets.

Il faut aussi que nous plaidions à Bruxelles pour davantage de simplification dans les procédures. Nous avons tous, dans nos circonscriptions, rencontré des porteurs de projets qui renoncent face à la lourdeur des procédures.

Il faut également nous attacher à mieux et intégralement consommer les fonds structurels qui nous sont alloués. Nous ne pouvons évidemment pas augmenter le montant de l’enveloppe réservée à la France et à ses régions, qui découle de l’accord conclu lors du Conseil européen de décembre 2005. Cependant, il est de notre devoir de nous assurer que les crédits sont bien et intégralement consommés.

C’est le sens de la démarche que j’ai initiée, avec mon collègue Michel Mercier, en demandant au Premier ministre, dès ma nomination, de mandater le président de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale, M. Pierre Lequiller, pour mener, et c’est une première, en liaison avec une eurodéputée française, Sophie Briard-Auconie, un travail de fond sur la sous-consommation des crédits communautaires.

Michel Mercier, de son côté, a diligenté trois enquêtes administratives sur le même sujet. Nous sommes en train de faire la synthèse de ces travaux et nous devrions être à même de proposer aux collectivités, je l’espère dès le début de l’année prochaine, un meilleur système pour éviter la sous-consommation et surtout le « dégagement d’office » des crédits qui touche en particulier certaines régions périphériques.

C’est le sens de la démarche que nous avons collectivement engagée avec Christine Lagarde et Marie-Luce Penchard pour nous assurer que les crédits communautaires affectés aux départements d’outre-mer sont intégralement consommés. Pour l’instant, nous sommes en train d’éviter des dégagements d’office.

Je voudrais dire quelques mots, mesdames, messieurs les sénateurs, sur l’avenir du budget communautaire.

Nous devons prendre en compte, et c’est le premier défi, l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre prochain, qui va entraîner trois modifications majeures dans le domaine budgétaire.

Il s’agit d’abord du renforcement de l’action extérieure de l’Union européenne, voire des dépenses de défense commune.

La France, vous le savez, se bat pour renforcer la politique européenne de sécurité et de défense, la PESD. Pour l’instant, que se passe-t-il ? C’est le pays qui intervient qui paye. Il est donc doublement pénalisé : il prend le risque politique, il engage la vie des soldats, il utilise du matériel et c’est lui qui paye seul, pas les autres ! Il faudra bien, à un moment donné, trouver une meilleure organisation avec des contributions qui fassent de l’Europe un acteur politique.

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