Intervention de Jack Ralite

Réunion du 25 novembre 2009 à 9h30
Loi de finances pour 2010 — Articles additionnels après l'article 12

Photo de Jack RaliteJack Ralite :

Premièrement, cet amendement me pose problème sur le plan législatif. Un texte de loi a été voté après une discussion dont on se rappelle qu’elle a été longue, malgré l’emploi de la procédure d’urgence. Sa rédaction plaît ou non, mais elle ne peut être soumise à révision au moindre soubresaut du marché publicitaire ! Ce serait, me semble-t-il, un curieux procédé.

Il est vrai que certaines lois sont parfois amendées, mais ces modifications sont d’une autre ampleur et, entre le texte original et sa version corrigée, il s’écoule un temps suffisant, qui évite l’arbitraire conjoncturel et l’autoritaire ajustement économique.

Deuxièmement, quand on connaît les auteurs de cet amendement, et je ne parle pas de M. Thiollière, on s’aperçoit qu’il a un goût de revanche. Il est l’expression de lobbies déçus, qui ont le droit de l’être et de le manifester, mais que nous avons le devoir de récuser. Le travail législatif ne doit pas se faire à la corbeille !

Troisièmement, ces dispositions ne rendent pas compte de la réalité telle qu’elle est. Certes, TF1 n’a pas obtenu les recettes publicitaires escomptées, mais M6 a enregistré de bons résultats, et Canal Plus de meilleurs encore.

TF1 est toujours le champion en ce qui concerne les recettes publicitaires, mais la chaîne a connu des failles dans son fonctionnement. Elle accueille moins de publicité que prévu, mais ce n’est pas la taxe qui est responsable des difficultés d’organisation de la chaîne « du temps de cerveau humain disponible ». Le marché et l’audience ont connu des variations qui ne doivent rien au hasard !

J'ajoute que, au moment du vote de la loi, la taxe était fixée à 3 % ; elle a été ramenée à 1, 5 %. Grâce à cette modification, TF1, qui aurait dû payer 28 millions d’euros, n’a versé que 14 millions d’euros, mais cette chaîne veut sans vergogne « gagner tous les millions » !

Enfin, les dispositions de cet amendement doivent être encore davantage analysées. La loi votée ne prévoit de taxer que les « en plus » de publicité ; aux termes de l’amendement dont je discute le bien-fondé, l’imposition diminuerait s’il y a un « en moins » de publicité !

Si les recettes publicitaires ont baissé de 19 % au premier semestre 2009, toutes chaînes de télévisions confondues, elles n’ont diminué que de 6 % au troisième trimestre de 2009. La publicité a augmenté de 23 % entre octobre 2008 et octobre 2009. La presse a évoqué cette amélioration significative.

Nous ne pouvons ni ne devons écouter la plainte de TF1 et de ses amis, réels ou conjoncturels.

Je participais vendredi et samedi derniers au Forum d’Avignon, où l’on discutait sur la stratégie d’une nouvelle politique culturelle.

Or un intervenant, heureusement peu écouté et vivement combattu, notamment par une personnalité importante de l’industrie culturelle, a réclamé une modification de la pratique des subventions et des taxes diverses sur les industries culturelles, pour leur substituer « un nouveau modèle économique » et « poser le profit comme un but et encourager tout mouvement en ce sens par un financement spécifique ». Ce serait, ni plus ni moins, « l’échelle mobile des profits » !

Les amendements qui nous sont proposés ici sont la conséquence de cette doctrine.

Mes chers collègues, c’est de responsabilité publique que nous avons besoin aujourd'hui ! Nous refusons d’étendre la logique du marché financiarisé à la société tout entière, y compris à l’intime.

De toute manière – nous y reviendrons vendredi prochain, lors de l’examen du budget des médias –, le véritable problème réside non pas dans cette mise en scène mélodramatique au service de lobbies, mais dans la réalité fragile et aléatoire du financement de France Télévisions, qui devrait être pérenne et dynamique.

Mes chers collègues, je vous demande de rejeter cet amendement, comme ceux qui suivent : à quelques nuances près, ils sont de même nature et visent à supprimer, en tout ou partie, la taxe sur la publicité, c'est-à-dire une partie du financement de la radio et de la télévision.

Je note d'ailleurs que, en ce moment, on tente de remettre en cause à Bruxelles la taxe sur les fournisseurs d’accès, c'est-à-dire qu’on prépare une mesure qui ne serait pas très heureuse pour le service public.

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