En repoussant l’âge légal de départ à la retraite des fonctionnaires, le Gouvernement poursuit un double objectif. D’une part, celui, commun au secteur privé, de faire reposer la retraite sur les seuls et uniques salariés. D’autre part, celui, plus spécifique, de réduire les dépenses publiques en empêchant le renouvellement des fonctionnaires.
Cette idée est pour le moins saugrenue. Prenons l’exemple des médecins.
Dans les années soixante-dix a été mis en place le numerus clausus, censé permettre de gérer les flux de nouveaux médecins entrants. L’on pensait en effet à l’époque qu’ils étaient trop nombreux. Le quota a commencé à diminuer en 1977, pour atteindre son point le plus bas à 3 500 en 1992, niveau auquel il est resté pendant de nombreuses années. La théorie alors en vigueur était la suivante : plus il y a de médecins, plus les dépenses de santé et le déficit de l’assurance maladie augmentent. La façon la plus simple de réduire le déficit de l’assurance maladie était par conséquent de diminuer le nombre de médecins.
Or, dès l’été 2003, dans le contexte de la canicule, le Gouvernement s’alarma de la pénurie de médecins. Dans les hôpitaux et les cliniques les médecins manquaient, et ils manquent encore davantage aujourd’hui dans de nombreuses spécialités parmi lesquelles la pédiatrie, la chirurgie ou l’obstétrique.
Au même moment, en 2003, le ministère constatait également la disparition des médecins de nombreuses zones peu peuplées. Le manque de généralistes conduisait partout à des « embouteillages » aux services des urgences. Dans un silence honteux, ces manques de médecins avaient été compensés par le recours aux services de médecins étrangers, utilisés bien souvent comme de la « chair à canon » hospitalière. Ces derniers étaient en effet contraints d’exercer dans des conditions particulièrement dégradées, avec, pour nombre d’entre eux, nous le savons bien, peu d’espoir de pérenniser leur situation dans notre pays.
Le résultat de telles pratiques, bien qu’elles aient résulté des choix de gouvernements de différentes couleurs politiques, se traduit par un gâchis de ressources ainsi que par un gâchis humain.
Or, ce qui a été fait pour les médecins il y a plusieurs années est désormais appliqué pour les professeurs, dont le nombre diminue de façon drastique chaque année, tant et si bien que M. Chatel, le ministre de l’éducation nationale, a osé faire appel à des professeurs retraités pour remédier aux carences de postes.
Conscient de ces deux exemples, le Gouvernement devrait étudier avec plus de finesse et de parcimonie les besoins de fonctionnaires dans de nombreux domaines. Loin de là, il supprime, tel un « bulldozer », des dizaines de milliers de postes par an sans se soucier des effets économiques et sociaux dévastateurs que cela engendre.
Pour ces raisons, nous voterons cet amendement.