L'article 34 établit un classement dans le privilège des créances. Bien que critiquable au regard du rang accordé aux créances des établissements financiers, ce classement respecte malgré tout le superprivilège des salariés, disposition que nous considérons comme fondamentale et juste.
Toutefois, le texte ne prend pas en compte les droits des salariés acquis au titre du compte épargne-temps. En effet, s'appuyant sur l'argument « travailler plus pour gagner plus », la majorité a modifié de façon substantielle le concept de compte épargne-temps, en accélérant sa monétarisation.
Déjà, l'article 2 de la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, dite « loi Fillon », avait assigné au compte épargne-temps une nouvelle fonction en précisant, dans le deuxième alinéa de l'article L. 227-1 du code du travail, que ce compte avait pour objet de permettre au salarié qui le désire non plus seulement d'accumuler des droits à congé rémunéré, mais également « de se constituer une épargne ».
A l'issue de l'examen de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, c'est une définition beaucoup plus générale et simpliste que la précédente qui figure désormais au deuxième alinéa de l'article L. 227-1 : « Le compte épargne-temps permet au salarié d'accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises. »
Il s'agit donc bien d'une rémunération différée. Or, si l'entreprise est en difficulté et en cessation de paiement, que deviennent les droits du salarié ? Le flou le plus complet demeure sur le devenir de sa créance car, en contrepartie de son travail, le salarié s'est pourtant bien constitué un droit à l'égard de l'entreprise.
Des pistes de réponses existent, mais elles restent imprécises. Les éléments constitutifs du compte épargne-temps restent un droit, si la rupture du contrat de travail résulte d'un cas de force majeure. Les difficultés de l'entreprise et le plan de sauvegarde peuvent-ils être considérés comme tel ?
L'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, l'AGS, interviendra, nous dit-on. Pourtant, deux remarques s'imposent.
D'abord, tout employeur doit assurer ses salariés contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaires. Or ce n'est pas le cas : les employeurs ne sont pas régulièrement à jour de leur versement, c'est un fait. Nous avons déposé un amendement à ce sujet.
Ensuite, la garantie en question étant limitée à un plafond fixé par décret, compte tenu du nouveau régime plus souple d'accumulation des droits sur le compte épargne-temps, la question de la garantie des droits supérieurs à ce plafond se pose.
Face à ce flou juridique et légal, nous proposons que les droits acquis sur le compte épargne-temps soient payés au terme des différentes procédures collectives. Cet amendement vise donc à mettre le paiement des sommes du compte épargne-temps au rang des créances de superprivilège.