Cette explication de vote vaudra aussi pour l’article 20, monsieur le président.
Je me permettrai de citer quelques extraits d’une longue lettre que nous a envoyée une retraitée de la fonction publique, peu de temps après avoir appris que le présent texte viendrait en débat au Sénat :
« Le 30 juin 1950, j’ai quitté les bancs du lycée sur lesquels j’avais continué ma scolarité après le passage du brevet.
« Le 1er juillet de la même année, j’entrais comme agent auxiliaire dans le bureau de poste de ma commune de résidence pour commencer à y travailler comme opératrice du téléphone.
« J’avais à l’époque 18 ans et nous étions chargées, moi et mes collègues, de mettre en relation, sur les antiques standards téléphoniques à fiches, les personnes qui appelaient l’opératrice et les numéros de téléphone qu’elles voulaient joindre.
« Durant toutes les années cinquante et soixante, j’ai pratiqué à peu près tous les métiers de l’administration des postes et télécommunications.
« J’ai été, un temps, employée au centre des chèques postaux de Paris, où je passais mon temps à faire de la saisie mécanographique des opérations avant que de procéder à la destruction des chèques émis par les clients.
« J’ai intégré les services d’exploitation du téléphone, au moment où l’État avait décidé de procéder au développement du réseau national, en abandonnant peu à peu le réseau dit “manuel” pour le réseau automatique.
« Pour le téléphone, j’ai connu toutes les évolutions technologiques, jusqu’au jour où, en deux secondes, la France a ainsi pu basculer de la numérotation à sept chiffres à la numérotation à huit chiffres.
« J’ai aussi travaillé en bureau de poste, à une époque où la France comptait 18 000 bureaux, c’était même la publicité grand public de La Poste, … » – Je vois que M. Longuet acquiesce. Il a l’air tout à fait au courant ! – « …et où nous nous attachions à permettre aux usagers de recevoir leur courrier le lendemain de son envoi.
« Comme j’ai commencé à travailler à 18 ans, j’ai cotisé pendant 41, 5 annuités à la retraite.
« Et comme j’ai fini ma carrière en position de cadre B, je dispose aujourd’hui d’une retraite qui dépasse un peu les 1 800 euros mensuels, d’autant que j’ai eu deux enfants de mon mariage, même si mon mari est aujourd’hui décédé.
« Cette retraite, inférieure de plus de 20 % à ma dernière rémunération – qui dépassait certes les 2 000 euros, mais au bout de plus de 40 années de carrière – est considérée comme trop élevée pour que je puisse aujourd’hui percevoir du régime général la moindre réversion de la retraite de mon mari.
« Alors que celui-ci, décédé avant l’âge de 60 ans, a cotisé pendant 35 ans, je ne touche que la réversion de quelques caisses de retraite complémentaire auxquelles il avait souscrit au fil de sa carrière.
« Avec ce que je perçois comme pension, je ne me considère pas comme une privilégiée, et mon revenu me permet de faire face, sans trop de difficultés mais en faisant tout de même attention, aux charges de ma maison et de profiter de ma retraite pour faire quelques voyages.
« Rien de sensationnel, d’autant que ma santé s’est détériorée avec le temps et que je dois suivre plusieurs traitements ».
Mes chers collègues, cette situation-là n’a rien d’exceptionnel. Elle est même finalement assez banale. Tout au plus peut-on dire que certains agents du secteur public ont eu une carrière aussi longue que cette personne, mais perçoivent une pension plus faible, parce qu’ils n’ont pas terminé leur carrière au même niveau.
Ce qui est certain, c’est que l’ensemble des mesures dites « de coordination » de l’article 20 conduiront, à un titre ou à un autre, à minorer les droits à pension et s’attaqueront au pouvoir d’achat des retraités du secteur public.
Mes chers collègues, je vous remercie de m’avoir écouté patiemment.