Monsieur le Premier ministre, lors de votre déclaration de politique générale, vous avez annoncé la poursuite de la cession par l'Etat de ses participations dans les sociétés d'autoroutes. Depuis lors, M. Hervé Mariton, dans un rapport d'information parlementaire qu'il a récemment présenté, est venu appuyer votre position et, surtout, M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a présenté un premier calendrier pour ces privatisations.
L'Etat est aujourd'hui actionnaire majoritaire d'ASF, de la SANEF et d'APRR et détient 45 % du capital des SEMCA. Au total, la cession de l'ensemble de ces participations représenterait entre 10 milliards et 12 milliards d'euros, suivant l'« humeur » du marché.
Toutefois, une telle décision rompt avec la politique menée jusque-là et privilégie le très court terme, au détriment d'un gain plus important sur une longue durée. En effet, le Gouvernement a toujours veillé à conserver la majorité du capital de ces sociétés, par crainte d'une trop forte concentration entre les majors du secteur du bâtiment et des travaux publics.
Le précédent gouvernement avait déjà envisagé une telle privatisation, mais, au regard de considérations financières, M. Raffarin avait tranché, lors de la réunion du CIADT, le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le 18 décembre 2003, en faveur du maintien des participations de l'Etat. En effet, si les privatisations peuvent rapporter de 10 milliards à 12 milliards d'euros, les services du ministère des transports ont estimé que, dans les trente prochaines années, jusqu'à la date de fin des concessions en cours, les péages autoroutiers pourraient rapporter de 34 milliards à 39 milliards d'euros.
Monsieur le Premier ministre, votre volonté de renforcer l'effort de la nation en faveur des infrastructures de transports est légitime et le groupe UC-UDF l'approuve entièrement. Toutefois, l'arbitrage économique que vous avez privilégié n'est-il pas le plus risqué et le moins rentable ?
En outre, pouvez-vous nous garantir que la totalité des sommes retirées de la vente de ces participations sera bien affectée à l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, présidée par notre collègue Gérard Longuet, et au financement des contrats de plan Etat-région et non au désendettement de l'Etat, comme M. Copé l'a annoncé hier ?
Enfin, le désengagement de l'Etat des sociétés autoroutières ne peut-il pas faire craindre aux usagers une hausse inconsidérée des tarifs des péages, à l'heure où l'on parle déjà de péages sur les routes nationales ?