Je m’adresse directement à vous, monsieur le président, car je sais que vous êtes profondément attaché à la forme du débat parlementaire, mais aussi à son esprit. Or nous assistons, ce soir, à un véritable détournement de la procédure du scrutin public.
Quelle est l’origine de cette procédure ? Elle date, comme vous le savez, mes chers collègues, de la Révolution française. On considérait alors que les citoyens désignés pour siéger dans les assemblées qui se sont succédé n’étaient pas porteurs de leur seul point de vue, mais aussi de celui de la population qu’ils étaient censés représenter.
C’est pourquoi, dès l’origine des assemblées révolutionnaires, le principe a été posé que les scrutins ne devaient pas être secrets. Le scrutin public permet donc à chacun d’exprimer son point de vue, et à la population de prendre connaissance du vote de chaque parlementaire, afin que celui-ci puisse en répondre devant elle.
Ceux qui ont établi cette procédure, non seulement dans sa forme, mais aussi dans son esprit, n’auraient pu imaginer que, par une nuit d’octobre 2010, elle serait ainsi pervertie et qu’un scrutin public serait demandé toutes les dix minutes, faute de participants au débat, faute de combattants, faute de présents, faute de conviction…
En l’occurrence, l’esprit du scrutin public n’est plus respecté : il s’agit d’une sorte de manœuvre, destinée à masquer toutes ces carences ! Nos collègues de la majorité devraient tout de même prendre des dispositions ! M. Woerthnous répète tous les jours que cette réforme est tellement importante qu’il faut la voter en l’état, hormis quelques éventuels aménagements très mineurs. Mais si cette réforme est aussi nécessaire, et même indispensable, qu’il ne le dit, pourquoi ses partisans n’accourent-ils pas pour la soutenir ?
Nous en sommes à seize scrutins publics consécutifs ! Nous assistons à un véritable détournement de procédure. J’aimerais connaître, monsieur le président, votre sentiment sur cette situation, au regard tant de la lettre que de l’esprit.