Cette situation est tout de même étonnante, mais revenons-en à l’article 23…
La nouvelle convergence affichée correspond à une nouvelle régression sociale.
Vous avez décidé de clore le dispositif qui permettait aux fonctionnaires ayant eu au moins trois enfants et ayant effectué quinze années de services effectifs de liquider leur pension avant l’âge de droit commun. Le motif invoqué est qu’il serait logique de maintenir les fonctionnaires dans l’emploi dans un contexte de relèvement de l’âge de départ à la retraite.
À la suite de pressions politiques et syndicales, vous avez renoncé au projet de supprimer ce droit dès le 13 juillet, le jour même du dépôt du projet de loi : c’était une véritable provocation ! Lors du conseil des ministres du 8 septembre dernier, le Président de la République a affirmé que « personne ne doit voir ses projets de vie bouleversés. C’est pourquoi nous proposerons que pour tous les agents qui sont à cinq ans de l’âge de la retraite et qui entendaient demander le bénéfice de cette mesure, les conditions de celle-ci demeurent inchangées. » C’est certes là un progrès, mais seulement pour ceux « qui sont à cinq ans de l’âge de la retraite » !
Voilà un bel exercice de rétropédalage, car ce retour partiel au statu quo ante, désormais intégré au texte, s’avère en totale contradiction avec l’esprit général tant de l’article que du projet de loi. Ne nous en plaignons pas, c’est sans doute un moindre mal, même si, pour l’ensemble des fonctionnaires, le compte n’y est toujours pas ! En effet, ce dispositif transitoire est à la fois sélectif et opportuniste.
Il est sélectif, parce qu’il ne préserve pas le droit acquis par des milliers de fonctionnaires parents de trois enfants au moins, ayant effectué quinze années de services effectifs, mais se trouvant à plus de cinq ans de l’âge de la retraite. Lorsqu’ils ont signé un contrat avec l’État, ils savaient à quoi ils s’engageaient, et certains ont créé leur famille en s’inscrivant dans un projet d’avenir aujourd’hui brisé.
Ce dispositif est également opportuniste, parce que vous trouvez là un bon moyen de contenir l’hémorragie de départs qui aurait eu lieu en 2011. Vous avez bien compris que toutes les personnes concernées s’apprêtaient à demander à partir à la retraite avant l’extinction du dispositif. Dans l’enseignement et la fonction publique hospitalière, notamment, on aurait assisté à des départs massifs de personnel, risquant de perturber gravement le fonctionnement de ces services publics.
Monsieur le secrétaire d’État, j’attire tout particulièrement votre attention sur le cas de la fonction publique hospitalière. En effet, nous avons récemment permis aux infirmières d’accéder à la catégorie A, en renonçant au classement en service actif ouvrant droit à un départ à la retraite à 55 ans. Or elles seront de nouveau pénalisées par le report de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans. La porte du dispositif de départ anticipé à la retraite étant encore entrouverte, celles qui ont la possibilité d’en bénéficier risquent de partir en masse, d’autant qu’elles pourront compléter leur pension amoindrie en prenant un emploi à temps partiel, par exemple, dans le secteur privé. Cela aggravera les difficultés déjà existantes dans nos hôpitaux.
Il faut réfléchir à ce risque, car nous avons déjà bien du mal à faire fonctionner nos hôpitaux.