Intervention de Hugues Portelli

Réunion du 4 février 2010 à 21h30
Réforme des collectivités territoriales — Article 35

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

Pour le Conseil constitutionnel, une collectivité territoriale se caractérise par le fait qu’elle s’administre librement par un conseil élu. S’administrer librement, cela signifie avoir une autonomie financière et un pouvoir réglementaire résiduel.

Je rappelle que nous n’avons pas osé, en 2003 et en 2004, aller très loin en matière d’autonomie financière, comme nous aurions pu le faire. Nous avons finalement adopté un texte tout à fait ambigu à cet égard.

Il en est de même concernant le pouvoir réglementaire. Dans un pays centralisé comme le nôtre, la loi fixe les règles, le Gouvernement les applique en exerçant son pouvoir réglementaire et les collectivités territoriales agissent dans ce cadre. Ainsi, si le Gouvernement omet de prendre les décrets d’application d’une loi, les collectivités territoriales n’ont pas le droit de l’appliquer directement : le pouvoir réglementaire du Gouvernement doit obligatoirement jouer son rôle de filtre.

Voilà donc en quoi consiste la libre administration des collectivités territoriales : on voit que ce n’est pas grand-chose !

Parlons maintenant des compétences. Les lois de décentralisation de 1981 et de 1982, puis celles qui ont suivi, ont donné des compétences d’attribution à la région, au département et à la commune. En dehors de ces compétences attribuées, les collectivités territoriales exercent, dans le cadre du pouvoir réglementaire résiduel dont elles disposent, cette clause de compétence générale qui n’est pas constitutionnellement reconnue : cela signifie qu’elles peuvent agir quand il existe un intérêt local.

En fin de compte, l’article 35 vise à inscrire noir sur blanc la pratique et l’état du droit aujourd’hui. Par exemple, s’il fait référence à la collectivité chef de file, c’est parce que, quand on a supprimé la tutelle de l’État, on n’a pas eu le courage de prévoir la tutelle d’une collectivité sur une autre. Les mêmes pouvoirs ont donc été donnés à tout le monde. Pourtant, on sait très bien que le maire d’un village n’a pas les mêmes moyens administratifs, humains et financiers que le maire de Paris, même s’il a les mêmes compétences. C’est une complète hypocrisie ! Toutes les collectivités disposent de la clause de compétence générale, mais la plupart d’entre elles, fautes de moyens, ne l’exerceront jamais, y compris bon nombre de départements et certaines régions, malheureusement trop pauvres.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion