Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, lors de la discussion, l'an dernier, du projet de loi relatif au droit d'asile, devenu la loi du 10 décembre 2003, nous étions tous convaincus que le succès de la réforme se jugerait sur le raccourcissement des délais d'examen des demandes d'asile, alors excessivement longs, et donc sur la mise en oeuvre de moyens supplémentaires pour l'Office de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, et pour la Commission des recours des réfugiés, la CRR.
C'est au vu de l'importance de ces délais que M. le Président de la République avait appelé de ses voeux, dans son allocution télévisée du 14 juillet 2002, une réforme immédiate du droit d'asile.
Il est vrai que la longueur de ces délais entraînait le cumul de graves handicaps, source d'iniquité pour les personnes réellement persécutées ou menacées dans leur vie ou dans l'exercice de leurs droits les plus fondamentaux.
Ces délais étaient, en revanche, mis à profit de manière systématique par les étrangers dont le souhait de s'établir dans notre pays ne reposait que sur des motifs économiques.
Ils provoquaient, en outre, une saturation du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile, préjudiciable tant à la dignité des personnes concernées qu'à une gestion attentive des deniers publics. C'est en effet à une véritable dérive des coûts estimés de la prise en charge des demandeurs d'asile que nous assistons depuis quelques années.
Comme vous le savez, mes chers collègues, l'OFPRA est un établissement public placé sous la tutelle du ministre des affaires étrangères, auquel est organiquement rattaché la Commission des recours des réfugiés.
Il peut sans doute paraître étonnant que cette juridiction administrative spécialisée, qui constitue d'ailleurs, avec ses 130 formations de jugement, la première juridiction française au regard de l'importance quantitative de son contentieux - 25 000 à 30 000 décisions annuelles -, ne dispose pas d'un budget propre. En effet, les crédits dont elle dispose sont inclus dans le budget de l'OFPRA, organisme dont elle contrôle les décisions.
Depuis la réforme, le Gouvernement a tenu l'engagement qu'il avait pris de renforcer les effectifs de l'OFPRA et de la CRR, et il poursuivra ses efforts en ce sens en 2005.
Vous déclariez, monsieur le ministre, le 9 novembre dernier, devant la commission des affaires étrangères du Sénat, que le financement de la réforme du droit d'asile constituait l'une des priorités du budget pour 2005, l'objectif étant de faire en sorte que la CRR traite les dossiers en trois mois d'ici à la fin de l'année prochaine, ce qui suppose une augmentation de 18 % des crédits de l'OFPRA.
Il est vrai que, si des progrès considérables ont déjà été accomplis au sein de l'OFPRA, il n'en va pas tout à fait de même pour la CRR. Le délai d'examen devant l'OFPRA, qui s'élevait à sept mois en 2002, a été ramené à deux mois, ce qui coïncide parfaitement avec l'objectif fixé lors des travaux parlementaires.
En revanche, l'objectif de quatre mois affiché par le Gouvernement comme délai d'examen de recours par la CRR est loin d'être atteint et avoisine plutôt un an aujourd'hui. Ne conviendrait-il pas, dans ces conditions, d'intensifier les efforts afin, notamment, d'améliorer l'organisation interne de la CRR et de renforcer le greffe ?
Paradoxalement, l'effort budgétaire en faveur de l'OFPRA et de la CRR entraînera, à terme rapproché, une source d'économie substantielle pour l'Etat. Rappelons en effet que le logement en CADA - centre d'accueil pour demandeurs d'asile - mobilisera, dans le budget des affaires sociales, 175 millions d'euros en 2005, soit 0, 5 million d'euros par jour, tandis que l'hébergement en hôtel atteindra 1, 3 million d'euros par jour, sans pour autant que le problème soit traité dans des conditions réellement convenables.
Toute diminution des délais aboutit à libérer des places d'accueil disponibles et à multiplier les chances d'accès des demandeurs d'asile aux CADA, ce qui constitue de loin la meilleure solution.
Il n'est pas si fréquent qu'une dépense plus importante au sein d'un ministère entraîne des économies bien plus considérables dans un autre. Gardons-nous donc d'oublier l'unité de l'Etat et celle du contribuable !